Cour d’appel administrative de Marseille, le 16 juillet 2025, n°25MA00013

La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 16 juillet 2025, une décision fondamentale concernant la computation des délais de recours. Un ressortissant étranger a sollicité la modification de son titre de séjour pour obtenir un certificat de résidence de dix ans. L’autorité administrative a opposé un refus à cette demande par une décision comportant également une obligation de quitter le territoire français. Le pli recommandé notifiant cet acte n’a jamais été reçu par le destinataire en raison de défaillances du service postal. L’intéressé a découvert l’existence de cette mesure d’éloignement lors d’un contrôle d’entrée sur le territoire à l’aéroport.

Le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête contre cet arrêté par une ordonnance fondée sur la tardiveté du recours contentieux. Le requérant a interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Marseille pour obtenir l’annulation de cette décision d’irrecevabilité manifeste. Il soutient que l’absence de mention du numéro d’appartement et le défaut d’avis de passage ont empêché la réception du courrier. La question posée porte sur la validité de la notification postale lorsque les mentions portées sur l’avis de réception sont incomplètes. La juridiction d’appel considère que le défaut de preuve du dépôt de l’avis de passage fait obstacle au déclenchement du délai. L’analyse de l’exigence de régularité de la notification précédera l’examen des conséquences juridiques de l’annulation de l’ordonnance.

I. L’exigence d’une notification régulière conditionnant le délai de recours

A. L’insuffisance des mentions portées sur l’avis de réception

Le juge administratif rappelle que « la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie » si un avis d’instance a été déposé. En l’espèce, l’avis de réception comportait la mention « Pli avisé et non réclamé » sans toutefois préciser la date de présentation. L’absence d’indication du bureau de poste de mise en instance empêche de vérifier la régularité des formalités de distribution du courrier. L’autorité administrative ne démontre pas que le préposé a informé le destinataire de la mise à disposition de l’envoi recommandé litigieux.

B. La preuve du dysfonctionnement postal apportée par le requérant

Le requérant produit un courriel des services postaux identifiant un dysfonctionnement lors du processus de distribution du courrier recommandé visé. Cette preuve matérielle corrobore l’affirmation de l’intéressé selon laquelle aucun avis de passage n’avait été déposé dans sa boîte aux lettres. La présomption de régularité de la notification se trouve ainsi valablement écartée par les éléments probants fournis par l’usager défaillant. La connaissance de l’acte administratif n’a pu être établie qu’au moment de l’interpellation du ressortissant étranger par les forces de l’ordre. La reconnaissance de cette défaillance de notification fonde alors l’annulation de la décision d’irrecevabilité prononcée en première instance.

II. Les conséquences procédurales de l’irrégularité de la notification

A. L’inopposabilité d’un délai de recours n’ayant jamais couru

L’annulation de l’ordonnance attaquée sanctionne l’erreur commise par le premier juge dans l’appréciation de la recevabilité de la demande initiale. Puisque la notification était irrégulière, le délai de recours d’un mois « n’a pas pu commencer à courir » avant l’audience. La computation du délai ne saurait débuter en l’absence de mentions claires et concordantes sur les documents de transport du pli. Le droit au recours effectif impose une notification permettant à l’administré de connaître précisément les voies et délais de contestation.

B. Le renvoi de l’affaire devant le juge du premier ressort

Le juge d’appel décide de renvoyer l’affaire devant le tribunal administratif de Marseille pour un examen au fond des moyens invoqués. Cette solution permet de ne pas priver les parties du bénéfice du double degré de juridiction sur la légalité de l’arrêté. La condamnation de la puissance publique aux frais de justice souligne la responsabilité du service dans le défaut d’information du justiciable. L’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Marseille protège ainsi les garanties procédurales fondamentales des usagers du service public.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture