La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu le 20 janvier 2025 une décision portant sur l’éloignement d’un ressortissant étranger au comportement menaçant. L’intéressé réside sur le sol français depuis l’âge de douze ans et exerce conjointement l’autorité parentale sur un enfant mineur de nationalité française. Son passé est marqué par plusieurs condamnations pour trafic de produits stupéfiants ainsi que par des signalements récents pour violences et menaces de mort. Le préfet du Var a prononcé une obligation de quitter le territoire sans délai assortie d’une interdiction de retour pour une durée de trois ans. Le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête en annulation par un jugement du 25 mars 2024 dont le requérant a interjeté appel. Ce dernier soutient notamment que l’autorité de la chose jugée s’opposait à une telle mesure et que son état de santé interdisait son renvoi. Il appartient au juge d’appel de déterminer si la persistance de la menace pour l’ordre public justifie l’éviction des droits au séjour normalement garantis. La juridiction confirme la légalité de l’arrêté préfectoral en estimant que la gravité des faits nouveaux autorisait une appréciation renouvelée de la dangerosité du requérant.
I. La caractérisation souveraine d’une menace pour l’ordre public
A. L’appréciation renouvelée du comportement de l’intéressé
L’administration peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsque son comportement « constitue une menace pour l’ordre public » selon le code de l’entrée. Les magistrats marseillais relèvent ici une accumulation de faits délictuels s’étendant sur deux décennies incluant des infractions graves à la législation sur les stupéfiants. L’intéressé a également fait l’objet de signalements très récents pour des faits de viol sur conjoint et des menaces de mort réitérées en 2024. Bien que ces derniers faits n’aient pas donné lieu à des poursuites judiciaires, le juge administratif valide la matérialité des signalements qui restait non contestée. Cette approche confirme que l’autorité administrative dispose d’un large pouvoir pour apprécier la dangerosité d’un individu au-delà des seules condamnations pénales définitives.
B. L’inopposabilité de la chose jugée face à l’évolution de la menace
Le requérant invoquait l’autorité de la chose jugée attachée à un précédent jugement ayant annulé une mesure d’expulsion prise deux ans auparavant par le préfet. La Cour écarte ce moyen en soulignant que les faits soumis au tribunal lors de la première instance différaient radicalement de ceux motivant l’acte attaqué. Les signalements intervenus entre 2016 et 2024 constituent des éléments nouveaux permettant une nouvelle analyse de la situation globale de l’étranger par l’administration. L’autorité absolue de la chose jugée ne saurait faire obstacle à une mesure d’éloignement fondée sur des comportements postérieurs ou non révélés précédemment au juge. Cette solution garantit ainsi l’efficacité de l’action préfectorale face à l’évolution constante de la menace représentée par certains ressortissants séjournant de manière irrégulière.
II. La conciliation rigoureuse entre impératifs de sécurité et droits fondamentaux
A. L’éviction du droit au séjour au nom de la sécurité publique
L’accord franco-algérien prévoit la délivrance de plein droit d’un titre de séjour pour l’ascendant d’un enfant français résidant habituellement sur le territoire de la République. La Cour rappelle toutefois qu’aucune disposition de ce texte « ne prive l’autorité compétente du pouvoir » de refuser le certificat pour motif d’ordre public. Le droit au séjour découlant de la parentalité d’un enfant français n’est donc pas absolu et demeure subordonné à l’absence de dangerosité manifeste de l’individu. En l’espèce, la persistance des agissements violents de l’intéressé justifie l’éviction des dispositions protectrices normalement applicables aux ressortissants algériens parents de jeunes mineurs. Le juge administratif privilégie ainsi la sauvegarde de la sécurité publique sur le bénéfice automatique d’un droit au séjour pourtant solidement ancré.
B. La proportionnalité de l’éloignement face à l’intensité de l’atteinte à la vie familiale
L’examen de la proportionnalité de l’atteinte à la vie privée et familiale constitue le dernier rempart juridique contre l’exécution de la mesure d’obligation de départ. La Cour admet que l’éloignement d’un père exerçant l’autorité parentale sur un enfant français vivant à son domicile constitue par nature une ingérence grave. Elle considère néanmoins que la gravité exceptionnelle des faits reprochés rend cette mesure nécessaire à la protection de l’ordre et des libertés d’autrui. L’intérêt supérieur de l’enfant ne fait pas non plus obstacle au départ dès lors que la mère est en mesure d’assurer seule son éducation. L’interdiction de retour pour une durée de trois ans est également confirmée au regard de la menace persistante que l’intéressé continue de faire peser.