Cour d’appel administrative de Marseille, le 24 janvier 2025, n°23MA03080

La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu le 24 janvier 2025 une décision précisant les modalités de classement initial des praticiens hospitaliers. Le litige concernait la prise en compte de services antérieurs et l’application d’une réforme statutaire modifiant la grille des émoluments de ces agents. Une praticienne contestait son positionnement administratif en faisant valoir une expérience de clinicienne non intégrée lors de sa nomination à titre permanent. Le Tribunal administratif de Toulon avait, par un jugement du 16 novembre 2023, partiellement fait droit à sa demande en annulant le premier arrêté. La juridiction d’appel devait alors trancher la question de la reconstitution de carrière après une nomination irrégulière et l’impact d’un changement de grille. Elle confirme l’obligation pour l’administration d’intégrer toute ancienneté utile tout en validant la date de reclassement calculée selon les nouvelles dispositions.

I. La reconnaissance impérative des services antérieurs dans le classement initial

A. L’obligation de prise en compte de l’expérience professionnelle acquise

Le Code de la santé publique dispose que les praticiens sont classés en tenant compte « de la durée des fonctions de même nature effectuées antérieurement ». Le juge administratif rappelle que l’ancienneté doit inclure les services présentant un intérêt pour le service public hospitalier accomplis avant la nomination définitive. La requérante justifiait de deux années de fonctions en qualité de cheffe de clinique des universités au sein d’un centre hospitalier universitaire. L’article R. 6152-15 du code précité oblige l’autorité administrative à intégrer cette expérience pour déterminer l’échelon de départ du fonctionnaire stagiaire. En l’espèce, le cumul des activités passées permettait à l’intéressée de revendiquer un classement au quatrième échelon dès sa prise de fonctions. La méconnaissance de cette règle de décompte entache d’illégalité l’acte administratif fixant la situation statutaire initiale de l’agent public.

B. L’indifférence de l’information tardive sur l’illégalité du classement

L’autorité de gestion arguait que la praticienne n’avait pas fourni les justificatifs nécessaires au moment de l’édiction de l’arrêté de nomination contesté. La Cour rejette cet argument en soulignant que l’absence de notification régulière de l’acte empêchait celui-ci de devenir définitif envers l’intéressée. L’erreur de droit commise par le gestionnaire ne peut être couverte par le silence initial du bénéficiaire de la décision individuelle. Le juge confirme ainsi que le droit au classement correct prime sur les difficultés matérielles d’information rencontrées par l’administration de gestion. Cette solution protège les droits statutaires des praticiens en obligeant l’autorité de nomination à une vérification complète des états de services passés.

II. La détermination rigoureuse de la date de reclassement sous l’empire de la nouvelle grille

A. L’application mécanique du tableau de correspondance réglementaire

Le décret du 28 septembre 2020 définit les conditions de passage entre l’ancienne et la nouvelle grille de rémunération des praticiens hospitaliers. Le texte prévoit que les agents situés au sixième échelon sont reclassés au troisième échelon en conservant leur ancienneté acquise précédemment. La requérante prétendait bénéficier de ce nouveau classement dès le premier octobre 2020, date d’entrée en vigueur de la réforme statutaire. Toutefois, le juge procède à une reconstitution théorique de la carrière pour vérifier si les conditions de passage étaient effectivement remplies. L’exactitude du reclassement dépend directement de la position que l’agent aurait dû occuper si son ancienneté initiale avait été traitée légalement.

B. La confirmation de la trajectoire de carrière recalculée

L’analyse montre que l’intéressée aurait atteint le sixième échelon seulement le 21 novembre 2020 grâce à l’intégration de ses services passés. Par conséquent, elle ne pouvait prétendre au bénéfice de la nouvelle grille dès le mois d’octobre conformément aux dispositions réglementaires applicables. La Cour administrative d’appel de Marseille valide donc la date retenue par l’administration pour opérer la bascule vers le nouveau système. Cette décision illustre la méthode de reconstitution de carrière que le juge utilise pour corriger les effets d’une décision initiale illégale. La portée de l’arrêt réside dans cette articulation entre la sanction de l’erreur passée et la validation des conséquences juridiques présentes.

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Hassan KOHEN
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