Cour d’appel administrative de Marseille, le 24 juillet 2025, n°24MA02885

La Cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 24 juillet 2025, une décision portant sur la contribution spéciale due par un employeur de main-d’œuvre étrangère irrégulière. Un contrôle de gendarmerie a révélé la présence d’un salarié muni d’un récépissé de demande de titre de séjour excluant explicitement toute activité salariée. L’administration a alors imposé à l’employeur une contribution spéciale s’élevant à dix-huit mille huit cents euros, suite à la transmission du procès-verbal d’infraction. Le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande d’annulation de cette sanction pécuniaire par un jugement rendu le 10 octobre 2024. La société requérante a interjeté appel en invoquant l’irrégularité du procès-verbal de gendarmerie et le dépassement du plafond légal de l’amende pénale. Le juge d’appel devait déterminer si l’irrégularité d’un acte de procédure pénale pouvait entacher la légalité d’une sanction administrative subséquente. La juridiction rejette la requête en confirmant le montant de la contribution et l’inopérance des moyens dirigés contre la procédure de constatation. L’arrêt écarte d’abord les moyens relatifs à la légalité externe de la décision avant de valider le calcul du quantum de la sanction.

I. L’inopérance des moyens tirés de l’irrégularité de la procédure pénale

A. L’incompétence du juge administratif à l’égard des actes de police judiciaire

La société invoquait le caractère vicié du contrôle effectué par les services de la gendarmerie nationale lors de la constatation de l’infraction. Le juge administratif rappelle que le procès-verbal litigieux constitue un acte de procédure pénale réalisé sous le contrôle de l’autorité judiciaire. La Cour précise qu’il « n’appartient pas au juge administratif d’examiner la régularité d’un tel acte » en raison de sa nature juridique. Cette solution consacre la séparation des pouvoirs en interdisant au juge administratif de porter une appréciation sur la validité des actes judiciaires. Les griefs portant sur les conditions du contrôle de gendarmerie ne peuvent donc pas utilement être invoqués pour contester la sanction administrative.

B. Le caractère indissociable du procès-verbal et de la poursuite pénale

Le procès-verbal est qualifié d’acte indissociable de la procédure pénale, ce qui rend les critiques à son encontre inopérantes devant la juridiction administrative. L’administration peut donc légalement fonder sa sanction sur les constatations de fait mentionnées dans ce document sans craindre une annulation pour vice procédural. Le contentieux de la contribution spéciale se détache ainsi des conditions de forme présidant à la recherche des infractions par les officiers de police. Cette impossibilité de contester la régularité du procès-verbal devant le juge administratif renforce l’efficacité répressive de l’administration contre le travail illégal. Le juge se borne à vérifier la matérialité des faits sans pouvoir censurer les éventuels manquements aux règles de procédure pénale.

II. La stricte application du régime de la contribution spéciale

A. Le plafonnement majoré des sanctions pécuniaires pour les personnes morales

L’employeur contestait le montant de la contribution en soutenant que celui-ci ne pouvait excéder le plafond de quinze mille euros prévu par le code. La Cour écarte ce moyen en combinant les dispositions du code du travail avec celles du code pénal relatives à la responsabilité des sociétés. Le montant de la contribution « ne peut excéder le montant de l’amende pénale susceptible d’être infligée » à l’auteur de l’infraction. Le taux maximum applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi pénale répressive. Dès lors, une contribution de dix-huit mille huit cents euros respecte parfaitement le plafond légal imposé aux employeurs dotés de la personnalité morale.

B. L’exclusion des réductions de taux en cas de cumul d’infractions

La société sollicitait l’application d’un taux réduit en arguant de sa bonne foi et de l’absence d’autres manquements lors du contrôle. L’arrêt souligne que l’élément intentionnel n’est pas nécessaire pour caractériser l’emploi irrégulier d’un étranger dépourvu de titre de séjour valable. Le bénéfice de la réduction est refusé car le procès-verbal mentionnait un cumul d’infractions incluant la pratique du travail dissimulé. La Cour confirme ainsi la sévérité du régime de la contribution spéciale, dont les conditions de minoration sont interprétées de manière restrictive. L’employeur ne peut se prévaloir d’aucune difficulté de recrutement pour échapper au paiement de la somme réclamée par l’établissement public.

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Hassan KOHEN
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