La cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 3 juin 2025, une décision portant sur la responsabilité de la puissance publique pour dommage de travaux publics.
Une piétonne a chuté sur un trottoir après avoir heurté une chaîne métallique attachée à un panneau de signalisation qui était posé sur le sol. Le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande indemnitaire de la victime par un jugement rendu le 21 mars 2024 pour absence de faute. La requérante soutient que la collectivité a commis une erreur en ne supprimant pas cet obstacle situé sur le passage des usagers de la voie. Le litige repose sur la question de savoir si la présence d’un tel dispositif constitue un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public de voirie. L’étude de cette solution conduit à analyser la preuve de l’entretien normal avant d’étudier l’incidence de la faute commise par l’usager de la voie.
I. L’appréciation de l’entretien normal de la voirie publique
A. La répartition de la charge probatoire entre les plaideurs
Les juges rappellent qu’il « appartient à l’usager victime d’un dommage […] d’apporter la preuve […] de la réalité de ses préjudices » et du lien de causalité. La collectivité peut écarter sa responsabilité en démontrant l’entretien normal de l’ouvrage ou en prouvant l’existence d’une faute d’imprudence commise par la victime. Cette exigence probatoire protège l’administration contre des demandes indemnitaires qui ne reposeraient sur aucune anomalie réelle de la voirie ouverte à la circulation du public.
B. L’absence d’obstacle excédant les sujétions normales de circulation
La présence de la chaîne au sol ne « constituait pas un obstacle excédant […] ceux qu’un usager […] doit s’attendre à rencontrer en milieu urbain ». L’espace de cheminement demeurait suffisant pour permettre la circulation des piétons sans les exposer à un risque particulier de chute lors de leurs déplacements. L’entretien normal de l’ouvrage public est ainsi caractérisé par l’absence d’aménagement dangereux ou imprévisible pour un usager circulant avec une prudence moyenne. Le rejet de la responsabilité administrative s’explique également par l’analyse du comportement de la victime lors de la survenance du dommage corporel.
II. L’exonération de la puissance publique par l’imprudence de l’usager
A. La visibilité manifeste de l’anomalie signalée sur le trottoir
L’accident s’étant produit en plein jour, la « chaîne de gros volume » était parfaitement « visible par un piéton prêtant une attention suffisante à son déplacement ». La couleur sombre de l’objet ne constituait pas une circonstance de nature à dissimuler le danger pour un passant faisant preuve de vigilance habituelle. Les juges soulignent que l’obstacle ne présentait aucune dimension extraordinaire susceptible de surprendre un piéton faisant preuve de la diligence normalement requise en ville.
B. La faute d’inattention comme cause exclusive du dommage corporel
La chute est imputable à la seule inattention de la victime qui n’a pas pris les précautions nécessaires pour contourner cet obstacle matériel bien identifié. L’absence de carence du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police administrative confirme le bien-fondé du jugement rendu par les premiers juges. Cette décision illustre la rigueur jurisprudentielle concernant l’appréciation des fautes commises par les usagers des ouvrages publics lors de l’utilisation normale du domaine.