Cour d’appel administrative de Marseille, le 4 février 2025, n°23MA02942

La cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 4 février 2025, un arrêt portant sur la reconnaissance du droit au séjour décennal. Un ressortissant étranger conteste le rejet de sa demande de titre de séjour malgré une présence prolongée sur le territoire national. Le tribunal administratif de Marseille avait pourtant validé la décision administrative par un premier jugement rendu le 14 juin 2023. Le requérant produit devant la juridiction d’appel une multiplicité de documents couvrant une période supérieure à dix années civiles pleines. La question juridique centrale réside dans l’administration de la preuve de la résidence habituelle au sens de l’accord franco-algérien. Les juges considèrent que la production de pièces médicales et fiscales concordantes suffit à établir la réalité du séjour habituel requis. Cette solution impose l’annulation du refus de titre et oblige l’administration à délivrer le certificat de résidence sollicité sans délai. L’étude de cette décision permet d’appréhender la rigueur de l’évaluation probatoire avant de souligner la force contraignante des engagements internationaux.

**I. L’exigence probatoire de la résidence habituelle décennale**

**A. Une appréciation matérielle et concrète des preuves produites**

La juridiction administrative opère un contrôle minutieux des éléments de fait présentés par le demandeur pour attester de son ancrage territorial. Le requérant doit effectivement établir qu’il « justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans » conformément aux textes. Cette démonstration repose sur une accumulation de documents administratifs dont la valeur probante est examinée avec une bienveillance réaliste par les magistrats. Les juges d’appel relèvent que les pièces versées aux débats sont « cohérentes entre elles » pour démontrer la continuité du séjour effectif. Cette méthode d’analyse permet de s’assurer que l’intéressé n’a pas quitté le sol français de manière significative durant la période considérée. L’examen des faits par le juge de l’excès de pouvoir s’attache à la substance même de la vie quotidienne du ressortissant.

**B. La cohérence d’un faisceau d’indices documentaires diversifiés**

La diversité des sources de preuve constitue un élément déterminant pour emporter la conviction de la cour sur la réalité de l’installation. Les magistrats s’appuient notamment sur des documents de santé tels que des certificats de consultation, des bilans respiratoires ou des justificatifs médicaux. Ces éléments « attestent d’une nécessaire présence de l’intéressé sur le territoire français » au cours des différentes années de la période décennale. La présence de bordereaux de situation fiscale et de simples factures d’achats vient compléter ce panorama probatoire avec une précision temporelle remarquable. Cette accumulation documentaire forme un ensemble solide qui ne laisse aucun doute sur la présence habituelle du demandeur depuis l’année 2008. La cour valide une conception globale de la preuve qui ne se limite pas à un seul type d’acte administratif.

**II. L’entier contrôle du juge sur le respect des stipulations conventionnelles**

**A. L’application stricte de l’article 6-1 de l’accord franco-algérien**

Le juge administratif veille à la pleine efficacité des stipulations internationales qui priment sur les dispositions législatives du code de l’entrée. L’article 6-1 de l’accord bilatéral prévoit la délivrance de plein droit d’un certificat de résidence à celui qui réside habituellement en France. L’administration ne dispose d’aucun pouvoir discrétionnaire dès lors que la condition de durée est matériellement remplie par le ressortissant étranger concerné. La cour souligne que l’autorité préfectorale a fait une « inexacte application des stipulations » précitées en refusant le titre de séjour sollicité. Ce constat entraîne mécaniquement l’illégalité de la décision de refus ainsi que celle de l’obligation de quitter le territoire français qui l’accompagne. Le contrôle exercé par la juridiction assure le respect de la parole donnée par l’État français dans ses relations diplomatiques.

**B. La reconnaissance d’un droit au séjour de plein droit**

L’annulation du jugement de première instance et de l’acte administratif permet de rétablir le requérant dans l’intégralité de ses droits individuels. La cour estime que le rejet de la demande initiale était infondé au regard de la situation personnelle et de l’ancienneté du séjour. Le présent arrêt « implique nécessairement que l’administration délivre un certificat de résidence » portant la mention vie privée et familiale à l’intéressé. Cette injonction est assortie d’un délai de deux mois pour garantir l’exécution rapide de la décision juridictionnelle rendue en faveur du demandeur. La protection accordée souligne l’importance de la stabilité du séjour pour les ressortissants étrangers justifiant d’une présence ancienne et continue. Cette solution confirme la mission du juge comme protecteur des libertés face aux erreurs d’appréciation commises par les services administratifs.

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Hassan KOHEN
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