La cour administrative d’appel de Marseille a rendu, le 5 février 2025, une ordonnance précisant les conditions d’octroi d’une provision en matière de responsabilité médicale. Une patiente, victime d’un accident de la circulation, avait été prise en charge par le service des urgences d’un établissement public de santé. Elle est ressortie le jour même malgré un pneumothorax, pathologie diagnostiquée seulement trois jours plus tard dans un autre établissement de soins privé. Saisi d’une demande de provision, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête par une ordonnance du 13 septembre 2024. L’appelante soutient que l’absence de diagnostic initial constitue une faute à l’origine de l’intégralité de ses préjudices physiques, moraux et même professionnels. Le litige porte sur l’existence d’une obligation non sérieusement contestable au sens des dispositions de l’article R. 541-1 du code de justice administrative. La juridiction d’appel confirme la faute mais limite l’indemnisation provisionnelle aux seules conséquences directes du retard de trois jours dans la prise en charge. L’analyse de la décision permet d’étudier l’affirmation d’une faute de diagnostic médical avant d’envisager l’appréciation stricte du lien de causalité en référé-provision.
I. L’affirmation d’une faute de diagnostic médical
A. La caractérisation du manquement hospitalier
La juridiction marseillaise fonde son raisonnement sur la présence d’une anomalie décelable dès la première lecture des clichés radiographiques par les médecins urgentistes. Le juge affirme que ce « défaut de diagnostic peut être regardé comme une faute de nature à engager la responsabilité » de l’hôpital public. Cette qualification juridique repose sur l’évidence du manquement technique, rendant l’obligation de réparation certaine dans son principe pour la période de retard constatée.
B. La délimitation temporelle de l’obligation indemnitaire
La portée de cette faute demeure néanmoins restreinte par le juge des référés qui refuse d’imputer l’ensemble des séquelles à l’établissement de santé. Le retard imputable au service n’a duré que soixante-douze heures, séparant l’admission initiale de la découverte effective du pneumothorax dans une autre clinique. La décision précise que le manquement n’est pas la cause de la pathologie elle-même, le juge constatant seulement un décalage temporel dans l’administration des soins. Cette délimitation temporelle conduit naturellement le magistrat à exercer un contrôle rigoureux sur le lien de causalité entre le manquement et les préjudices invoqués.
II. L’appréciation stricte du lien de causalité en référé-provision
A. L’exigence d’une distinction entre pathologie initiale et retard fautif
L’exigence de certitude propre au référé-provision impose une démonstration rigoureuse de l’imputation des préjudices au seul retard fautif de prise en charge médicale. Le juge écarte les demandes relatives au déficit fonctionnel permanent et à l’incidence professionnelle, faute de distinction claire dans les conclusions du médecin conseil. Ces préjudices, bien que réels, ne présentent pas un caractère « non sérieusement contestable » tant que leur lien exclusif avec le retard n’est pas établi.
B. Le constat d’une indemnisation provisionnelle déjà proportionnée
Le montant déjà octroyé par l’assureur suffit à couvrir le déficit temporaire, les douleurs et les pertes de revenus liés strictement aux trois jours perdus. Le magistrat rejette la requête en confirmant l’ordonnance de première instance, faute d’éléments probants permettant d’allouer une provision complémentaire à la victime de l’accident. La solution illustre la prudence du juge administratif face à des expertises médicales globales ne segmentant pas précisément l’impact réel d’une faute ponctuelle.