Cour d’appel administrative de Nancy, le 13 mai 2025, n°24NC01429

Par un arrêt rendu le 13 mai 2025, la Cour administrative d’appel de Nancy se prononce sur la légalité d’un refus de délivrer des titres de séjour. Des ressortissants étrangers, entrés en France en 2018 avec leurs enfants, ont sollicité leur régularisation après le rejet définitif de leurs demandes d’asile respectives. Le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes par un jugement du 19 mars 2024 avant que la juridiction d’appel ne soit saisie. La question posée est de savoir si l’intégration sociale et l’intérêt supérieur des enfants imposent la délivrance d’un titre de séjour de plein droit. La juridiction rejette les requêtes en examinant d’abord la stabilité de la vie familiale avant d’étudier le pouvoir discrétionnaire de l’administration concernant l’admission exceptionnelle.

I. Une application rigoureuse des critères de la vie privée et familiale

A. La relativisation de l’ancienneté du séjour

La Cour administrative d’appel de Nancy précise d’abord que le séjour des intéressés, débuté en 2018, ne présente pas un caractère d’ancienneté suffisant. Elle souligne que les requérants « ne justifient pas de liens personnels particuliers » noués sur le territoire français avant leur arrivée dans le pays. Le juge administratif rappelle que la présence passée n’avait pour but que l’examen de l’asile ou le traitement médical ponctuel d’un enfant mineur. Ainsi, l’atteinte portée au droit au respect de la vie privée et familiale n’apparaît pas disproportionnée au regard des motifs de refus opposés.

B. La protection de l’unité familiale par le retour collectif

L’intérêt supérieur des enfants constitue une considération primordiale mais n’implique pas obligatoirement le maintien de la famille sur le territoire français d’accueil. Les magistrats relèvent que les enfants mineurs possèdent la même nationalité que leurs parents et peuvent les accompagner sans difficulté dans leur pays d’origine. Par ailleurs, l’arrêt stipule que « les deux enfants scolarisés en France peuvent être scolarisés » à l’étranger sans que leur intérêt supérieur ne s’y oppose frontalement. La cellule familiale demeure préservée puisque les décisions administratives ne sont pas de nature à séparer les enfants des personnes assurant leur garde.

Cette absence d’atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux conduit alors la juridiction administrative à confirmer la validité de l’exercice du pouvoir discrétionnaire par l’administration.

II. La confirmation du pouvoir discrétionnaire dans l’admission exceptionnelle

A. La nature gracieuse de la mesure de régularisation

L’admission exceptionnelle au séjour au titre de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers constitue une simple faculté. La Cour administrative d’appel de Nancy affirme que ce texte « laisse à l’administration un large pouvoir pour apprécier » les considérations humanitaires ou exceptionnelles. Le requérant ne dispose d’aucun droit à la délivrance d’un tel titre car la mesure représente juridiquement une faveur accordée par le représentant de l’État. Par conséquent, le refus ne peut être annulé qu’en cas d’erreur manifeste d’appréciation commise par l’autorité administrative lors de l’examen de la demande.

B. L’insuffisance de l’insertion professionnelle comme motif exceptionnel

Le travail exercé sous couvert d’autorisations provisoires ne saurait créer une espérance légitime de régularisation pérenne pour le bénéficiaire d’une telle mesure. Le juge note que la circonstance de travailler dans un métier dit en tension « n’est pas en elle-même un motif exceptionnel d’admission au séjour ». L’insertion professionnelle, bien que réelle, ne suffit pas à caractériser une situation humanitaire nécessitant impérativement la protection de l’État contre l’éloignement. Enfin, la juridiction administrative rejette les requêtes en confirmant que les obligations de quitter le territoire sont fondées sur une base légale parfaitement régulière.

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Hassan KOHEN
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