La Cour administrative d’appel de Nancy a rendu, le 17 juillet 2025, une décision précisant les conditions de délivrance du titre de séjour pour motif médical. Une ressortissante géorgienne contestait l’arrêté préfectoral lui refusant le droit de demeurer sur le territoire national en qualité de parent d’un enfant malade. Entrée en France en 2019, l’intéressée invoquait la pathologie lourde de son fils mineur pour s’opposer à une mesure d’éloignement vers son pays d’origine. Le tribunal administratif de Nancy avait rejeté sa demande initiale tendant à l’annulation de l’acte administratif par un jugement du 26 mars 2024. La juridiction d’appel devait déterminer si l’état de santé de l’enfant et l’insertion sociale de la famille imposaient la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour. Elle rejette la requête en confirmant que l’offre de soins disponible en Géorgie permet une prise en charge effective des pathologies présentées par le mineur.
I. L’appréciation rigoureuse du droit au séjour pour motif médical
A. La force probante de l’avis du collège de médecins
L’autorité préfectorale fonde son refus de séjour sur l’avis défavorable émis par le collège de médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. La Cour rappelle que cet avis technique crée une présomption relative quant à la capacité de l’étranger à bénéficier d’un traitement dans son pays. Selon les juges, « la partie qui justifie d’un avis… doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence » d’un état. Cette règle probatoire impose à la requérante de produire des documents médicaux circonstanciés pour contester utilement l’appréciation portée par les experts de l’administration. En l’espèce, l’avis médical indiquait que l’enfant pouvait voyager sans risque et recevoir les soins appropriés malgré la gravité de ses antécédents oncologiques. La Cour administrative d’appel de Nancy confirme ainsi la primauté de l’expertise médicale institutionnelle à défaut de preuves contraires suffisamment précises.
B. L’exigence de preuve de l’indisponibilité effective des soins
La requérante invoquait la rémission d’une leucémie, une trisomie 21 ainsi que des troubles respiratoires nécessitant un suivi pluridisciplinaire au centre hospitalier régional. Toutefois, les pièces médicales produites par la mère « ne se prononcent pas sur la disponibilité des traitements en Géorgie » au moment du litige. La Cour souligne que l’enfant a déjà bénéficié de soins spécialisés dans son pays d’origine avant son arrivée sur le territoire national français. L’impossibilité financière de prendre en charge le traitement n’est pas davantage établie par la production de documents probants relatifs aux ressources de la famille. L’arrêt précise que les rapports généraux sur le système de santé géorgien ne suffisent pas à démontrer une absence de prise en charge individuelle. Par conséquent, les dispositions de l’article L. 425-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers n’ont pas été méconnues par le préfet.
II. La protection mesurée de la vie privée et familiale
A. L’examen de l’intérêt supérieur de l’enfant mineur
La Cour administrative d’appel de Nancy examine les moyens relatifs à la violation de la convention internationale relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989. L’intérêt supérieur de l’enfant doit constituer une considération primordiale dans toute décision administrative affectant la situation d’un mineur étranger résidant en France. Les juges relèvent que le fils de la requérante bénéficie d’une orientation en école spécialisée et d’un suivi orthophonique régulier depuis plusieurs mois. Cependant, cette intégration scolaire et médico-sociale ne fait pas obstacle à la poursuite de la vie familiale dans le pays d’origine des deux parents. La pathologie principale étant stabilisée depuis plus de quatre ans, le risque d’une rupture brutale des soins vitaux n’apparaît pas juridiquement caractérisé. La décision préfectorale ne porte donc pas une atteinte disproportionnée aux intérêts du mineur concerné par la mesure de reconduite à la frontière.
B. La proportionnalité de l’atteinte au droit à la vie privée
Le droit au respect de la vie privée et familiale est garanti par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. La requérante se prévalait de quatre années de présence, d’efforts d’apprentissage de la langue et d’un investissement notable au sein d’associations caritatives. La Cour estime que ces éléments ne suffisent pas à caractériser des liens d’une stabilité et d’une intensité particulières sur le sol français. Le séjour sur le territoire national était principalement motivé par les procédures d’asile et les nécessités du traitement médical de l’enfant handicapé. Les juges d’appel confirment que « ces seuls éléments n’établissent pas » une méconnaissance des normes protectrices de la vie privée lors de l’édiction de l’arrêté. L’acte administratif demeure ainsi légal tant dans son refus de séjour que dans l’obligation de quitter le territoire français qui en découle.