Par un arrêt en date du 22 avril 2025, la Cour administrative d’appel de Nancy a été amenée à statuer sur les conséquences procédurales du désistement d’un requérant dans le cadre d’un contentieux de la fonction publique. En l’espèce, un sapeur-pompier volontaire a fait l’objet d’une sanction disciplinaire de résiliation de son engagement par un arrêté du président du service départemental d’incendie et de secours. L’agent a alors saisi le tribunal administratif de Strasbourg afin d’obtenir l’annulation de cette décision. Par un jugement du 2 juin 2022, le tribunal a rejeté sa demande. Le requérant a interjeté appel de ce jugement, soulevant plusieurs moyens tirés de l’irrégularité de la procédure disciplinaire, d’une erreur d’appréciation de l’autorité administrative et d’un détournement de pouvoir. Cependant, au cours de l’instance d’appel, l’agent a informé la cour de son souhait de se désister de sa requête. Se posait dès lors à la cour la question de déterminer les conséquences d’un tel désistement sur l’instance et sur la charge des frais de justice. La cour administrative d’appel prend acte du désistement pur et simple du requérant, ce qui a pour effet de clore l’instance. Par conséquent, elle condamne l’appelant à verser une somme au service départemental au titre des frais exposés non compris dans les dépens.
La décision de la cour, bien que procédurale, illustre parfaitement la portée d’un désistement d’instance qui met fin au litige (I), tout en laissant au juge le soin de statuer sur la question accessoire des frais de justice (II).
I. La portée extinctive du désistement d’instance
Le désistement du requérant, en ce qu’il est qualifié de « pur et simple », emporte des conséquences radicales sur le déroulement du procès. Il conduit à un abandon définitif des prétentions en appel (A), ce qui a pour effet direct de consolider la décision rendue en première instance (B).
A. L’abandon irrévocable des prétentions en appel
Le désistement d’instance est l’acte par lequel un demandeur renonce à l’action en justice qu’il a engagée. Pour produire son plein effet, il doit être, comme en l’espèce, « pur et simple », c’est-à-dire inconditionnel. La cour administrative d’appel se borne alors à en tirer les conséquences inéluctables, ainsi que le souligne l’article premier de son dispositif : « Il est donné acte du désistement de la requête ». Cette formule signifie que la cour est immédiatement dessaisie du litige. Elle ne peut plus examiner aucun des moyens de légalité qui avaient été soulevés par l’appelant, qu’il s’agisse de la régularité de la procédure disciplinaire, de la proportionnalité de la sanction ou du détournement de pouvoir allégué. L’acte de désistement, une fois enregistré par la juridiction, rend l’instance sans objet et interdit au juge de se prononcer sur le fond du droit.
B. La cristallisation de la situation juridique antérieure
La conséquence directe de l’extinction de l’instance d’appel est que le jugement rendu par le tribunal administratif de Strasbourg acquiert force de chose jugée. En rejetant la demande d’annulation de la sanction, les premiers juges avaient validé la décision administrative. Le désistement en appel vient ainsi clore définitivement le débat contentieux sur la légalité de la résiliation de l’engagement du sapeur-pompier volontaire. Cette solution, bien que non fondée sur une analyse au fond du dossier par la cour, confirme en droit la position de l’administration. Le requérant, en renonçant à son appel, a de fait renoncé à la seule voie de droit qui lui permettait de contester l’analyse du tribunal administratif, rendant ainsi la sanction disciplinaire qui le frappait définitivement applicable et incontestable sur le plan juridictionnel.
II. L’appréciation souveraine du juge dans la répartition des frais irrépétibles
Si le désistement met fin à l’instance principale, il n’éteint pas pour autant l’obligation pour le juge de statuer sur les demandes accessoires, et notamment sur les frais de justice. La cour procède logiquement à la condamnation de la partie qui se désiste (A), tout en exerçant son pouvoir de modulation quant au montant alloué (B).
A. La condamnation de la partie qui se désiste
L’article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que la partie perdante est condamnée à payer à l’autre partie les frais qu’elle a exposés. Dans le cadre d’un désistement, la partie qui se désiste est assimilée à la partie perdante. En l’espèce, le service départemental d’incendie et de secours a dû engager des frais, notamment d’avocat, pour se défendre en appel, comme en atteste la production de son mémoire en défense. Le désistement du requérant rendant cette défense sans objet, il est équitable que celui qui est à l’origine de ces dépenses en supporte la charge. C’est pourquoi la cour fait une juste application de la règle en décidant que l’appelant « versera au service départemental d’incendie et de secours du Haut-Rhin une somme de 500 euros ». Cette condamnation n’est pas une sanction mais une compensation financière destinée à couvrir les frais inutilement engagés par la partie adverse.
B. La modulation du montant au nom de l’équité
Le texte de l’article L. 761-1 du code de justice administrative précise que le juge « tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée ». Le service départemental d’incendie et de secours avait demandé la condamnation du requérant à lui verser une somme de 1 500 euros. En fixant le montant à 500 euros, la cour use de son pouvoir modérateur. Elle n’est pas liée par le montant demandé par les parties et procède à une appréciation souveraine des circonstances de l’espèce. Cet écart significatif entre la somme demandée et celle allouée démontre que le juge administratif ne se contente pas d’appliquer automatiquement un principe de responsabilité, mais qu’il pèse les intérêts en présence. Il peut ainsi prendre en considération la situation personnelle du requérant ou le contexte du litige pour fixer une indemnité qui lui semble juste, sans pour autant exonérer totalement la partie qui s’est désistée.