Cour d’appel administrative de Nancy, le 22 juillet 2025, n°23NC03767

La Cour administrative d’appel de Nancy, par un arrêt du 22 juillet 2025, statue sur la contestation d’un refus de titre de séjour et d’une mesure d’éloignement. Une ressortissante marocaine, entrée en France en 2016, invoquait la rupture de sa vie commune pour violences conjugales afin d’obtenir le renouvellement de son droit au séjour. L’administration lui opposa un refus systématique, validé par les jugements du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne des 29 août et 16 novembre 2023, désormais portés devant le juge d’appel. La question centrale porte sur l’incidence des violences alléguées et de la durée de présence sur le territoire national face aux exigences de l’ordre public. La juridiction rejette les requêtes en soulignant l’absence de preuves matérielles concernant les sévices subis et la persistance d’attaches fortes dans le pays d’origine de l’intéressée.

I. La primauté de la légalité interne et conventionnelle du refus de séjour

A. L’insuffisance probatoire des violences conjugales invoquées

La requérante se prévaut de l’article L. 423-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pour faire obstacle au retrait de son titre. Elle soutient que la fin de la cohabitation résulte de violences subies, rendant inopérante la condition de communauté de vie normalement requise pour le maintien du droit. Le juge d’appel écarte ce moyen au motif que « sa plainte a été classée sans suite, cette dernière reposant sur des déclarations mensongères », privant ainsi la demande de fondement. Cette appréciation stricte des faits souligne l’exigence de sincérité et de preuve matérielle indispensable pour bénéficier des dispositions protectrices réservées aux victimes de violences au sein du couple.

B. La délimitation du champ d’application des accords internationaux

L’arrêt précise que les stipulations de l’accord franco-marocain du 9 octobre 1987 n’imposent pas à l’administration d’examiner d’office chaque fondement juridique possible pour une demande de régularisation. L’autorité compétente n’est tenue d’étudier les droits d’un étranger qu’au regard des demandes expressément formulées, sans que les dispositions législatives supplétives ne puissent pallier une omission de la requérante. En l’absence de sollicitation explicite d’un titre au titre d’une activité salariée, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 3 de l’accord bilatéral est jugé inopérant. La juridiction réaffirme ainsi le caractère discrétionnaire du pouvoir de régularisation préfectorale lorsque les conditions de délivrance de plein droit ne sont manifestement pas réunies par le pétitionnaire.

II. La proportionnalité maintenue de l’obligation de quitter le territoire

A. La régularité formelle et procédurale de la mesure d’éloignement

La motivation de l’obligation de quitter le territoire français se confond légalement avec celle du refus de titre de séjour, évitant ainsi toute redondance administrative inutile dans l’acte. Sur le terrain du droit d’être entendu, la cour considère que la requérante a pu exprimer ses observations utiles lors de l’instruction globale de sa demande de régularisation. Elle relève que l’intéressée « ne démontre pas qu’elle disposait d’informations pertinentes » dont la communication tardive aurait pu modifier substantiellement le sens de la décision prise à son encontre. Les garanties procédurales issues du droit de l’Union européenne sont respectées dès lors que l’étranger a été mis en mesure de présenter l’essentiel de sa situation personnelle.

B. La conciliation entre le droit au séjour et le maintien des attaches étrangères

L’examen de la vie privée et familiale sous l’angle de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme révèle une absence d’atteinte disproportionnée caractérisée. Le juge observe que la ressortissante « n’est pas dépourvue d’attaches personnelles et familiales au Maroc où elle a vécu jusque l’âge de cinquante ans » et où résident ses proches. Malgré une présence en France depuis 2015, l’intensité de ses liens avec son pays d’origine justifie le maintien de la mesure d’éloignement décidée par l’autorité préfectorale compétente. La cour confirme finalement les jugements du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et décide, en conséquence, du rejet définitif de l’ensemble des requêtes présentées par l’intéressée.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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