La Cour administrative d’appel de Nancy a rendu, le 27 mars 2025, une décision relative à la légalité d’une obligation de quitter le territoire français. Une ressortissante étrangère est entrée en France en 2021 avec ses proches avant de voir sa demande d’asile définitivement rejetée par les autorités compétentes. L’autorité administrative a ordonné son éloignement par un arrêté en date du 15 mai 2023, fixant également le pays de destination pour sa reconduite. Le tribunal administratif de Nancy a prononcé l’annulation de cet acte le 4 juillet 2023, invoquant une atteinte excessive au droit à la vie familiale. La juridiction d’appel se trouve saisie de la question de savoir si la protection subsidiaire accordée à des descendants rend illégal l’éloignement d’une ascendante. Les juges décident d’annuler le jugement de première instance car les conditions d’une intégration stable et d’une dépendance vitale ne sont pas réunies. L’analyse du raisonnement tenu par les magistrats permet d’étudier la rigueur de l’examen des liens familiaux avant d’envisager la confirmation de la régularité de la mesure.
I. Une interprétation stricte des critères de protection de la vie familiale
A. La primauté de la stabilité du séjour sur le lien de parenté
Les juges soulignent d’abord que le « séjour en France de l’intéressée est récent » au regard de son parcours de vie global et personnel. Elle a résidé la majeure partie de son existence dans son pays d’origine et « n’établit pas être dépourvue d’attaches » réelles dans cet Etat. La présence sur le territoire national de sa fille et de son petit-fils ne suffit pas à caractériser une insertion sociale ou familiale exceptionnelle. La cour rappelle ainsi que le droit au respect de la vie privée et familiale ne garantit pas un droit inconditionnel au choix du séjour. L’ancienneté de la présence et la force des liens tissés avec le pays d’accueil demeurent des éléments déterminants pour l’application de la convention.
B. L’absence de preuve d’une dépendance familiale ou médicale impérieuse
La requérante invoque le bénéfice de la protection subsidiaire accordé à ses proches pour justifier son maintien nécessaire auprès d’eux sur le territoire. La juridiction rejette cet argument en affirmant que l’intéressée « n’établit pas la nécessité de sa présence à leurs côtés » de manière quotidienne. Le dossier ne révèle aucun lien de dépendance spécifique qui rendrait la séparation insupportable ou contraire aux exigences de la vie familiale normale. Par ailleurs, le « certificat médical produit ne suffit pas davantage » à démontrer que son état de santé exigerait un accompagnement particulier pour les gestes courants. L’absence de justifications circonstanciées sur la vulnérabilité de la personne étrangère permet aux magistrats d’écarter toute erreur manifeste d’appréciation du préfet.
L’absence d’une disproportion caractérisée dans l’atteinte à la vie privée conduit logiquement la juridiction à se prononcer sur la validité des autres griefs soulevés.
II. La validation de la régularité formelle et matérielle de l’éloignement
A. La reconnaissance d’une délégation de signature régulière et opérationnelle
L’examen de la compétence de l’auteur de l’acte constitue un préalable indispensable à la vérification de la légalité externe de la décision contestée. La Cour administrative d’appel de Nancy constate l’existence d’un arrêté préfectoral de délégation de signature régulièrement publié au recueil des actes administratifs. Cette délégation autorise explicitement des responsables de l’immigration à signer les mesures portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi. Le moyen tiré de l’incompétence du signataire doit donc être écarté comme manquant en fait après vérification des pièces produites par l’administration. Cette rigueur procédurale assure la sécurité juridique des actes unilatéraux pris dans le cadre de la police des étrangers sur le sol français.
B. L’inexistence de risques sérieux de traitements inhumains ou dégradants
La légalité de la décision fixant le pays de destination est confirmée par l’absence de preuves tangibles concernant des menaces pesant sur la requérante. Bien que l’article 3 de la convention européenne interdise le refoulement vers des pays dangereux, l’intéressée « n’apporte aucun élément permettant d’établir la réalité » des risques. Son récit n’a d’ailleurs pas convaincu les instances spécialisées dans le droit d’asile lors de l’examen de sa demande de protection internationale. La cour estime que la ressortissante pourra bénéficier, en cas de besoin, de la protection des autorités de son pays d’origine sans difficulté majeure. La demande de première instance est rejetée, confirmant ainsi la pleine légalité de l’acte administratif initial ainsi que la validité de la procédure.