Cour d’appel administrative de Nancy, le 30 janvier 2025, n°22NC01459

Par un arrêt rendu le 30 janvier 2025, la Cour administrative d’appel de Nancy examine la soumission à l’impôt sur le revenu d’une indemnité transactionnelle. Un salarié licencié pour insuffisance professionnelle avait conclu un accord avec son ancien employeur prévoyant le versement d’une somme forfaitaire de 55 000 euros. L’administration fiscale a remis en cause le caractère non imposable de cette indemnité au motif que le licenciement reposait sur une cause sérieuse. Le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de décharge des contribuables par un jugement rendu en date du 5 avril 2022. La question posée à la cour concerne la capacité du juge de l’impôt à requalifier les motifs d’un licenciement pour déterminer son régime fiscal. La juridiction rejette la requête en considérant que l’insuffisance professionnelle, dûment établie par l’instruction, justifie l’imposition de l’indemnité perçue par le requérant. L’étude de cette décision impose d’analyser d’abord la recherche de la qualification juridique de la rupture avant d’aborder la rigueur des conditions d’exonération.

I. La recherche de la qualification juridique de la rupture par le juge de l’impôt

A. Le pouvoir d’appréciation souverain de la juridiction sur la nature du licenciement Le juge administratif affirme sa compétence pour déterminer si une indemnité transactionnelle présente un caractère indemnitaire ou s’il s’agit d’un complément de salaire. Il énonce qu’il lui incombe de « rechercher la qualification à donner aux sommes qui font l’objet de la transaction » lors de l’instruction du dossier. Cette analyse suppose de vérifier si la rupture du contrat de travail est effectivement « assimilable à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ». L’existence d’un protocole transactionnel ne lie donc pas le juge de l’impôt, lequel conserve toute latitude pour examiner la réalité des griefs.

B. La reconnaissance de l’insuffisance professionnelle comme motif réel et sérieux Le juge relève que le licenciement a été prononcé en raison d’objectifs commerciaux non atteints et d’une incapacité manifeste à diriger une équipe. Il souligne que « le licenciement a été prononcé en raison de son insuffisance professionnelle tant dans les relations qu’il entretenait avec les équipes ». Cette situation exclut mécaniquement l’application de l’article L. 1235-3 du code du travail, privant ainsi l’indemnité transactionnelle de son éventuel caractère exonéré. Par cette position, la cour confirme la validité du redressement opéré par l’administration fiscale au regard des faits relatés dans le dossier.

II. La rigueur probatoire relative au bénéfice des exonérations fiscales

A. L’inapplicabilité de l’exonération pour absence de cause réelle et sérieuse L’indemnité litigieuse ne peut bénéficier de l’exonération prévue par le code général des impôts dès lors que la cause du licenciement demeure réelle et sérieuse. La cour considère à bon droit que « l’indemnité transactionnelle perçue n’a pas été accordée au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ». En l’absence de préjudice distinct ou de caractère abusif de la rupture, la somme versée doit nécessairement concourir à la formation du revenu imposable. Cette solution assure une application stricte des dispositions fiscales dérogatoires, limitant les possibilités d’évasion par le biais de simples accords transactionnels.

B. L’échec de la demande subsidiaire face à l’insuffisance des éléments de preuve Les requérants invoquaient également le plafonnement de l’indemnité en fonction de la rémunération annuelle brute perçue au cours de l’année précédant la rupture. Cependant, ils ne produisent que quelques bulletins de salaire ne permettant pas d’établir avec certitude le montant global des revenus perçus en 2013. La cour écarte ce moyen en jugeant que les contribuables « ne démontrent pas que l’indemnité en litige entre dans le champ d’application » de l’exonération. La charge de la preuve repose ici sur le contribuable, qui doit justifier précisément du respect des seuils légaux pour prétendre à un dégrèvement.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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