La cour administrative d’appel de Nancy a rendu le 6 février 2025 une décision relative au refus de délivrance d’un titre de séjour. Un ressortissant étranger, entré mineur sur le territoire, conteste la légalité d’un arrêté préfectoral portant obligation de quitter le territoire français. Placé auprès de l’aide sociale à l’enfance dès 2018, l’intéressé a suivi une formation qualifiante couronnée par l’obtention d’un certificat d’aptitude professionnelle. Malgré son intégration professionnelle et sociale, le représentant de l’État a refusé de renouveler son droit au séjour au cours du mois de janvier 2023. Le tribunal administratif de Nancy a annulé cet acte pour erreur manifeste d’appréciation avant que l’administration ne saisisse la juridiction d’appel. Les juges doivent déterminer si le refus de régularisation porte une atteinte disproportionnée à la situation d’un jeune majeur parfaitement inséré. La juridiction rejette la requête préfectorale en confirmant l’existence d’une erreur manifeste commise par l’autorité administrative lors de son examen individuel. L’arrêt consacre ainsi la solidité des attaches locales du requérant tout en garantissant l’effectivité de la protection juridictionnelle par le prononcé d’une astreinte.
I. L’affirmation d’une intégration exemplaire justifiant la régularisation
A. La reconnaissance de la validité du parcours d’intégration L’arrêt souligne d’abord la qualité du parcours scolaire et professionnel accompli par le requérant depuis son arrivée sur le sol français. Les juges relèvent que l’intéressé « justifie de la qualité de son intégration par l’obtention d’un certificat d’aptitude professionnelle de maçon ». Cette réussite est d’autant plus remarquable que le jeune homme n’avait jamais bénéficié d’une scolarisation régulière dans son pays d’origine. Sa capacité d’autonomie et son réseau amical local témoignent d’une insertion sociale réussie durant sa prise en charge par les services sociaux. L’obtention d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de manutentionnaire vient consolider définitivement cette stabilité sur le territoire national.
B. La sanction de l’erreur manifeste d’appréciation préfectorale La juridiction d’appel confirme ici que l’administration a méconnu les conséquences de sa décision sur la situation personnelle et humaine de l’administré. Le préfet a « entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation au regard du pouvoir de régularisation à titre exceptionnel dont il dispose ». Cette erreur résulte d’une lecture trop restrictive des critères de présence, ignorant ainsi les efforts d’intégration réels fournis par le requérant. L’équilibre entre l’ordre public et la situation individuelle penche nettement en faveur du maintien du ressortissant étranger au sein de la société. Le juge administratif exerce ainsi un contrôle vigilant sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’autorité préfectorale en matière de police des étrangers.
II. La protection de la vie privée et l’effectivité de la décision juridictionnelle
A. L’absence de perspectives de réinsertion dans le pays d’origine L’analyse de la situation familiale constitue le second pilier fondamental du raisonnement tenu par les magistrats de la cour administrative d’appel. Il n’est « pas sérieusement contesté que l’intéressé serait isolé en cas de retour dans son pays d’origine » à cause du décès parental. L’absence de contacts prolongés avec les membres restants de sa parenté rend toute réinstallation durable dans son État d’origine particulièrement aléatoire. Cette rupture des liens familiaux dans le pays de provenance renforce la nécessité d’une protection juridique de sa vie privée en France. L’isolement social total à l’étranger s’oppose radicalement à la solidité des attaches construites localement depuis plus de quatre années consécutives.
B. Le renforcement de l’injonction par le prononcé d’une astreinte La cour veille enfin à l’exécution effective du jugement de première instance qui ordonnait déjà la délivrance d’un titre de séjour salarié. Constatant que l’administration s’est « abstenue de lui délivrer un titre de séjour », les juges décident d’assortir l’injonction initiale d’une mesure de contrainte. Une astreinte de cinquante euros par jour de retard est prononcée pour garantir que le droit au séjour soit réellement mis en œuvre. Cette décision illustre la volonté du juge administratif de ne pas laisser ses arrêts sans portée concrète face à une certaine inertie. L’autorité de la chose jugée trouve ici une traduction matérielle impérative au bénéfice du ressortissant dont la situation a été régularisée.