Cour d’appel administrative de Nancy, le 7 mai 2025, n°24NC01097

La cour administrative d’appel de Nancy a rendu, le 7 mai 2025, un arrêt relatif aux conditions de l’instruction en famille pour une enfant mineure. Cette décision précise les critères cumulatifs permettant de déroger à l’obligation de scolarisation au sein d’un établissement d’enseignement public ou privé. Les parents d’une enfant née en 2019 ont sollicité l’autorisation d’instruire leur fille à domicile pour l’année scolaire 2023-2024. L’administration académique a opposé un refus le 4 juillet 2023, confirmé par une commission académique le 21 août suivant. Le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur recours en annulation par un jugement en date du 22 février 2024. Les requérants soutiennent devant la juridiction d’appel que leur projet pédagogique est suffisant et que l’administration a commis une erreur de droit. Le litige pose la question de savoir si la seule organisation familiale peut caractériser une situation propre à l’enfant justifiant le recours à l’instruction en famille. La cour administrative d’appel de Nancy rejette la requête en estimant que les conditions légales d’octroi de l’autorisation dérogatoire ne sont pas réunies.

I. L’exigence d’une situation individuelle spécifique à l’enfant

A. La distinction entre le projet pédagogique et la situation propre de l’enfant

Les magistrats affirment que l’existence d’une situation propre « s’apprécie au regard des besoins particuliers de l’enfant concerné ». Cette condition n’est pas remplie par la seule présentation d’un projet éducatif, même si celui-ci expose les méthodes pédagogiques adaptées. L’administration doit vérifier que la demande expose de manière étayée la situation motivant, dans l’intérêt de l’enfant, le projet d’instruction. Le sens de la décision repose sur la nécessité de démontrer une singularité de l’enfant au-delà des intentions d’enseignement des parents.

B. La validation de la charge de la preuve pesant sur les responsables légaux

La cour écarte le moyen tiré de l’erreur de droit concernant l’obligation de démontrer une nuisance potentielle de la scolarité classique. Elle juge que la commission n’a pas ajouté de condition à la loi en exigeant la preuve d’une situation propre à l’enfant. Par conséquent, la motivation de la décision contestée est jugée suffisante puisqu’elle comporte l’énoncé des considérations de droit et de fait. La légalité externe et interne de l’acte administratif se trouve confirmée par le raisonnement rigoureux des juges d’appel.

II. Le rejet des convenances d’organisation comme motif de dérogation

A. L’insuffisance des contraintes géographiques liées au choix d’un établissement

Les parents invoquaient l’éloignement d’une école privée spécifique pour justifier le maintien de leur fille au domicile familial. La cour administrative d’appel de Nancy considère que ce choix ne saurait suffire à caractériser une situation propre au sens de la loi. Elle précise que « le temps de trajet que cela représenterait » pour l’enfant ne constitue pas un motif de dérogation valable. L’appréciation souveraine des juges exclut ainsi les arguments logistiques de la définition juridique de la situation propre à l’enfant.

B. La portée limitée de la dérogation face au principe de scolarisation obligatoire

L’arrêt souligne que les éléments pédagogiques produits demeurent insuffisants pour « caractériser de manière objective une situation propre à l’enfant ». Cette solution rappelle que le régime de l’instruction en famille constitue une dérogation exceptionnelle au principe de l’instruction obligatoire en établissement. En outre, la valeur de cette décision réside dans la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant face aux simples préférences des parents. La portée de la jurisprudence renforce le contrôle administratif sur les demandes d’autorisation après la réforme législative de l’éducation.

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Hassan KOHEN
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