La cour administrative d’appel de Nantes s’est prononcée le 1er avril 2025 sur la légalité d’un ajournement de deux ans opposé à une demande de naturalisation. Une ressortissante étrangère a contesté la décision de l’autorité administrative suspendant sa procédure d’acquisition de la nationalité française pour une durée déterminée. Le tribunal administratif de Nantes avait initialement annulé cet acte au motif qu’aucun entretien d’assimilation n’avait été formellement organisé préalablement à l’ajournement. L’autorité administrative a alors interjeté appel en produisant le compte-rendu de l’entretien individuel réalisé dans les services de la préfecture compétente. La question posée aux juges consistait à vérifier la régularité de la procédure et la validité du motif fondé sur une infraction routière. La juridiction d’appel annule le jugement de première instance après avoir constaté la réalité de l’entretien et l’absence d’erreur manifeste d’appréciation. L’analyse de cette décision suppose d’étudier la régularité de la procédure administrative avant d’en apprécier la légalité interne.
I. La régularité de la procédure d’ajournement de la naturalisation
A. La preuve de l’accomplissement de l’entretien individuel d’assimilation L’article 41 du décret du 30 décembre 1993 dispose que « le postulant se présente en personne devant un agent désigné nominativement par le préfet ». Cet entretien permet de vérifier que les conditions relatives à la connaissance de l’histoire et de la culture françaises sont effectivement remplies par l’intéressé. La juridiction de première instance avait retenu un vice de procédure en estimant que cette étape obligatoire n’avait pas été respectée par l’administration. Toutefois, l’autorité ministérielle a versé au dossier devant la cour le document prouvant la tenue de cet échange à la date du 16 mars 2017. Le juge d’appel considère donc que le motif d’annulation retenu initialement est erroné au regard des pièces nouvellement produites durant l’instance.
B. L’examen de la légalité externe par l’effet dévolutif de l’appel Par l’effet dévolutif de l’appel, la cour administrative d’appel examine l’ensemble des moyens de légalité initialement soulevés par la requérante devant le tribunal. Elle écarte d’abord le grief d’incompétence du signataire de l’acte en relevant l’existence d’une délégation de signature régulière au profit d’une attachée d’administration. Le moyen tiré de l’insuffisance de motivation est également rejeté car la décision ministérielle énonce précisément les considérations de fait et de droit applicables. Enfin, les juges vérifient la validité du motif de fond relatif au comportement de la candidate à la naturalisation pendant son séjour sur le territoire. Cette validation formelle permet alors au juge de se prononcer sur le bien-fondé des motifs invoqués par l’administration.
II. Le large pouvoir d’appréciation de l’autorité administrative
A. Le comportement du postulant au regard de l’ordre public L’autorité administrative dispose d’un « large pouvoir d’appréciation » pour apprécier l’intérêt de l’octroi de la nationalité française au regard du comportement général du postulant. Elle peut légalement s’appuyer sur des « renseignements défavorables recueillis sur le comportement général du postulant » pour motiver une décision de rejet ou d’ajournement. Dans cette affaire, la requérante a été condamnée par ordonnance pénale pour avoir conduit un véhicule malgré l’injonction de restituer son permis de conduire. Ces faits établis témoignent d’une méconnaissance volontaire des règles de sécurité publique et des obligations légales incombant à tout citoyen ou résident étranger.
B. L’absence d’erreur manifeste dans la mesure d’ajournement L’ajournement pour deux ans ne présente aucun caractère disproportionné au regard de la gravité et du caractère récent des faits reprochés à la candidate. La circonstance que l’intéressée ait régularisé sa situation administrative concernant son permis de conduire ne suffit pas à gommer le manquement constaté précédemment. Par ailleurs, l’administration peut exiger une probité exemplaire de la part des personnes sollicitant leur intégration définitive au sein de la communauté nationale française. La cour administrative d’appel confirme ainsi que la décision attaquée n’est entachée d’aucune erreur manifeste d’appréciation susceptible d’en justifier l’annulation contentieuse.