Cour d’appel administrative de Nantes, le 11 février 2025, n°24NT00910

La cour administrative d’appel de Nantes a rendu le 11 février 2025 un arrêt relatif au rejet d’une demande de naturalisation par le ministre. Un ressortissant étranger sollicitait l’annulation d’une décision ministérielle confirmant le refus de lui accorder la nationalité française, malgré son activité professionnelle régulière. Le tribunal administratif de Nantes ayant rejeté sa demande initiale le 9 juin 2023, l’intéressé a interjeté appel devant la juridiction supérieure. La question posée aux juges d’appel concerne la légalité d’un refus fondé sur l’insuffisance de l’insertion professionnelle et de l’autonomie matérielle. La juridiction d’appel confirme la solution des premiers juges en validant le motif substitué par l’administration durant l’instance contentieuse.

I. L’exercice du pouvoir discrétionnaire par l’autorité ministérielle

A. Le cadre juridique de la naturalisation par décret

L’acquisition de la nationalité française par décret constitue une faveur accordée par l’autorité publique selon les dispositions de l’article 21-15 du code civil. La cour rappelle que « l’acquisition de la nationalité française par décision de l’autorité publique résulte d’une naturalisation accordée par décret à la demande de l’étranger ». Ce texte confère au ministre chargé des naturalisations une compétence étendue pour apprécier l’intérêt d’octroyer ou non la citoyenneté au postulant. Le juge administratif s’assure ainsi que l’administration exerce son pouvoir dans les limites fixées par le décret du 30 décembre 1993.

B. La licéité des critères d’insertion professionnelle et d’autonomie

Le ministre peut légalement fonder sa décision sur des critères liés à la stabilité financière et au parcours professionnel du demandeur de nationalité. La juridiction précise qu’il appartient au ministre de « porter une appréciation sur l’intérêt d’accorder la nationalité française à l’étranger qui la sollicite ». Dans ce cadre, l’autorité publique peut tenir compte du « défaut d’insertion professionnelle pérenne et le degré d’autonomie matérielle du postulant ». Ces exigences permettent de vérifier que l’intéressé dispose de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille.

II. La validation juridictionnelle de l’appréciation des ressources financières

A. La confrontation des revenus avec les charges du foyer fiscal

L’administration a relevé que le requérant exerçait un emploi de plongeur depuis février 2020 avec un salaire mensuel s’élevant à environ 1 000 euros. La cour souligne que « le foyer fiscal est composé de quatre parts depuis que sa femme et leurs trois enfants l’ont rejoint en 2016 ». Les revenus déclarés au titre des années précédentes apparaissaient également modestes au regard de la composition de la famille habitant sur le territoire. L’insuffisance de l’autonomie matérielle ressort de l’inadéquation entre les ressources perçues et les besoins d’un foyer comprenant plusieurs enfants à charge.

B. Le rejet du moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation

L’intéressé soutenait qu’il n’avait jamais cherché à dissimuler sa situation familiale réelle au moment du dépôt de sa demande initiale de naturalisation. La juridiction d’appel écarte cet argument car il ne permet pas de remettre en cause le constat de précarité économique. Elle conclut que le ministre n’a pas « entaché sa décision d’erreur manifeste d’appréciation en rejetant la demande » compte tenu de son large pouvoir. Le juge administratif limite ainsi son contrôle à l’évidence de l’erreur, préservant la liberté de choix de l’État en matière de souveraineté.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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