La cour administrative d’appel de Nantes a rendu, le 14 mars 2025, une décision portant sur la responsabilité du fait des dommages de travaux publics. Un cycliste a chuté après avoir heurté un îlot en béton implanté sur une piste cyclable dont la réalisation était alors relativement récente. Le tribunal administratif de Rennes avait préalablement rejeté la demande indemnitaire de la victime par un jugement en date du 28 septembre 2023. Le requérant invoque l’absence de peinture réfléchissante et une signalisation mal implantée pour établir le défaut d’entretien normal de l’ouvrage public par l’administration. La juridiction d’appel doit rechercher si l’implantation latérale du panneau et l’absence de marquage spécifique sur l’obstacle constituent un vice d’aménagement de la voie. L’arrêt confirme le rejet de la requête au motif que l’entretien normal est établi par la présence de signaux visibles pour un usager attentif. L’analyse portera d’abord sur la caractérisation de l’entretien normal avant d’examiner l’exigence de vigilance imposée par le juge administratif aux usagers de l’ouvrage.
I. La caractérisation souveraine d’un entretien normal de l’ouvrage
A. L’absence d’un défaut d’aménagement imputable à la personne publique
L’usager victime d’un dommage doit prouver le lien de causalité, mais le maître de l’ouvrage s’exonère en établissant le bon entretien de la dépendance. La cour relève que « l’accident ainsi survenu ne peut être regardé comme imputable à un défaut d’aménagement ou à une insuffisante signalisation » de l’ouvrage. Le juge administratif considère que la configuration des lieux ne présentait pas de risque anormal pour les cyclistes circulant sur cette portion de la voie.
B. L’efficacité démontrée de la signalisation existante lors de l’accident
La cour souligne qu’un « panneau à sa gauche signalait que la piste cyclable se poursuivait sur une allée en site propre » parallèlement au boulevard. Ce dispositif était complété par deux bandes blanches au sol mettant en évidence le changement d’orientation nécessaire pour éviter l’îlot central en béton litigieux. La décision précise que ces éléments étaient parfaitement « visibles par tout usager normalement attentif », justifiant ainsi l’absence de responsabilité de l’établissement public compétent.
L’appréciation de l’aménagement ne saurait faire abstraction des conditions concrètes de réalisation du sinistre et de l’attitude attendue de la part de l’usager.
II. La persistance d’une obligation de vigilance pour l’usager de la voie
A. L’incidence limitée des modifications techniques réalisées postérieurement au sinistre
Le requérant soutenait que la pose ultérieure d’un panneau directement sur l’îlot démontrait l’insuffisance flagrante de la signalisation au moment des faits de l’espèce. Toutefois, les juges estiment que cette « circonstance ne suffit pas, en tout état de cause, à établir » l’existence d’un défaut initial d’entretien de l’ouvrage. L’amélioration de la sécurité par l’administration ne vaut pas reconnaissance d’une faute antérieure dès lors que la signalisation initiale permettait déjà une circulation sécurisée.
B. L’affirmation d’une solution classique liée aux conditions de visibilité
Le juge retient que l’accident s’est produit « en plein jour, sans intempéries ni circonstances particulières », ce qui renforce l’exigence de prudence de l’usager. L’absence de peinture réfléchissante est jugée indifférente car les conditions météorologiques et lumineuses permettaient de déceler l’obstacle sans aucune difficulté technique ou visuelle particulière. L’arrêt s’inscrit dans une jurisprudence constante refusant d’indemniser les victimes dont l’inattention est la cause déterminante d’un dommage survenu sur un ouvrage normal.