La Cour administrative d’appel de Nantes, par un arrêt du 21 mars 2025, statue sur la validité du refus de visa pour regroupement familial. Un ressortissant de nationalité guinéenne sollicite l’entrée en France de deux enfants mineures résidant actuellement sur le territoire de la République du Sénégal. L’administration rejette cette demande au motif que les actes de naissance produits à l’appui du dossier sont dépourvus de toute valeur probante. Saisie en premier ressort, le Tribunal administratif de Nantes prononce l’annulation de la décision de refus par un jugement rendu le 26 mai 2023. L’autorité ministérielle interjette appel en soutenant que les documents d’état civil présentent un caractère irrégulier et ne permettent pas d’établir la filiation. La question posée au juge porte sur l’appréciation de la force probante des actes étrangers au regard des exigences de la loi locale applicable. La juridiction d’appel considère que les insuffisances formelles des actes produits justifient légalement le rejet de la demande de regroupement familial par l’administration.
I. L’exigence de régularité formelle et matérielle des actes d’état civil étrangers
A. Le contrôle de la conformité aux prescriptions de la loi locale
Le juge fonde son raisonnement sur l’article 47 du code civil pour contrôler la régularité des actes d’état civil établis en pays étranger. L’administration soutient que le premier acte de naissance méconnaît les prescriptions de l’article 52 du code de la famille de la République du Sénégal. La décision mentionne que l’acte litigieux « ne comporte pas les mentions obligatoires relatives à l’âge, la profession et le domicile » des parents concernés. Cette carence formelle prive le document de sa force probante car les faits déclarés ne correspondent pas nécessairement à la réalité juridique recherchée. La loi française dispose qu’un acte fait foi sauf s’il est établi que les faits relatés « ne correspondent pas à la réalité ».
B. L’incidence des discordances matérielles sur la force probante de l’acte
Le second acte de naissance procède d’une transcription d’un jugement supplétif dont l’existence demeure contestée par les services de l’autorité ministérielle appelante. La cour relève que le requérant « ne produit pas ce jugement supplétif » malgré les demandes répétées formulées durant toute la phase de l’instruction. L’arrêt souligne également une « discordance sur la date à laquelle ce jugement aurait été rendu » entre les différentes pièces remises par le demandeur. Ces contradictions matérielles empêchent le juge administratif de former une conviction positive quant à la véracité du lien de filiation allégué par l’intéressé. Cette incertitude sur la validité des actes officiels conduit la juridiction à examiner les preuves extrinsèques fournies par le requérant.
II. L’échec des modes de preuve subsidiaires et la préservation de l’ordre public migratoire
A. L’insuffisance de la possession d’état pour suppléer l’acte déficient
La cour examine si la possession d’état peut suppléer l’absence d’actes d’état civil réguliers pour démontrer l’existence d’un lien familial véritable. Les éléments produits consistent en des photographies et des avis d’imposition mentionnant les jeunes filles comme étant des enfants mineures à sa charge. Toutefois, le juge estime que ces pièces « ne suffisent pas à établir l’identité des intéressées » dans le cadre d’une procédure de regroupement familial. Le mode de preuve subsidiaire échoue donc à pallier les graves lacunes des documents officiels présentés initialement lors de la demande de visa. L’absence d’éléments de fait probants confirme le bien-fondé des doutes émis par la commission de recours lors de sa décision initiale.
B. La proportionnalité du refus de visa face à l’absence de lien familial certain
L’absence d’identité certaine entraîne le rejet du moyen tiré de la violation du droit au respect de la vie privée et familiale protégée. La décision précise que le lien familial n’étant pas établi, la méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne ne peut être utilement invoquée. Le juge d’appel valide ainsi la position de l’administration et annule le jugement rendu précédemment par le Tribunal administratif de Nantes le 26 mai 2023. Cette solution rappelle la rigueur nécessaire au contrôle de l’authenticité des actes étrangers pour garantir la régularité des entrées sur le territoire national. La protection de l’ordre public migratoire l’emporte sur des prétentions individuelles dont la base légale et factuelle demeure gravement incertaine.