La cour administrative d’appel de Nantes a rendu, le 24 janvier 2025, un arrêt portant sur la légalité d’une décision de transfert administratif vers un État membre. Une ressortissante étrangère est entrée irrégulièrement sur le territoire national afin d’y déposer une demande de protection internationale auprès des services de l’autorité préfectorale. L’administration a toutefois ordonné son transfert vers l’État membre responsable de sa demande, en application des critères fixés par les règlements de l’Union européenne. Le tribunal administratif de Caen a rejeté le recours formé contre cet acte, ce qui a conduit l’intéressée à porter le litige devant les juges d’appel. La requérante soutient que l’autorité administrative a méconnu ses droits à l’information et au bénéfice d’un entretien individuel mené dans des conditions de confidentialité suffisantes. Elle invoque également une erreur manifeste d’appréciation quant à sa vulnérabilité psychologique, consécutive à des agressions subies durant son parcours migratoire dans l’État de destination. Le problème juridique posé réside dans l’étendue du contrôle opéré par le juge sur les garanties procédurales et sur l’application facultative de la clause de souveraineté. La cour confirme la décision attaquée en validant la remise des brochures d’information et en constatant l’absence de risques avérés pour la santé de l’intéressée. L’analyse portera sur la régularité du processus de détermination de l’État responsable puis sur le contrôle restreint exercé sur l’usage de la clause de souveraineté.
I. La confirmation de la régularité des garanties procédurales
A. Le respect de l’obligation d’information préalable
Le droit européen impose que les autorités informent le demandeur des objectifs du règlement et des critères de détermination de l’État membre responsable de l’examen de l’asile. La juridiction rappelle que « la remise par l’autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d’asile une garantie ». En l’espèce, les brochures prescrites ont été remises le jour de l’enregistrement de la demande, ce qui assure une information délivrée en temps utile à l’intéressée. La signature des documents en langue française, dont la compréhension a été déclarée par la requérante, suffit à établir le respect des exigences d’information par l’administration.
B. La présomption de régularité de l’entretien individuel
L’entretien individuel permet de s’assurer que le demandeur a compris les informations fournies et peut présenter ses observations sur sa situation personnelle auprès de l’agent. La cour précise que l’identification de l’agent par ses seules initiales ne saurait remettre en cause sa qualification pour mener un tel entretien de manière régulière. Aucun élément probant ne permet d’établir que les conditions de confidentialité requises par le droit européen auraient été méconnues par les services de l’autorité préfectorale. Le juge administratif exerce ainsi un contrôle vigilant sur le respect de ces formalités substantielles avant d’analyser le bien-fondé de la décision de transfert elle-même.
II. L’exercice strictement encadré du pouvoir discrétionnaire de l’administration
A. L’application restrictive de la clause de souveraineté
Selon le règlement européen, « chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée même si cet examen ne lui incombe pas ». L’administration dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour déroger aux critères de responsabilité, notamment lorsque des motifs humanitaires ou des circonstances exceptionnelles le justifient pleinement. Le juge considère que la détresse psychologique invoquée ne suffit pas à imposer l’examen de la demande sur le territoire national en l’absence de preuves médicales circonstanciées.
B. L’insuffisance des éléments relatifs à l’état de santé
La requérante produisait une attestation médicale postérieure à la décision contestée, se bornant principalement à relater son parcours sans apporter de constatations cliniques précises et objectives. Il n’apparaît pas que les soins nécessaires ne pourraient pas être prodigués de manière appropriée dans l’État membre initialement désigné comme responsable de l’examen d’asile. La décision ne méconnaît donc pas les stipulations relatives au respect de la vie privée ni n’est entachée d’une erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences.