Cour d’appel administrative de Nantes, le 6 juin 2025, n°23NT03138

La cour administrative d’appel de Nantes a rendu, le six juin deux mille vingt-cinq, une décision relative au refus de visa pour un enfant mineur. Une ressortissante étrangère bénéficiant de la protection subsidiaire contestait le rejet implicite de sa demande de réunification familiale par l’autorité compétente. Le tribunal administratif de Nantes avait initialement rejeté sa requête tendant à l’annulation de la décision administrative confirmant le refus de délivrance du visa. La requérante soutenait que le lien de filiation avec son fils était légalement établi par les actes d’état civil produits durant l’instance. La juridiction d’appel devait déterminer si les documents fournis possédaient une force probante suffisante malgré les doutes émis par les services de l’État. Elle annule le jugement de première instance en considérant que l’identité et le lien de filiation étaient suffisamment démontrés par les pièces versées aux débats.

**I. La consécration de la force probante des actes d’état civil étrangers**

**A. La présomption de validité résultant de la légalité formelle des actes** Les juges rappellent que les actes d’état civil faits en pays étranger font foi dès lors qu’ils sont rédigés dans les formes locales usitées. Cette règle repose sur l’article quarante-sept du code civil qui encadre strictement la contestation de la véracité des documents produits par les administrés. La cour souligne que « la force probante d’un acte d’état civil établi à l’étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d’établir que l’acte est irrégulier ». L’administration ne peut donc écarter un acte authentique sans apporter la preuve précise d’une falsification ou d’une discordance majeure avec la réalité. En l’espèce, la production d’un acte de naissance légalisé par les autorités consulaires confère au document une présomption de sincérité que le juge doit protéger.

**B. Le plein exercice du pouvoir d’appréciation souveraine du juge administratif** En cas de contestation de la valeur probante, il appartient au magistrat de former sa conviction au vu de l’ensemble des éléments produits par les parties. Cette méthode permet de dépasser le seul examen formel des actes pour analyser la cohérence globale du dossier présenté par le demandeur de visa. La juridiction refuse de s’en tenir aux seules allégations administratives pour privilégier une analyse matérielle des faits rapportés par la mère de l’enfant. Elle affirme ainsi son rôle de gardien des droits individuels face à des décisions fondées sur des doutes subjectifs ou des omissions matérielles mineures. L’examen des pièces complémentaires, comme les affidavits rédigés devant notaire, participe à la consolidation de la conviction intime des juges sur la filiation.

**II. La primauté de la réalité biologique sur les imperfections administratives**

**A. La neutralisation des imprécisions relatives à l’identité du père** L’administration relevait des contradictions concernant l’identité du père de l’enfant pour contester la validité globale des actes d’état civil présentés par la requérante. La cour écarte cet argument en notant que les nom, prénom, date et lieu de naissance de l’enfant sont reproduits sans aucune discordance notable. Elle relève que la mère a toujours « déclaré l’enfant comme son fils » dès son arrivée sur le territoire national, manifestant une possession d’état constante. Le lien maternel est jugé prépondérant par rapport aux incertitudes entourant la filiation paternelle, surtout lorsque les circonstances de la conception expliquent certaines réticences. La décision privilégie ainsi la stabilité de la relation biologique établie entre la mère et son fils depuis la naissance de ce dernier.

**B. L’exigence d’une motivation technique rigoureuse de la part de l’administration** Le représentant de l’État arguait que l’acte était tardif et dépourvu de mentions réglementaires sans toutefois préciser les dispositions du droit étranger prétendument méconnues. La cour censure ce raisonnement en soulignant que l’autorité administrative « n’explicite pas davantage les mentions qui seraient manquantes dans l’acte ni les dispositions les imposant ». Cette exigence de précision impose à l’administration de démontrer concrètement l’irrégularité alléguée au regard de la loi locale applicable au moment de la rédaction. L’annulation du refus de visa démontre que de simples suspicions ne sauraient faire échec au droit fondamental de mener une vie familiale normale. L’arrêt ordonne finalement la délivrance du titre de séjour sollicité sous un délai de deux mois pour assurer l’effectivité de la solution.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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