Par un arrêt rendu le 8 juillet 2025, la Cour administrative d’appel de Nantes rejette la demande de sursis à exécution formée par l’administration. Un ressortissant étranger, ayant obtenu le statut de réfugié en décembre 2021, a sollicité la venue de ses parents sur le territoire national. Ses parents ont déposé des demandes de visas de long séjour en novembre 2022 afin de bénéficier du mécanisme de la réunification familiale. L’autorité consulaire a opposé un refus à ces demandes en juin 2023, décision confirmée ultérieurement par la commission de recours compétente. Le Tribunal administratif de Nantes a annulé ces refus par un jugement du 4 avril 2025 et a enjoint la délivrance des visas sollicités. L’administration a interjeté appel de ce jugement et a sollicité parallèlement le sursis à son exécution devant la juridiction de second degré. L’appelant soutient que l’enfant était majeur lors de la demande de réunification, excluant ainsi l’application des dispositions protectrices du code de l’entrée. La juridiction doit déterminer si les moyens invoqués présentent un caractère sérieux permettant de suspendre les effets d’une annulation prononcée en premier ressort.
I. La rigueur du contrôle des conditions du sursis à exécution
A. La mise en œuvre des critères de l’article R. 811-15 du code de justice administrative
L’article R. 811-15 du code de justice administrative permet de suspendre l’exécution d’un jugement d’annulation si les moyens d’appel paraissent sérieux et suffisants. Cette procédure exceptionnelle déroge au caractère non suspensif de l’appel pour prévenir des situations difficilement réversibles pour l’autorité publique. En l’espèce, le président de la cinquième chambre statue en audience publique sur cette demande sans les conclusions du rapporteur public. La juridiction vérifie si l’argumentation de l’appelant est de nature à justifier l’annulation du jugement et le rejet des conclusions initiales. « En l’état de l’instruction, aucun des moyens soulevés (…) ne paraît sérieux », énonce alors la formation de jugement pour motiver son refus.
B. L’absence de caractère sérieux des moyens soulevés par l’autorité administrative
L’administration contestait le droit à la réunification familiale en invoquant la majorité de l’enfant réfugié au moment du dépôt des demandes. Elle prétendait que les conditions fixées par l’article L. 561-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers n’étaient plus remplies. Or, la Cour administrative d’appel de Nantes estime que cette argumentation ne présente pas une probabilité suffisante de succès pour fonder le sursis. Le juge des référés rejette donc les conclusions aux fins de suspension sans se prononcer définitivement sur le bien-fondé du litige principal. Cette décision souligne la difficulté pour l’État d’obtenir la paralysie d’une injonction de délivrance de visas obtenue par des proches de réfugiés.
II. Les enjeux de la réunification familiale pour les bénéficiaires d’une protection
A. Le débat sur la majorité du réfugié lors de la demande de visas
Le litige porte sur l’interprétation des règles d’éligibilité des ascendants d’un étranger protégé dont la minorité est contestée lors de la procédure. Le droit européen, complété par le droit national, prévoit des facilités de regroupement pour les mineurs non accompagnés ayant obtenu une protection. Cependant, la date de référence pour apprécier la minorité de l’enfant constitue souvent un point de friction entre l’administration et les administrés. La Cour confirme implicitement que l’annulation prononcée par les premiers juges repose sur des fondements juridiques particulièrement solides et difficilement contestables. Les magistrats protègent ainsi le droit au respect de la vie familiale en refusant de retarder l’exécution d’une mesure favorable aux requérants.
B. La préservation de l’effet utile des injonctions de délivrance de titres
Le refus de prononcer le sursis à exécution oblige l’autorité compétente à respecter le délai de deux mois pour délivrer les documents de voyage. Cette solution garantit que l’éloignement prolongé des membres de la famille ne soit pas aggravé par la seule durée de la procédure d’appel. L’autorité de la chose jugée, bien que provisoire en raison de l’appel, impose une mise en œuvre immédiate de la décision du tribunal. L’arrêt du 8 juillet 2025 illustre parfaitement la volonté du juge administratif de limiter les obstacles procéduraux au bénéfice effectif du statut de réfugié. L’État devra verser une somme au titre des frais de justice, confirmant la condamnation prononcée initialement par les juges de première instance.