La Cour administrative d’appel de Paris a rendu le 1er avril 2025 un arrêt relatif au rejet d’une candidature pour l’exploitation d’une radio. L’autorité de régulation avait lancé un appel à candidatures pour l’usage de fréquences hertziennes terrestres dans une zone géographique déterminée par sa décision initiale. Une société exploitant un service de radio thématique nationale a soumis son dossier afin d’obtenir l’autorisation de diffuser ses programmes musicaux sur cette zone. L’instance de régulation a écarté cette demande au profit d’autres candidats, motivant son choix par l’équilibre global du paysage radiophonique et l’intérêt du public.
Saisie d’un recours pour excès de pouvoir, la société requérante demandait l’annulation de cette décision et l’injonction de lui délivrer l’autorisation d’exploiter la fréquence sollicitée. Elle invoquait notamment une méconnaissance de l’impératif de pluralisme des courants d’expression socio-culturels et une erreur d’appréciation quant à l’originalité de sa programmation. Le litige porte sur la capacité du régulateur à privilégier des services généralistes ou déjà implantés lorsque le nombre de fréquences disponibles est particulièrement limité. Les juges d’appel rejettent la requête en estimant que l’autorité n’a commis ni erreur de droit ni erreur manifeste d’appréciation dans sa sélection.
L’analyse de cette décision permet d’étudier la validité du processus de sélection des candidats avant d’évaluer les critères de fond retenus pour garantir l’intérêt public.
I. La validation d’une méthode d’examen global des projets radiophoniques
A. Le respect des garanties procédurales lors de l’attribution des fréquences
L’autorité de régulation doit statuer sur l’ensemble des candidatures d’une zone lors d’une même séance afin de garantir une cohérence globale du paysage audiovisuel. La société évincée reprochait au régulateur un manque d’examen individuel des dossiers, mais les juges confirment la régularité de cette procédure administrative collégiale. L’autorité a « uniquement entendu rendre compte de ce que, comme le lui impose la loi, elle avait statué sur l’ensemble des candidatures ». Cette approche permet de comparer les mérites respectifs de chaque projet tout en s’assurant que le résultat final réponde aux besoins diversifiés des auditeurs.
B. La subordination du pluralisme thématique à la satisfaction du plus large public
Dans les zones où la ressource hertzienne est rare, le régulateur peut légalement favoriser des services susceptibles de fédérer une audience plus vaste. La programmation urbaine proposée était jugée redondante avec des services locaux déjà autorisés, ce qui justifie l’absence de gain réel pour le pluralisme local. L’autorité pouvait « retenir les candidatures de services radio dont les programmations généralistes étaient susceptibles d’intéresser un public plus large que celui intéressé par des programmations thématiques ». La cour valide ainsi une hiérarchie pragmatique entre l’originalité de niche et l’intérêt général des auditeurs privés d’une offre radiophonique complète.
II. La consolidation du paysage radiophonique par la reconnaissance de l’expérience
A. La légitimité de la prise en compte de l’antériorité des services
L’expérience acquise par un candidat sur le terrain constitue un critère légal que le régulateur peut exploiter pour minimiser les risques de mécontentement des auditeurs. L’arrêt souligne que la disparition de services implantés depuis plusieurs décennies nuirait à l’auditoire habitué à ces programmes spécifiques et à leur ancrage territorial. L’instance de régulation « n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que leur disparition serait de nature à mécontenter leur auditoire », confirmant la valeur de la stabilité. Ce critère ne saurait être le seul motif de rejet, mais il sert utilement de base pour départager des projets concurrents techniquement sérieux.
B. La préservation de l’équilibre entre réseaux nationaux et missions de proximité
L’équilibre entre les réseaux nationaux et les services de proximité demeure un impératif fondamental pour le maintien du lien social au sein des territoires. Le choix en faveur d’un service associatif assurant une mission de communication sociale de proximité l’emporte sur une offre commerciale dont la thématique est saturée. L’autorité doit veiller au « juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d’une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d’autre part ». Le juge administratif refuse d’annuler une décision qui privilégie la continuité des services d’information locale face à une spécialisation musicale déjà largement représentée.