Cour d’appel administrative de Paris, le 1 avril 2025, n°24PA00440

Par un arrêt rendu le 1er avril 2025, la Cour administrative d’appel de Paris s’est prononcée sur un litige relatif à l’attribution de fréquences radiophoniques. Un appel à candidatures avait été lancé pour l’exploitation de services de radio par voie hertzienne terrestre dans une zone géographique déterminée. Une société commerciale a sollicité une autorisation qui lui fut refusée par l’autorité de régulation au profit d’un autre opérateur concurrent. La requérante a saisi la juridiction administrative afin d’obtenir l’annulation de la décision de rejet et de celle portant attribution de la fréquence. Les moyens soulevés concernaient l’irrégularité formelle de l’acte ainsi que l’erreur manifeste d’appréciation commise lors de l’examen des projets. La cour devait déterminer si la notoriété d’un service existant peut légalement justifier le maintien d’une autorisation au détriment d’un nouveau candidat. La juridiction rejette la requête en validant l’usage du critère de l’expérience et l’analyse du pluralisme effectuée par le régulateur. L’examen de cette solution impose d’analyser la régularité du processus de sélection avant d’étudier l’appréciation souveraine de l’intérêt du public.

I. La régularité formelle de l’acte et la licéité des critères de sélection

A. La confirmation de la régularité formelle de la décision collégiale

La société requérante soutenait que la décision de rejet était entachée d’incompétence et d’un vice de forme en raison d’une signature non identifiable. Elle invoquait les dispositions prévoyant que « toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention de sa qualité ». La cour administrative d’appel de Paris relève toutefois que le refus a été décidé par le collège plénier de l’autorité de régulation. Elle précise qu’il est satisfait aux exigences légales dès lors que la décision comporte la signature du président de cette autorité. En l’espèce, le procès-verbal avait été notifié par un courrier signé par le président dont le nom et la qualité étaient clairement indiqués. Ce mode de notification permet de garantir l’identification de l’auteur de l’acte administratif sans vicier la procédure suivie.

B. La reconnaissance de l’expérience comme critère d’appréciation de l’intérêt public

La requérante critiquait également l’usage de la notoriété des services de radio comme critère d’attribution des fréquences disponibles dans la zone concernée. Elle affirmait que ce critère, non prévu par la loi, favorisait systématiquement les candidats sortants au détriment des nouvelles candidatures originales. La cour administrative d’appel de Paris considère pourtant que les dispositions législatives n’interdisent pas de « prendre en compte l’expérience des candidats dans la zone concernée ». Ce critère est jugé licite car il traduit les habitudes d’écoute des auditeurs et constitue un élément d’appréciation de l’intérêt des projets. L’autorité de régulation peut donc légalement se fonder sur les audiences réalisées pour justifier le maintien d’un service déjà implanté. Cette validation des critères de sélection permet à la juridiction d’aborder l’examen concret de l’offre éditoriale proposée par les candidats.

II. Le contrôle de l’appréciation du pluralisme et de l’intérêt du public

A. L’étroite similitude des offres éditoriales soumises au régulateur

La cour examine ensuite si le choix de l’autorité de régulation respecte l’impératif de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels. La société évincée faisait valoir une programmation originale dédiée à une discipline sportive spécifique et un traitement différent de l’actualité politique et économique. La juridiction constate cependant que les programmes des services en présence présentent des caractères généralistes très proches tournés vers l’information et le divertissement. Elle juge que la « programmation de la société requérante s’avérerait ainsi susceptible de contribuer dans une moindre mesure à l’intérêt du public ». Les juges estiment que la ligne éditoriale axée sur les territoires est déjà partiellement traitée par d’autres services autorisés dans la zone. L’absence de distinction nette entre les projets renforce le pouvoir d’appréciation du régulateur dans son choix final.

B. La préservation de l’équilibre entre diversité et habitudes d’écoute des auditeurs

Le litige portait enfin sur la préférence accordée à un opérateur traitant l’actualité sportive de manière diversifiée par rapport à un projet spécialisé. La société requérante invoquait une spécificité locale pour justifier la priorité de sa candidature centrée sur une unique discipline sportive très populaire. La cour écarte cet argument en soulignant qu’une offre sportive plus généraliste répond mieux aux attentes de l’ensemble de la population locale. Elle confirme que la « disparition de ce service serait de nature à méconnaître l’intérêt de leurs auditeurs correspondant à une large partie du public ». Le maintien d’un service bénéficiant d’une audience importante et fidèle est ainsi jugé conforme à l’objectif de satisfaction de l’intérêt général. La décision de l’autorité de régulation ne comporte aucune erreur manifeste d’appréciation au regard des besoins spécifiques de la zone géographique.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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