Cour d’appel administrative de Paris, le 13 juin 2025, n°24PA04900

La Cour administrative d’appel de Paris, le 13 juin 2025, statue sur le renouvellement d’un titre de séjour étudiant d’une ressortissante étrangère dont le cursus fut interrompu. Entrée en France en 2018, la requérante a validé avec succès deux diplômes de master avant de solliciter une nouvelle carte pour entreprendre des recherches doctorales approfondies. Toutefois, par un arrêté pris en mai 2024, l’autorité préfectorale a opposé un refus au motif qu’aucune inscription universitaire n’était justifiée pour l’année universitaire précédente. Le tribunal administratif de Paris a rejeté le recours formé contre cette décision par un jugement du 30 octobre 2024, confirmant ainsi la position de l’administration. Saisie en appel, la juridiction devait déterminer si une rupture d’inscription annuelle suffit à caractériser l’absence de sérieux d’un parcours académique par ailleurs cohérent et exemplaire. La Cour annule ces décisions, estimant que l’administration a commis une erreur d’appréciation en ne tenant pas compte de la réalité globale du cursus universitaire suivi. Cette étude permet d’analyser l’exigence d’une approche globale du sérieux des études avant d’envisager la limitation du pouvoir discrétionnaire de l’autorité administrative compétente.

I. L’exigence d’une appréciation globale du sérieux de la progression universitaire

A. Le cadre légal du contrôle de la réalité des études supérieures

Le renouvellement d’un titre de séjour est subordonné à la preuve par le ressortissant étranger qu’il continue de remplir les conditions requises pour sa délivrance initiale. Le juge rappelle qu’il appartient au préfet de « rechercher si l’intéressé peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement des études » lors de l’examen de sa demande. Cette évaluation doit impérativement porter sur le sérieux du parcours en tenant compte de « l’assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi » par l’étudiant. L’autorité administrative bénéficie d’un pouvoir d’appréciation mais elle ne peut se fonder sur un critère purement formel pour rejeter une demande de renouvellement de titre de séjour.

B. La justification légitime d’une rupture ponctuelle dans le cycle doctoral

La requérante justifiait d’un parcours universitaire marqué par l’obtention de deux diplômes de second cycle avec des mentions valorisantes au sein d’une faculté de droit française. L’absence d’inscription pour l’année 2022-2023 résultait de contraintes académiques liées à la validation de son projet de thèse par le laboratoire de recherche auquel elle était rattachée. L’intéressée occupait parallèlement un poste de collaboratrice au sein de l’université, ce qui témoignait d’un investissement réel et continu dans le monde de l’enseignement supérieur français. Cette situation particulière permet de relativiser l’interruption momentanée de l’inscription administrative formelle, justifiant ainsi une analyse plus approfondie de la volonté réelle de l’étudiante étrangère. Le constat de la cohérence du parcours mène naturellement à l’examen de la sanction juridictionnelle pesant sur l’exercice abusif du pouvoir de l’autorité administrative en la matière.

II. La sanction juridictionnelle d’une lecture formelle des conditions de séjour

A. La caractérisation de l’erreur d’appréciation face à un parcours d’excellence

La Cour administrative d’appel de Paris censure l’analyse préfectorale en estimant qu’elle a commis une erreur d’appréciation manifeste en refusant le titre de séjour sollicité par l’intéressée. En se fondant exclusivement sur une lacune administrative ponctuelle, l’administration a méconnu la réalité de l’investissement académique d’une étudiante déjà admise pour l’année universitaire suivante. Le sérieux du projet de thèse était d’ailleurs attesté par les autorités universitaires, confirmant ainsi que la recherche était engagée malgré les délais habituels de validation des sujets. Cette décision impose désormais à l’administration de privilégier une vision d’ensemble de la trajectoire académique plutôt que de se limiter à des considérations strictement temporelles ou comptables.

B. Les conséquences de l’annulation sur la sécurisation du parcours étudiant

L’annulation du refus de séjour entraîne par voie de conséquence l’annulation de l’obligation de quitter le territoire français qui menaçait la poursuite des recherches doctorales de la requérante. La juridiction d’appel enjoint donc au préfet de délivrer à l’intéressée une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant dans un délai impératif de deux mois seulement. Cette injonction assure la protection nécessaire de l’étudiante et permet la poursuite sereine de ses travaux de recherche conformément aux objectifs généraux du code de l’entrée. La solution retenue renforce ainsi la sécurité juridique des étudiants dont les parcours longs peuvent être ralentis par des procédures administratives de sélection ou de validation complexe.

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Hassan KOHEN
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