Par un arrêt rendu le 17 janvier 2025, la Cour administrative d’appel de Paris rejette la requête d’une ressortissante étrangère dirigée contre un refus de séjour. L’intéressée, entrée en France en 2014, sollicitait son admission exceptionnelle au séjour en invoquant son insertion professionnelle ainsi que sa situation de parent. L’autorité administrative lui a opposé un refus assorti d’une obligation de quitter le territoire national sans délai et d’une interdiction de retour de deux ans.
Le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande d’annulation de cet arrêté par un jugement du 18 juillet 2023 dont il est fait appel. La requérante soutient que la décision est entachée d’un défaut d’examen de sa situation personnelle et méconnaît les stipulations protectrices de la vie familiale. Elle souligne également que son parcours d’intégration et son engagement bénévole justifient la délivrance d’un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale.
Le litige soulève la question de l’étendue du pouvoir discrétionnaire de l’administration face à une demande d’admission exceptionnelle au séjour fondée sur le code de l’entrée. La Cour administrative d’appel de Paris écarte les moyens de la requérante en jugeant que son profil ne présente aucune spécificité particulière justifiant une dérogation. L’étude de la rigueur de l’appréciation des motifs d’admission au séjour permet d’éclairer l’analyse de la conciliation entre l’éloignement et les droits fondamentaux.
I. La rigueur de l’appréciation des motifs exceptionnels d’admission au séjour
A. L’insuffisance du parcours professionnel et de l’intégration bénévole
La Cour administrative d’appel de Paris rappelle que l’admission exceptionnelle au séjour impose la démonstration de considérations humanitaires ou de motifs particulièrement probants. Le juge estime que « le parcours de la requérante (…), pour méritoire qu’il soit, n’est cependant pas de nature à révéler l’existence de motifs exceptionnels ». L’exercice d’activités de préparatrice de commande ou d’agent de service est considéré comme trop commun pour fonder une mesure de régularisation dérogatoire.
L’engagement au sein d’organismes d’entraide, bien que réel, ne suffit pas à caractériser une insertion exceptionnelle propre à écarter les conditions habituelles de délivrance des titres. L’autorité administrative conserve un large pouvoir d’appréciation pour déterminer si la situation d’un étranger justifie une admission au séjour en dehors des cadres juridiques ordinaires. La solution retenue confirme que la stabilité d’une présence irrégulière ne saurait constituer, à elle seule, un motif suffisant pour contraindre l’administration à régulariser.
B. Le contrôle restreint de l’erreur manifeste d’appréciation préfectorale
Le juge administratif exerce un contrôle limité sur la décision par laquelle l’autorité administrative refuse d’user de son pouvoir de régularisation en faveur d’un étranger. La Cour administrative d’appel de Paris estime que l’administration n’a commis aucune erreur manifeste en jugeant que la situation de l’intéressée ne présentait aucune singularité. Cette position illustre la volonté de maintenir un cadre strict pour l’application des dispositions de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour.
L’absence de circonstances humanitaires est déduite de la possibilité pour la cellule familiale de se maintenir ou de se reconstituer dans le pays d’origine. Les magistrats précisent que la requérante « ne justifiant d’aucune circonstance humanitaire ou motif exceptionnel », le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation doit être écarté. Le juge se refuse à substituer sa propre appréciation à celle de l’administration lorsque les critères légaux ne sont manifestement pas remplis par le demandeur.
II. La conciliation entre la mesure d’éloignement et les droits fondamentaux
A. L’absence d’atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale
L’arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris écarte toute violation de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Les magistrats relèvent que la requérante ne fait état d’aucun obstacle insurmontable à la poursuite de sa vie familiale avec son enfant dans son pays d’origine. Le fait que le père de l’enfant réside également en situation irrégulière sur le territoire français renforce la possibilité d’une reconstruction familiale à l’étranger.
La circonstance que l’intéressée dispose d’un logement ou qu’elle ne se soit jamais fait remarquer défavorablement par les autorités ne suffit pas à paralyser l’éloignement. Le juge administratif considère que le droit au respect de la vie privée ne saurait conférer aux étrangers un droit inconditionnel au choix de leur résidence. L’atteinte n’est pas jugée disproportionnée dès lors que « la requérante ne fait valoir aucun élément de nature à faire obstacle à la poursuite de sa vie familiale ».
B. La préservation de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre de l’éloignement
La Cour administrative d’appel de Paris examine l’intérêt de l’enfant conformément aux stipulations de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant pour valider l’éloignement. Le juge écarte le grief de la requérante en notant l’absence de vie commune avec le père ou d’investissement affectif prouvé de la part de ce dernier. Il en résulte que « la décision contestée, qui n’a pas porté atteinte à l’intérêt supérieur de ce dernier, n’a pas méconnu les stipulations précitées ».
L’intérêt supérieur du mineur n’est pas lésé par un départ vers le pays dont ses parents ont la nationalité quand aucune entrave n’est formellement démontrée. La juridiction d’appel confirme que la présence d’un jeune enfant ne constitue pas un rempart automatique contre une mesure d’obligation de quitter le territoire français. L’interdiction de retour pour une durée de deux ans est maintenue au regard des critères légaux de durée et de liens personnels de l’étranger.