Cour d’appel administrative de Paris, le 17 janvier 2025, n°24PA02929

La Cour administrative d’appel de Paris, par une décision rendue le 17 janvier 2025, s’est prononcée sur la légalité d’un refus de renouvellement de titre de séjour. Un ressortissant étranger, entré sur le territoire national en 2013 et père d’un enfant français, contestait l’arrêté préfectoral l’obligeant à quitter le territoire sans délai. Le tribunal administratif de Paris avait précédemment annulé la durée de l’interdiction de retour mais rejeté le surplus des conclusions tendant à l’annulation des mesures d’éloignement. Le litige portait principalement sur la caractérisation d’une menace à l’ordre public et sur la réalité du lien entretenu par le père avec son enfant mineur. La juridiction d’appel devait déterminer si des condamnations pénales pour violences conjugales justifiaient légalement l’éviction d’un parent dont l’insertion professionnelle et familiale semblait fragile. Le juge administratif rejette l’appel en confirmant que le comportement du requérant faisait obstacle à la délivrance du titre de séjour sollicité par l’intéressé.

I. Une appréciation rigoureuse de la menace à l’ordre public

A. La prépondérance du comportement personnel et des condamnations pénales

Le juge administratif rappelle que la menace pour l’ordre public s’apprécie globalement au regard de l’ensemble des éléments de fait caractérisant le comportement de l’étranger. L’administration souligne que le requérant a fait l’objet d’une condamnation à huit mois d’emprisonnement avec sursis pour des faits de violence sur son ancienne conjointe. Ces actes, commis sur une période de plus de trois ans, constituent aux yeux de la Cour une base solide pour justifier le refus de séjour. La décision précise ainsi que l’intéressé « n’apporte aucun élément permettant d’infirmer l’appréciation portée par le préfet de police sur son comportement » habituel et récent. Les juges considèrent que la gravité des faits de violences physiques et des appels malveillants réitérés suffit à établir la menace réelle pour la sécurité publique. Cette solution confirme que la protection de l’ordre public l’emporte sur l’ancienneté du séjour lorsque l’intégrité des personnes est directement mise en cause par l’étranger.

B. L’inopérance des griefs relatifs à la consultation des fichiers de police

L’appelant invoquait une irrégularité procédurale concernant la consultation du fichier du traitement des antécédents judiciaires sans les vérifications complémentaires imposées par le code de procédure pénale. La Cour écarte ce moyen en jugeant que la carence alléguée n’est pas de nature à entacher d’illégalité la décision portant refus de titre de séjour. Elle considère en effet que « cette carence alléguée, à la supposer même avérée, n’est en tout état de cause pas, par elle-même, de nature à entacher d’irrégularité la décision ». Le juge refuse ainsi de sanctionner un éventuel vice de forme dès lors que les faits de violence sont matériellement établis par ailleurs. Cette position renforce le pouvoir d’appréciation du préfet qui peut utiliser des informations de police sans que chaque formalité technique de consultation ne devienne une cause d’annulation. La menace à l’ordre public demeure un motif de fond dont la réalité prime sur les modalités de collecte des informations par les services préfectoraux.

II. Un contrôle restreint de l’atteinte à la vie privée et familiale

A. L’exigence d’une contribution effective à l’entretien et à l’éducation de l’enfant

Pour prétendre au renouvellement de son titre de séjour en qualité de parent d’enfant français, l’étranger doit établir sa contribution effective à l’éducation du mineur. Si le requérant justifiait du versement régulier d’une pension alimentaire, la Cour estime que cette participation financière ne suffit pas à démontrer un investissement éducatif suffisant. Les juges relèvent que l’intéressé vit séparé de sa fille depuis 2018 et que les relations se limitent à un cadre médiatisé en raison d’un conflit parental majeur. La décision souligne que les pièces produites « ne suffisent ni à justifier de son investissement dans l’éducation de sa fille » ni de l’intensité réelle des liens entretenus. Le juge administratif exige donc une présence concrète et stable dans la vie de l’enfant pour paralyser une mesure d’éloignement du territoire français. La simple reconnaissance de la paternité ou le respect d’obligations pécuniaires ne sauraient compenser une absence prolongée de cohabitation ou de relations personnelles régulières et apaisées.

B. La primauté de la sécurité publique sur l’intérêt supérieur de l’enfant

Le requérant invoquait la méconnaissance de l’intérêt supérieur de l’enfant protégé par les conventions internationales afin de neutraliser l’obligation de quitter le territoire français sans délai. La Cour écarte cette argumentation en notant que la décision d’éloignement n’interdit pas formellement au père de maintenir des relations à distance ou selon les modalités fixées. Elle juge que l’arrêté n’a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale au regard des impératifs de défense de l’ordre public. Les magistrats rappellent que « l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale » mais qu’il doit être concilié avec la nécessité de prévenir les infractions pénales. En l’espèce, la gravité des violences passées sur la mère, potentiellement commises en présence de l’enfant, justifie l’éloignement malgré la présence de la fratrie en France. Le rejet de la requête confirme ainsi la validité d’une politique migratoire stricte lorsque le comportement de l’étranger menace la paix des familles et la sécurité collective.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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