La cour administrative d’appel de Paris, dans son arrêt rendu le 17 juillet 2025, se prononce sur le caractère définitif du rejet d’un crédit de taxe. Une entreprise exploitant une installation photovoltaïque a sollicité le remboursement d’un crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour l’exercice clos en l’année 2017. L’administration fiscale a rejeté cette demande initiale par une proposition de rectification notifiée en août 2019 par le constat d’une absence d’écritures comptables correspondantes. La société a présenté une nouvelle réclamation en octobre 2020 intégrant la somme litigieuse et le service a maintenu son refus constant de faire droit au remboursement. Le tribunal administratif de Paris a confirmé cette décision par un jugement du 3 octobre 2023 en retenant la tardivité de la demande présentée par l’assujetti. La question posée au juge porte sur la possibilité de renouveler une demande de remboursement rejetée définitivement et sur les exigences de la preuve comptable. La juridiction d’appel confirme l’irrecevabilité partielle de la requête et écarte le surplus pour insuffisance de justifications probantes produites par l’entreprise requérante au dossier. L’étude de cette solution conduit à analyser la nature de la décision de rejet avant d’aborder les contraintes de preuve pesant sur le contribuable assujetti.
I. La qualification juridique autonome du refus de remboursement de taxe
A. L’indépendance du rejet à l’égard de la procédure de rectification
Le juge administratif rappelle que les demandes de remboursement constituent des réclamations contentieuses soumises à un régime spécifique. Le rejet d’une telle demande, même lorsqu’il intervient durant une vérification de comptabilité, ne s’analyse pas comme une procédure de reprise de l’impôt. La cour administrative d’appel de Paris précise que cette décision « n’a pas le caractère d’une procédure de reprise ou de rectification » au sens législatif strict. L’acte administratif possède donc une existence juridique propre indépendante des rectifications fiscales éventuellement notifiées à l’issue du contrôle comptable. Cette qualification autonome emporte des conséquences déterminantes sur le régime des délais de recours applicables à la contestation ultérieure du redevable.
B. La forclusion résultant du caractère définitif de la décision administrative
L’absence de mention des voies et délais de recours dans la proposition de rectification ne permet pas au contribuable de contester indéfiniment le refus de remboursement. La jurisprudence administrative limite la possibilité de saisir le tribunal à un délai d’un an lorsque la notification de la décision s’avère irrégulière ou incomplète. La décision du 30 juillet 2019 « revêt un caractère définitif qui prive la société de la possibilité de se prévaloir d’un droit au report du crédit ». La présentation d’une nouvelle demande de remboursement ne saurait avoir pour effet de rouvrir le délai de recours expiré contre une décision de fond devenue irrévocable. Cette irrecevabilité procédurale oblige alors la juridiction à examiner le bien-fondé du reliquat de la demande pour lequel les preuves comptables font défaut.
II. L’administration de la preuve du crédit de taxe revendiqué
A. L’obligation de justification comptable pesant sur l’assujetti
Aux termes de l’article L. 177 du livre des procédures fiscales, les redevables doivent justifier du montant de la taxe déductible et du crédit de taxe revendiqué. La cour administrative d’appel de Paris souligne que la société requérante « supporte la charge de la preuve du bien-fondé de sa demande de remboursement du crédit » de taxe. Cette obligation impose au contribuable de produire des documents comptables sincères et complets permettant de retracer l’origine ainsi que la réalité des créances fiscales invoquées. L’administration fiscale peut légitimement exiger la présentation de pièces établies antérieurement à la période soumise au droit de reprise pour vérifier la validité du crédit. La simple production de factures ne suffit pas à établir le droit au remboursement si l’assujetti ne démontre pas l’inscription régulière des sommes dans sa comptabilité.
B. L’inefficacité du principe de neutralité face à l’insuffisance probatoire
L’entreprise n’a pas versé au dossier les extraits du grand-livre comptable relatifs à l’exercice au cours duquel les paiements des factures litigieuses auraient été effectués. Cette carence manifeste empêche la juridiction de s’assurer du respect des conditions de fond ouvrant droit à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée collectée. Le principe de neutralité fiscale issu du droit de l’Union européenne ne saurait dispenser le contribuable de ses obligations fondamentales en matière de preuve et de comptabilité. Le juge écarte ce moyen « dès lors que la société requérante ne justifie pas du montant du crédit de taxe sur la valeur ajoutée restant en litige » devant la cour. La rigueur de cette solution confirme que le droit au remboursement reste subordonné à la production d’une documentation probante et cohérente avec les demandes formulées.