Cour d’appel administrative de Paris, le 18 juin 2025, n°24PA04767

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu le 18 juin 2025 un arrêt relatif à la légalité d’une mesure d’éloignement. Un ressortissant étranger conteste l’obligation de quitter le territoire français et l’interdiction de retour édictées par l’autorité préfectorale compétente. L’intéressé soutient notamment que ces décisions portent une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Entré en France en 2019 à l’âge de quinze ans, le requérant n’a sollicité aucun titre de séjour lors de sa majorité. L’administration a pris à son encontre, le 11 octobre 2024, un arrêté portant obligation de quitter le territoire sans délai. Le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d’annulation par un jugement du 22 octobre 2024 dont il est fait appel. Le litige porte sur l’équilibre entre les prérogatives de police des étrangers et la protection des droits fondamentaux garantis conventionnellement. La juridiction d’appel devait déterminer si l’absence d’insertion stable et de liens familiaux établis justifie le maintien de la mesure d’éloignement. Elle confirme la décision de première instance en estimant que la situation personnelle de l’intéressé ne fait pas obstacle à son départ. L’examen de la validité de l’obligation de quitter le territoire français précédera l’analyse des conditions de légalité de l’interdiction de retour.

I. La validation de la mesure d’éloignement au regard de la vie privée

A. L’absence d’atteinte disproportionnée aux stipulations conventionnelles

La Cour rappelle que l’ingérence dans la vie privée doit être nécessaire à la sûreté publique ou à la prévention des infractions pénales. En l’espèce, le requérant se prévaut d’une présence sur le sol national depuis cinq années consécutives sans toutefois établir une insertion réelle. Les juges soulignent que l’intéressé « n’établit pas, par les pièces qu’il produit, vivre en concubinage, ni être dépourvu de liens dans son pays d’origine ». La durée du séjour ne suffit pas à caractériser une méconnaissance de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. La décision administrative préserve ainsi un juste équilibre entre les intérêts en présence sans porter d’atteinte disproportionnée aux buts poursuivis.

B. Une appréciation souveraine de la situation personnelle du requérant

Le juge administratif exerce un contrôle normal sur l’erreur manifeste d’appréciation que pourrait commettre l’autorité préfectorale lors de l’examen de la situation. Le requérant soutient vainement que son comportement ne représente aucune menace pour l’ordre public afin d’obtenir l’annulation de la mesure. La Cour écarte cet argument en précisant que « quand bien même son comportement ne constituerait-il pas une menace pour l’ordre public », la mesure demeure légale. L’absence de trouble à l’ordre public ne confère pas automatiquement un droit au séjour au profit du ressortissant étranger en situation irrégulière. La légalité de l’obligation de quitter le territoire est donc confirmée en raison du défaut d’insertion sociale et professionnelle du jeune adulte.

La validation de la mesure principale d’éloignement commande l’étude de la mesure d’interdiction de retour qui en constitue l’accessoire indispensable.

II. La régularité de l’interdiction de retour sur le territoire français

A. Une mesure accessoire suffisamment motivée en droit et en fait

L’interdiction de retour constitue une mesure complémentaire qui doit obligatoirement assortir l’obligation de quitter le territoire lorsqu’aucun délai de départ n’est accordé. Les juges vérifient scrupuleusement si l’administration a tenu compte de la durée de présence de l’étranger et de la nature de ses liens. L’arrêt précise que la décision indique le fondement juridique ainsi que la menace que représente la présence de l’intéressé sur le territoire. Elle est « suffisamment motivée au regard des exigences de l’article L. 612-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ». L’autorité préfectorale a ainsi respecté son obligation d’examen individuel de la situation avant de fixer la durée de l’interdiction.

B. L’inexistence de circonstances humanitaires faisant obstacle à l’éviction

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers prévoit que des circonstances humanitaires peuvent justifier la non-application de l’interdiction de retour. Cependant, la Cour constate que le requérant ne démontre aucun élément sérieux de nature à faire obstacle à son éloignement forcé. L’intéressé n’apporte aucune preuve d’une insertion professionnelle stable ou de charges de famille en France qui permettraient de déroger à la règle. La juridiction note qu’il « ne fait état d’aucun obstacle sérieux à son retour dans son pays d’origine où il a vécu jusqu’à l’âge de 15 ans ». Le maintien en situation irrégulière et le défaut de liens intenses en France justifient le rejet de la requête dirigée contre l’interdiction.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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