La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt rendu le 2 avril 2025, s’est prononcée sur la légalité du refus d’inscription d’un fonctionnaire territorial sur une liste d’aptitude. Un lieutenant hors classe de sapeurs-pompiers professionnels contestait son absence sur les listes de promotion au grade de capitaine établies pour l’année 2020. Le tribunal administratif de Paris avait rejeté sa demande d’annulation par un jugement du 20 juillet 2023. Le requérant invoquait notamment une erreur dans l’appréciation du ratio de promotion interne et une insuffisance de motivation des premiers juges. La juridiction d’appel devait déterminer si l’absence de recrutement externe au sein d’un établissement public local imposait légalement le refus d’inscription de l’agent sur la liste d’aptitude nationale. La Cour annule le jugement pour irrégularité mais rejette les conclusions au fond par la voie de l’évocation. Elle confirme que le nombre de promotions internes dépend strictement des nominations par concours réalisées à l’échelle de chaque service départemental.
I. L’encadrement strict de la promotion interne par la règle des quotas de recrutement
La juridiction administrative rappelle que le recrutement au grade de capitaine intervient selon des proportions définies par les statuts particuliers des cadres d’emplois territoriaux. L’article 4 du décret du 30 décembre 2016 prévoit que les nominations par promotion interne représentent seulement une fraction limitée du total des recrutements effectués. Pour qu’une inscription au choix soit juridiquement possible, l’autorité administrative doit démontrer la réalisation préalable de nominations par la voie du concours.
A. La primauté du recrutement par concours dans la détermination des capacités de promotion
Le droit de la fonction publique territoriale subordonne l’accès aux grades supérieurs par la promotion interne à l’existence de recrutements externes effectifs et préalables. La Cour précise qu’il « résulte de la combinaison des dispositions précitées que l’autorité territoriale compétente doit avoir nommé au moins quatre capitaines à la suite d’un concours ». Cette exigence textuelle vise à maintenir un équilibre statutaire entre les différents modes d’accès aux fonctions d’encadrement au sein des services d’incendie. L’inscription sur la liste d’aptitude ne constitue pas un droit automatique mais demeure tributaire de la dynamique globale des recrutements de l’année. Sans ces nominations externes, l’administration se trouve dans l’impossibilité juridique de favoriser l’avancement des agents déjà en poste par la voie du choix.
B. La localisation du ratio de recrutement à l’échelle de l’autorité territoriale
Le litige portait également sur le périmètre géographique et administratif pertinent pour calculer le volume des promotions internes autorisées pour les sapeurs-pompiers. Le requérant soutenait que le caractère national de la liste d’aptitude imposait une appréciation des mérites et des quotas à l’échelle du pays entier. La Cour écarte ce raisonnement en s’appuyant sur les dispositions claires de l’article 31 du décret du 5 juillet 2013 relatif au recrutement. Elle juge que le nombre de recrutements par concours ouvrant droit à une promotion est « déterminé en fonction des recrutements opérés dans ces mêmes collectivité ou établissement ». Cette territorialisation du quota garantit la cohérence de la gestion des ressources humaines au sein de chaque service d’incendie et de secours.
II. L’inéluctabilité du refus d’inscription résultant d’une situation de compétence liée
L’absence de recrutements par concours au sein du service employeur place l’autorité administrative dans une situation juridique où son pouvoir d’appréciation se trouve totalement supprimé. La Cour administrative d’appel de Paris souligne que l’administration est alors tenue de rejeter toute demande d’inscription au choix formulée par les agents. Cette configuration particulière influe directement sur la recevabilité des moyens de légalité externe soulevés par le requérant durant l’instance contentieuse.
A. L’inopérance des moyens de légalité externe face à l’obligation de refuser l’inscription
Lorsque l’autorité administrative est en situation de compétence liée, les vices de procédure ou d’incompétence invoqués par le demandeur ne peuvent entraîner l’annulation de l’acte. Le juge constate que l’absence de recrutement par concours « faisait ainsi obstacle à toute promotion interne et, partant à l’inscription au choix de l’intéressé ». Dès lors que les conditions de fond ne sont pas remplies, l’administration n’avait pas d’autre solution légale que de refuser la demande d’inscription. Les moyens relatifs à l’incompétence du signataire ou à l’absence de consultation de la commission administrative paritaire deviennent ainsi inopérants pour contester la décision. Cette solution classique du contentieux administratif privilégie la légalité substantielle de la décision sur les éventuelles irrégularités formelles n’ayant pu influencer le sens du refus.
B. Le défaut d’intérêt à agir contre l’économie globale des listes d’aptitude
La Cour examine enfin la recevabilité des conclusions tendant à l’annulation totale des listes d’aptitude ministérielles pour l’année considérée. Elle relève que le refus opposé au requérant ne résulte pas d’une comparaison de ses mérites avec ceux des autres candidats inscrits. Son éviction repose exclusivement sur l’impossibilité juridique d’inscrire tout agent de son service d’origine en raison du ratio de promotion non atteint. En conséquence, l’annulation des inscriptions d’autres fonctionnaires n’aurait aucune incidence favorable sur sa propre situation administrative ou sur ses chances de promotion. Le requérant n’a donc pas un « intérêt personnel, direct et certain à obtenir l’annulation de ces listes » dans leur globalité. Le juge administratif limite ainsi le contrôle juridictionnel aux seuls actes dont l’annulation est susceptible de procurer un bénéfice concret au demandeur.