Cour d’appel administrative de Paris, le 2 avril 2025, n°24PA00029

La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt rendu le 2 avril 2025, se prononce sur le contentieux de la carrière d’un agent stagiaire. L’intéressée, recrutée initialement sous contrat puis nommée stagiaire, contestait les refus de titularisation, de congé de longue durée et de protection fonctionnelle opposés par son employeur. Elle sollicitait également l’indemnisation de divers préjudices résultant d’un harcèlement moral allégué et d’un accident de service non reconnu par l’administration. Le tribunal administratif de Montreuil, le 31 octobre 2023, avait rejeté l’ensemble de ses prétentions indemnitaires ainsi que ses conclusions en annulation des décisions implicites de rejet. La juridiction d’appel devait alors déterminer si l’absence de formation obligatoire faisait obstacle à la titularisation et si les faits invoqués caractérisaient une faute administrative. Les magistrats constatent d’abord un non-lieu à statuer partiel avant de rejeter le surplus des conclusions de la requérante en raison d’une insuffisance probante.

I. L’affirmation de la légalité des refus administratifs opposés à l’agent

A. La subordination impérative de la titularisation au suivi de la formation d’intégration

La juridiction administrative souligne que la titularisation d’un agent stagiaire n’est pas un droit mais reste soumise au respect de conditions réglementaires strictes. Selon l’article 10 du décret du 22 décembre 2006, « les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés (…) au vu notamment d’une attestation de suivi de la formation d’intégration ». Le juge constate que la requérante n’a pas suivi cette formation obligatoire après sa nomination en qualité d’adjoint technique territorial principal de deuxième classe stagiaire. La collectivité territoriale se trouvait donc en situation de compétence liée pour refuser la titularisation de l’agent n’ayant pas satisfait à ses obligations statutaires. Cette solution illustre la rigueur du cadre juridique régissant l’accès définitif aux fonctions publiques territoriales au terme de la période probatoire du stage.

B. L’absence de présomption de harcèlement moral malgré une dégradation alléguée du climat professionnel

L’arrêt précise les modalités d’application de l’article L. 133-2 du code général de la fonction publique relatif à la protection contre les agissements répétés de harcèlement. La Cour administrative d’appel de Paris rappelle qu’il appartient à l’agent de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence de tels agissements. En l’espèce, si l’intéressée décrivait des relations tendues avec ses collègues, les magistrats considèrent que l’administration n’est pas restée inerte face à cette situation délétère. « La requérante n’apporte par ailleurs aucun commencement de preuve à l’appui de la situation de harcèlement qu’elle aurait subie » au sein de son établissement d’affectation. Le cumul de décisions administratives défavorables ne suffit pas à caractériser une intention malveillante ou une dégradation délibérée des conditions de travail de l’agent.

II. Une application rigoureuse des principes de la responsabilité administrative

A. Une appréciation restrictive des conditions de reconnaissance de l’accident de service

Les juges confirment le rejet de la demande de reconnaissance d’accident de service pour un événement survenu le 15 novembre 2018 sur le lieu de travail. Un tel accident suppose un événement soudain et violent provoquant une lésion, survenu par le fait ou à l’occasion du service, sans faute personnelle. La requérante ne produit cependant aucun témoignage ou attestation susceptible de corroborer la réalité et l’intensité de l’incident invoqué lors de sa prise de poste. Le certificat médical fourni, s’il mentionne un épisode dépressif, ne permet pas d’établir un lien direct et certain avec un événement précis du service. La Cour administrative d’appel de Paris maintient ainsi une exigence probatoire élevée pour l’imputabilité au service des pathologies psychiques survenant dans un contexte professionnel conflictuel.

B. La neutralisation des conséquences indemnitaires des vices de forme sans préjudice financier établi

La décision de la juridiction d’appel apporte des précisions importantes sur le lien de causalité nécessaire entre l’illégalité d’un acte et le droit à réparation. Bien qu’un titre exécutoire ait été annulé pour un vice de légalité externe par le tribunal administratif de Montreuil, cela n’ouvre pas droit à indemnisation. L’irrégularité formelle d’un acte ne saurait justifier la réparation d’un préjudice moral si la créance de l’administration reste fondée sur le plan du droit substantiel. La Cour rejette également les conclusions relatives au défaut de rémunération car les salaires ont été versés rétroactivement après le placement en congé de longue maladie. Les juges concluent enfin à l’absence de faute de l’autorité territoriale, confirmant ainsi le bien-fondé du jugement de première instance rendu par les premiers juges.

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Hassan KOHEN
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