Cour d’appel administrative de Paris, le 22 janvier 2025, n°24PA03151

La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt du 22 janvier 2025, se prononce sur la légalité d’un refus de titre de séjour fondé sur l’ordre public. Une ressortissante étrangère, entrée sur le territoire national en 2013, sollicite son admission exceptionnelle au séjour après une longue présence ininterrompue en France. L’autorité préfectorale rejette sa demande en janvier 2023, invoquant une condamnation pénale pour participation à une association de malfaiteurs et trafic de stupéfiants. Le tribunal administratif de Melun confirme cette décision par un jugement du 21 juin 2024, dont l’intéressée interjette appel devant la juridiction parisienne. La requérante soutient notamment que les faits sanctionnés sont anciens et que sa situation familiale actuelle s’oppose à son éloignement du territoire français. La question posée au juge d’appel consiste à déterminer si une menace à l’ordre public demeure caractérisée malgré l’ancienneté des faits criminels commis. La Cour répond par l’affirmative en soulignant que la gravité intrinsèque des infractions justifie légalement l’atteinte portée à la situation administrative de l’intéressée. Il convient d’étudier la persistance de la menace à l’ordre public avant d’analyser la conciliation opérée par le juge avec le respect des droits fondamentaux.

I. La persistance de la menace à l’ordre public malgré l’ancienneté des faits

A. La caractérisation souveraine de la menace par l’administration

L’article L. 432-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile fonde le refus de titre de séjour sur la menace. Le juge de l’excès de pouvoir doit « rechercher si les faits qu’elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision ». Cette appréciation s’effectue « au regard de l’ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant le comportement personnel de l’étranger en cause ». L’existence de condamnations pénales constitue un élément d’appréciation fondamental, sans être toutefois la condition exclusive du refus opposé par l’autorité administrative compétente.

B. L’indifférence relative de l’absence de réitération criminelle

La requérante a été condamnée en 2020 pour des faits de trafic de stupéfiants et d’association de malfaiteurs commis durant l’année 2013. La Cour considère que « compte tenu de la nature et de la gravité de ces faits », la décision préfectorale n’est pas entachée d’erreur d’appréciation. L’ancienneté de l’infraction et l’absence de réitération des faits délicitueux ne suffisent pas à neutraliser la menace actuelle que représente la présence de l’intéressée. Le juge administratif privilégie ici la protection de la sûreté publique sur le temps écoulé depuis la commission des actes criminels initialement reprochés à la requérante.

II. La conciliation rigoureuse entre impératifs de sécurité et droits fondamentaux

A. L’appréciation restrictive de l’intensité de la vie privée et familiale

Le respect de la vie privée et familiale, garanti par l’article 8 de la convention européenne, fait l’objet d’un examen proportionné par la juridiction. L’intéressée, entrée en France à quarante-six ans, conserve des attaches dans son pays d’origine où elle pourrait légalement reconstituer sa cellule familiale avec son fils. Son insertion professionnelle reste jugée insuffisante car ses bulletins de salaire ne couvrent qu’une période limitée et sa situation ne présente pas de stabilité. L’ingérence dans ses droits fondamentaux est ainsi considérée comme nécessaire à la défense de l’ordre public dans une société démocratique confrontée à la criminalité organisée.

B. La protection limitée de l’intérêt supérieur de l’enfant

L’intérêt supérieur de l’enfant, protégé par la convention internationale, doit être une considération primordiale dans toutes les décisions administratives concernant les mineurs résidant sur le territoire. Deux des enfants étant majeurs, ils ne peuvent plus se prévaloir de cette protection spécifique pour contester la légalité du refus de séjour de leur mère. Concernant le fils mineur, la décision « n’a ni pour objet ni pour effet de le séparer de sa mère », car le départ vers le Brésil demeure possible. La Cour administrative d’appel de Paris rejette donc l’ensemble des griefs, confirmant ainsi la primauté des impératifs de sécurité nationale sur les liens familiaux allégués.

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Hassan KOHEN
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