La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt rendu le 23 septembre 2025, se prononce sur la légalité d’un refus d’autorisation d’émettre. L’autorité de régulation a rejeté la candidature d’une société souhaitant exploiter un service de radio de catégorie B sur l’allotissement de Saint-Brieuc. Le litige porte principalement sur l’application des critères de sélection définis par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
À la suite d’un appel aux candidatures lancé en juillet 2022, une société a sollicité l’exploitation d’un service radio en mode numérique terrestre. La décision de rejet est intervenue en juillet 2024, entraînant un recours en annulation devant la juridiction administrative pour excès de pouvoir. La requérante invoque une motivation insuffisante de l’acte ainsi qu’une méconnaissance des impératifs de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socioculturels.
La juridiction devait déterminer si l’absence d’originalité d’un programme et l’inexistence d’un ancrage local spécifique justifient légalement l’éviction d’un candidat au profit de tiers. La Cour administrative d’appel de Paris rejette la requête en validant l’appréciation portée sur l’intérêt du projet pour le public de la zone.
**I. La régularité formelle de la procédure d’éviction du candidat à l’exploitation radiophonique**
**A. L’exigence de précision du moyen tiré de l’insuffisance de motivation**
La société requérante soutenait initialement que la décision de refus prise par l’autorité de régulation manquait de motifs clairs et suffisants pour être contestée. Aux termes de l’article 32 de la loi du 30 septembre 1986, les refus d’autorisation doivent être impérativement motivés par l’administration compétente. Toutefois, la Cour estime que le moyen n’est pas « assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé » dans les écritures de la société.
Les juges relèvent que la candidate n’indique pas en quoi les documents de synthèse ne lui permettaient pas de comprendre les raisons de son éviction. Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence constante exigeant une démonstration précise de l’impossibilité de discuter utilement les motifs de la décision administrative. Le procès-verbal de la réunion du collège plénier contenait des éléments d’explication que la requérante a pu exploiter lors de l’instance juridictionnelle.
**B. La validité de l’instruction préparatoire menée par le comité territorial**
L’instruction des dossiers de candidature repose sur l’intervention des comités techniques territoriaux qui assurent l’examen préalable des demandes d’autorisations audiovisuelles en région. La société prétendait que son dossier n’avait pas fait l’objet d’une instruction régulière et d’un avis conforme de la part du comité compétent. La Cour administrative d’appel de Paris écarte ce grief en s’appuyant sur les pièces du dossier attestant de la réalité du travail instructeur.
Il ressort du procès-verbal du comité territorial de Rennes qu’une note de synthèse a été rédigée par un rapporteur pour chaque dossier présenté. Le comité a effectivement émis des propositions de présélection en indiquant les motifs de ses choix avant de les transmettre à l’autorité de régulation nationale. La circonstance que ces documents préparatoires ne soient pas mentionnés dans le corps de la décision finale demeure « sans incidence sur la légalité de celle-ci ».
**II. L’appréciation souveraine de l’intérêt public au regard du pluralisme socioculturel**
**A. La recherche d’une diversification effective de l’offre musicale et thématique**
Le juge administratif exerce un contrôle sur l’appréciation faite par l’autorité de régulation concernant l’intérêt de chaque projet pour le public de la zone concernée. La loi impose de veiller à la « sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels » ainsi qu’à la diversification des opérateurs sur un territoire donné. En l’espèce, le programme proposé présentait une identité musicale déjà largement représentée par les services de radio autorisés dans la zone géographique.
La Cour souligne que la programmation musicale du candidat ne proposait pas de « genres musicaux inédits ou moins diffusés » par rapport à la concurrence existante. L’offre de titres originaux ne suffit pas à établir un intérêt supérieur pour le public si le cœur de cible est déjà servi. L’autorité de régulation peut donc légalement préférer des candidats dont les projets complètent de façon plus satisfaisante l’offre radiophonique déjà disponible localement.
**B. La sanction de l’absence de programme d’intérêt local spécifique à la zone**
Le critère du contenu des programmes parlés s’avère déterminant lorsque l’autorité de régulation doit départager plusieurs candidats pour un même allotissement de fréquences numériques. La requérante ne proposait dans son dossier « aucun programme d’intérêt local spécifique à la zone de Saint-Brieuc » mais seulement une syndication de programmes préexistants. Cette absence d’ancrage territorial contrastait fortement avec les projets des candidats retenus qui offraient tous des décrochages ou des informations locales dédiés.
La décision de rejet se trouve également confortée par des incertitudes techniques relatives à la durée totale des programmes mentionnée dans le dossier de candidature. La société affichait des durées de diffusion supérieures à vingt-quatre heures, ce qui jetait un doute sur la viabilité et la précision du service. En considérant que l’offre était moins susceptible de répondre à l’impératif de pluralisme, l’autorité n’a commis aucune erreur de droit ni d’appréciation.