Cour d’appel administrative de Paris, le 26 septembre 2025, n°23PA05209

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu, le 26 septembre 2025, une décision relative à l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des paris sportifs. Un opérateur de jeux d’argent en ligne sollicitait la restitution de la taxe acquittée entre les années 2017 et 2020 pour un montant important. Le litige porte sur l’articulation entre l’exonération générale des jeux de hasard et la taxation des rémunérations perçues par les organisateurs. L’administration fiscale a rejeté les réclamations tendant au remboursement de sommes versées au titre de l’activité de paris à cote fixe. Le tribunal administratif de Paris a confirmé cette position par un jugement rendu le 17 octobre 2023. La requérante soutient que son activité ne constitue pas une prestation de services effectuée à titre onéreux faute de rémunération individualisable. Elle invoque également une méconnaissance de la directive européenne du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. La juridiction doit déterminer si le profit réalisé par un organisateur de paris sportifs constitue une rémunération taxable malgré l’aléa propre au contrat. La cour rejette la requête en estimant que l’activité d’organisation constitue bien une prestation de services onéreuse au sens de la loi fiscale. Elle précise que les bénéfices des organisateurs restent soumis à la taxe malgré le principe d’exonération applicable aux enjeux des parieurs.

**I. L’affirmation du caractère onéreux de la prestation d’organisation des paris**

**A. L’existence d’une prestation de services individualisable**

La cour souligne qu’une prestation n’est assujettie à la taxe que s’il existe un lien direct entre le service et la valeur reçue. Elle rappelle que parieurs et organisateurs « s’engagent réciproquement » à verser les mises et à mettre à disposition les outils nécessaires aux paris. Cette relation contractuelle caractérise un rapport juridique où des prestations réciproques sont échangées entre les parties au contrat de jeu. L’activité d’organisation de paris sportifs constitue ainsi une prestation de services nettement individualisable au sens du code général des impôts. La mise à disposition d’une plateforme et la gestion des risques liés aux pronostics forment le cœur de cet engagement synallagmatique.

**B. La détermination d’une contrepartie financière effective**

Les juges considèrent que les sommes restant à la disposition de l’organisateur constituent la contrepartie effective du service de gestion rendu. Ils précisent que les opérateurs déterminent la cote afin de bénéficier d’un « bénéfice raisonnablement prévisible et déterminable » sur le long terme. Bien que l’aléa soit inhérent au pari, le principe même de l’existence d’un profit ne peut être sérieusement contesté par l’opérateur. Les sommes issues des mises, déduction faite des gains versés aux joueurs, forment la rémunération taxable de l’assujetti à la taxe. L’absence de commission préalable n’empêche pas l’existence d’un lien direct entre le service fourni et l’avantage économique finalement obtenu.

**II. La conciliation entre exonération des jeux et taxation des rémunérations**

**A. L’interprétation stricte de la marge d’exploitation imposable**

L’article 261 E du code général des impôts exonère le produit de l’exploitation des paris mais taxe expressément les rémunérations perçues. La juridiction définit la rémunération comme le résultat obtenu en « soustrayant des produits de l’exploitation les gains versés aux joueurs ». Elle rejette l’argument selon lequel la totalité du profit réalisé devrait être intégralement exonérée au titre de l’activité de jeu. L’organisateur assume une fonction distincte de celle du parieur et ne peut se prévaloir d’une confusion des rôles pour échapper à l’impôt. Cette distinction garantit que la consommation du service d’organisation reste soumise à la fiscalité indirecte conformément aux principes du droit fiscal.

**B. La conformité du régime national aux exigences du droit de l’Union**

La directive européenne laisse une « large marge d’appréciation » aux États membres pour fixer les limites de l’exonération des jeux d’argent. La cour estime que la taxation des bénéfices des organisateurs ne vide pas de sa substance le principe d’exonération posé par l’Union. Le législateur national respecte le principe de neutralité fiscale en ne taxant que la valeur ajoutée réelle créée par l’entreprise d’organisation. L’absence de saisine de la Cour de justice de l’Union européenne confirme la clarté de l’interprétation retenue par les juges d’appel. Cette solution assure la pérennité du modèle de taxation des opérateurs de jeux en ligne tout en protégeant les ressources fiscales.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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