Cour d’appel administrative de Paris, le 26 septembre 2025, n°24PA01397

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu, le 26 septembre 2025, un arrêt relatif aux conséquences financières de la résiliation d’une concession de service public. Un syndicat mixte avait conclu une convention pour la gestion d’un service de véhicules électriques dont le défaut d’intérêt économique fut notifié par le délégataire. Le concédant refusa de verser la compensation financière prévue, entraînant ainsi la résiliation automatique du contrat de délégation conformément aux stipulations contractuelles initiales. Suite à cette rupture, le comité syndical a fixé des contributions financières à la charge des collectivités membres pour couvrir le fonctionnement et des provisions.

Une commune membre a contesté ces délibérations budgétaires ainsi que les titres de recettes afférents devant la juridiction administrative pour obtenir leur annulation. Par un jugement du 6 février 2024, le tribunal administratif de Paris fit droit à sa demande en annulant partiellement la délibération et les titres de recettes. Les premiers juges estimaient que la clause contractuelle organisant la résiliation était entachée de nullité car elle conférait un pouvoir excessif au concessionnaire privé. Le syndicat mixte a alors interjeté appel de cette décision pour obtenir le rétablissement de la validité de ses actes budgétaires et de ses créances. La Cour administrative d’appel de Paris devait déterminer si le financement des conséquences contentieuses d’un service public supprimé peut légalement être mis à la charge des communes membres.

I. La restauration de la validité contractuelle et le maintien de la compétence syndicale

A. L’interprétation souveraine des clauses de résiliation pour défaut d’intérêt économique

La Cour de céans infirme le raisonnement du tribunal administratif concernant la validité de l’article soixante-trois du contrat de concession liant les parties. Les stipulations prévoyaient que si le concédant ne souhaitait pas verser les compensations, « la Concession sera résiliée à cette date, et le régime d’indemnisation s’appliquera ». Le juge d’appel estime que cette rédaction n’accorde pas au concessionnaire un pouvoir de résiliation unilatérale en cas de méconnaissance des obligations par la puissance publique. Le mécanisme contractuel offre en réalité au concédant un choix alternatif entre la poursuite déficitaire de l’exploitation ou la rupture anticipée des relations contractuelles. La résiliation résulte donc de la décision souveraine du syndicat mixte de ne pas assumer le versement d’une compensation financière pour maintenir le service. L’arrêt écarte ainsi le grief tiré de la nullité de la clause, rétablissant la pleine efficacité du cadre juridique nécessaire à l’indemnisation du délégataire.

B. La mutation de la compétence syndicale vers la gestion des suites contractuelles

Le juge administratif précise la portée de la compétence exercée par le syndicat mixte après la cessation effective de l’activité opérationnelle de voitures électriques. Les statuts révisés mentionnent que la compétence obligatoire n’a plus pour objet l’exploitation du service mais « la gestion des conséquences nées de la fin de ce service ». Cette mission englobe désormais les relations potentiellement contentieuses avec l’ancien partenaire privé ainsi que le règlement définitif des comptes entre les membres adhérents. La Cour considère que l’activité résiduelle ne présente plus le caractère d’un service public industriel et commercial soumis à l’obligation d’équilibre par les seules recettes. Par conséquent, les restrictions posées par le code général des collectivités territoriales concernant la prise en charge des déficits d’exploitation par le budget général deviennent inopérantes. Le financement des dettes nées de la résiliation peut légalement reposer sur les contributions obligatoires versées par les collectivités locales membres de l’agence.

II. La validation du financement des provisions et de la régularité des titres de recettes

A. Le bien-fondé de la constitution d’une provision pour risque contentieux avéré

L’arrêt valide la délibération budgétaire imposant une contribution destinée à alimenter une provision financière importante pour faire face aux réclamations du concessionnaire évincé. Le juge relève qu’un « risque financier avéré existait en raison de la demande d’indemnisation » de plus de deux cents millions d’euros introduite par la société. La constitution d’une provision constitue une dépense obligatoire pour les établissements publics dès l’apparition d’un litige susceptible d’entraîner une charge financière pour la collectivité. Cette mesure de prudence comptable n’est pas constitutive d’une libéralité interdite puisque les fonds ont vocation à être restitués si le risque ne se réalise pas. La Cour souligne que la commune membre ne démontre aucune faute de gouvernance du syndicat qui serait la cause directe et exclusive de ce préjudice financier. Le financement partagé de la provision pour risques est donc jugé conforme aux principes de la comptabilité publique et aux nécessités de la gestion syndicale.

B. L’exigence de clarté des bases de liquidation des titres de recettes

La Cour administrative d’appel de Paris rejette les moyens relatifs à l’insuffisante motivation des titres de recettes émis à l’encontre de la commune requérante. Les avis mentionnent explicitement les délibérations budgétaires de référence qui fixent le montant de la contribution annuelle par station ouverte au moment de la résiliation. Le libellé des titres a permis à l’ordonnateur de faire comprendre à la collectivité débitrice les modalités précises de calcul de la somme globale réclamée. La commune ne pouvait ignorer le nombre de stations implantées sur son territoire, ce qui rendait le calcul de la créance parfaitement transparent et vérifiable. Le juge d’appel considère que les exigences du décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ont été respectées lors de l’émission des titres. La décharge de l’obligation de payer prononcée en première instance est annulée, confirmant ainsi le bien-fondé des créances détenues par l’agence métropolitaine de mobilité.

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Hassan KOHEN
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