Cour d’appel administrative de Paris, le 28 août 2025, n°24PA00327

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu, le 28 août 2025, une décision relative au refus de séjour et à l’éloignement d’un ressortissant algérien. L’arrêt traite de l’articulation entre le parcours d’intégration d’un ancien mineur isolé et le maintien de l’ordre public face à des comportements délictueux.

Le requérant est entré sur le territoire national en septembre 2019 avant d’être confié à l’aide sociale à l’enfance jusqu’à sa majorité. Il a obtenu un certificat d’aptitude professionnelle en juillet 2023 tout en bénéficiant d’un contrat de jeune majeur pour poursuivre son insertion sociale. Toutefois, l’intéressé a commis plusieurs infractions pénales, notamment des vols aggravés et des faits de violence, ayant entraîné une condamnation à de l’emprisonnement ferme. L’autorité administrative a rejeté sa demande de titre de séjour le 23 juin 2023 en assortissant cette décision d’une interdiction de retour de trois ans.

Le tribunal administratif de Paris a partiellement annulé cet arrêté le 22 décembre 2023 en raison d’une erreur d’appréciation concernant la durée de l’interdiction. L’administration a interjeté appel de ce jugement tandis que l’intéressé a formé un appel incident pour contester la légalité du refus de séjour. La juridiction d’appel devait déterminer si l’insertion professionnelle d’un ancien mineur confié à l’aide sociale pouvait neutraliser une menace caractérisée à l’ordre public.

La Cour administrative d’appel de Paris annule le jugement de première instance et valide l’intégralité des décisions administratives prises à l’encontre du ressortissant étranger. Les juges considèrent que la gravité des faits de récidive justifie légalement une mesure d’éloignement assortie d’une interdiction de retour fixée à sa durée maximale. L’arrêt confirme également l’inapplicabilité des dispositions générales du code de l’entrée et du séjour des étrangers aux ressortissants algériens en raison de l’accord bilatéral.

I. L’encadrement conventionnel strict du droit au séjour des ressortissants algériens

A. L’exclusion des dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers

La Cour rappelle avec fermeté que les stipulations de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 « régissent d’une manière complète » les conditions d’admission au séjour. Cette exclusivité conventionnelle fait obstacle à ce qu’un ressortissant de cet État puisse se prévaloir des dispositions de l’article L. 435-3 du code précité. L’intéressé ne peut donc pas invoquer utilement le régime spécifique applicable aux étrangers confiés aux services de l’aide sociale à l’enfance durant leur minorité. Le juge administratif réaffirme ici la primauté du droit conventionnel sur le droit commun pour cette catégorie particulière de ressortissants étrangers présents sur le territoire. Cette interprétation stricte limite les fondements juridiques disponibles pour solliciter une régularisation de plein droit en dehors des cadres prévus par l’accord bilatéral.

B. La préservation du pouvoir discrétionnaire de l’autorité préfectorale

Si l’accord franco-algérien ne prévoit pas de modalités d’admission exceptionnelle, il « n’interdit pas au préfet de délivrer un certificat de résidence » à titre gracieux. L’administration dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier l’opportunité d’une régularisation en tenant compte de l’ensemble des éléments de la situation personnelle du demandeur. Le juge de l’excès de pouvoir se borne alors à vérifier que l’autorité administrative n’a pas commis d’erreur manifeste dans l’exercice de sa compétence. En l’espèce, les efforts d’insertion professionnelle par l’obtention d’un diplôme ne suffisent pas à rendre la décision de refus manifestement erronée. La Cour valide ainsi la méthode d’examen globale de la situation de l’intéressé par l’autorité préfectorale avant toute prise de décision.

II. La proportionnalité de l’interdiction de retour face à la menace à l’ordre public

A. Une appréciation souveraine des antécédents pénaux du requérant

L’obligation de quitter le territoire français repose sur la constatation de faits délictueux multiples commis par l’intéressé entre octobre 2020 et décembre 2021. La Cour souligne que le requérant est « connu défavorablement des services de police » pour des vols avec violence et des faits de recel. Ces agissements, commis pour certains en état de récidive, caractérisent une menace réelle et actuelle pour l’ordre public au sens des dispositions législatives. Le juge administratif estime que le comportement de l’étranger justifie l’absence de délai de départ volontaire pour assurer l’exécution rapide de la mesure. L’insertion scolaire et professionnelle, bien que réelle, ne permet pas d’atténuer la gravité des troubles causés à la sécurité publique par l’intéressé.

B. La légitimité de la durée maximale de l’interdiction de retour

La juridiction d’appel infirme le raisonnement des premiers juges concernant la durée de l’interdiction de retour fixée à trois ans par l’autorité administrative. La Cour considère que le préfet n’a pas méconnu l’article L. 612-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers au regard des faits. L’intéressé avait déjà fait l’objet d’une précédente mesure d’éloignement assortie d’une interdiction de deux ans qui n’avait pas suffi à prévenir la réitération. « Au regard de sa condamnation pour des faits commis en récidive », la décision fixant la durée maximale de l’interdiction apparaît proportionnée aux enjeux de sécurité. L’absence d’attaches familiales particulières en France renforce la légalité de cette mesure qui ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie privée.

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Hassan KOHEN
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