La Cour administrative d’appel de Paris, par une décision du 29 août 2025, statue sur l’exécution d’un précédent arrêt ordonnant une enquête de représentativité. Une organisation syndicale avait obtenu l’annulation du refus de l’administration de diligenter cette enquête destinée à mesurer son influence dans un champ professionnel spécifique. L’autorité administrative n’ayant pas mené la procédure à son terme, le syndicat a saisi le juge sur le fondement de l’article L. 911-4 du code de justice administrative. La juridiction doit déterminer si les obstacles techniques invoqués par l’administration constituent un motif légitime pour ne pas finaliser l’enquête de représentativité sollicitée. La Cour administrative d’appel de Paris juge que l’administration doit utiliser des critères alternatifs pour déterminer la représentativité des syndicats malgré l’absence de résultats électoraux exploitables.
I. L’impératif d’une exécution matérielle complète de l’injonction juridictionnelle
A. La caractérisation d’une exécution administrative lacunaire et infructueuse
L’administration prétendait avoir exécuté l’injonction issue de l’arrêt du 13 avril 2023 en entamant des recherches auprès des entreprises concernées par le champ conventionnel. Elle invoquait toutefois l’impossibilité d’isoler les suffrages des praticiens par rapport aux autres salariés, affirmant que le secret du vote interdisait une telle identification. Le juge de l’exécution rejette cette argumentation en soulignant que « l’administration n’a pas pris toutes les mesures propres à assurer l’exécution de l’arrêt du 13 avril 2023 ». L’enquête ne saurait se limiter à un simple constat de carence technique dès lors que l’objectif demeure la détermination de la liste des syndicats représentatifs. Une exécution purement formelle ne permet pas de satisfaire à l’autorité de la chose jugée attachée aux décisions rendues par les juridictions administratives.
B. Le rappel de la mission contraignante du juge de l’exécution
Le juge administratif dispose du pouvoir de définir les mesures nécessaires lorsque le jugement dont l’exécution est demandée n’a pas précisé les modalités d’action. En l’espèce, la Cour administrative d’appel de Paris utilise ses prérogatives pour encadrer strictement la nouvelle injonction qu’elle adresse à l’autorité administrative compétente. Elle rappelle que l’enquête de représentativité a pour « seul objet de déterminer, parmi les syndicats intervenant dans le champ de cette convention, ceux qui peuvent être regardés comme représentatifs ». Cette mission s’impose à l’administration sans qu’elle puisse se retrancher derrière les difficultés pratiques rencontrées lors de la première phase de l’instruction du dossier. Le juge fixe donc un nouveau délai de six mois pour que l’autorité administrative parvienne enfin à une conclusion effective et juridiquement exploitable.
II. L’adaptation des critères légaux pour assurer la représentativité syndicale
A. L’éviction du critère de l’audience électorale en cas d’impossibilité technique
La réforme de la représentativité syndicale place normalement le critère de l’audience électorale au centre de l’évaluation du poids des organisations dans les négociations collectives. Cependant, la Cour administrative d’appel de Paris souligne ici que cette règle générale doit s’effacer devant la nécessité de garantir l’exercice effectif des droits syndicaux. L’impossibilité matérielle de mesurer l’audience dans un champ restreint ne doit pas paralyser la désignation des organisations habilitées à négocier les conditions de travail des agents. Le juge précise ainsi que l’injonction vise précisément à « pallier l’impossibilité pour l’administration d’édicter un arrêté fixant la liste des organisations représentatives » sur le fondement de l’audience. La solution retenue privilégie l’effectivité du dialogue social sur la rigueur mathématique des résultats issus des urnes lorsque ceux-ci sont indisponibles.
B. La prééminence des critères de l’activité et du nombre d’adhérents
L’enquête de représentativité diligentée sur le fondement de l’article L. 2121-2 du code du travail doit se fonder sur une appréciation globale de la situation syndicale. La Cour impose à l’administration de se prononcer « sur la base des justificatifs produits par l’organisation requérante et par les autres organisations affirmant être représentatives dans ce champ ». Ces éléments incluent obligatoirement les données relatives à l’activité syndicale réelle, aux effectifs des adhérents ainsi qu’au montant global des cotisations régulièrement perçues par les structures. Cette méthode permet de rétablir une mesure de l’influence syndicale là où les instruments classiques de la démocratie sociale se révèlent inadaptés ou simplement défaillants. L’arrêt garantit donc la reprise des négociations collectives en ordonnant l’utilisation de ces critères subsidiaires pour fonder légalement la représentativité des organisations concernées.