La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt du 29 avril 2025, examine la légalité d’une obligation de quitter le territoire français. Un ressortissant étranger a été interpellé sans titre de séjour, entraînant une mesure d’éloignement immédiate assortie d’une interdiction de retour d’un an. L’administration a fondé son arrêté sur une prétendue entrée irrégulière, en dépit de la présentation d’un visa de court séjour dont la validité était expirée.
L’intéressé a saisi le Tribunal administratif de Montreuil afin d’obtenir l’annulation de l’arrêté préfectoral pris le 10 juin 2024 par l’autorité départementale. Les premiers juges ont rejeté sa demande par un jugement du 24 juillet 2024, ce qui a provoqué l’appel devant la juridiction supérieure. Le requérant soutient que l’acte est entaché d’incompétence et d’une erreur manifeste d’appréciation concernant sa situation administrative et sa stabilité résidentielle.
La juridiction doit déterminer si l’erreur commise sur le fondement légal de l’obligation de quitter le territoire français vicie nécessairement la décision attaquée. La Cour rejette l’appel en procédant à une substitution de base légale tout en validant le motif suffisant justifiant le refus de délai. L’analyse de cette solution impose d’étudier la substitution de base légale opérée (I) ainsi que le maintien du refus de délai de départ (II).
I. La validation de la mesure d’éloignement par la substitution de base légale
A. Le constat d’une erreur de qualification juridique des faits
Le préfet a initialement retenu que l’étranger ne pouvait pas justifier d’une entrée régulière sur le territoire français lors de son interpellation. En effet, cette appréciation contredisait les pièces du dossier démontrant que l’intéressé était entré sous couvert d’un visa de court séjour. La Cour relève que « la décision en litige ne pouvait être prise sur le fondement des dispositions du 1° de l’article L. 611-1 ». L’erreur de qualification juridique des faits commise par l’administration imposait donc une rectification pour maintenir la validité de la mesure d’éloignement.
B. L’usage régulier du pouvoir de substitution par le juge de l’excès de pouvoir
Le juge de l’excès de pouvoir peut substituer un fondement légal à un autre si l’administration dispose d’un pouvoir d’appréciation identique. Toutefois, cette opération est possible uniquement sous réserve que l’intéressé ait disposé des garanties procédurales assorties à l’application du nouveau texte. La Cour administrative d’appel de Paris constate que « cette substitution de base légale n’a pour effet de priver l’intéressé d’aucune garantie ». Le maintien irrégulier sur le territoire après l’expiration d’un visa permettait ainsi de fonder légalement l’obligation de quitter le territoire français.
II. Le maintien du refus de délai de départ fondé sur un motif déterminant
A. La neutralisation des motifs erronés au profit de la stabilité résidentielle
Le refus d’octroi d’un délai de départ volontaire reposait initialement sur trois motifs, dont deux se sont révélés matériellement inexacts. L’administration invoquait faussement l’absence de documents d’identité alors que l’intéressé possédait un passeport en cours de validité lors du contrôle. Cependant, le juge administratif considère que le défaut de résidence effective et permanente constitue un motif suffisant pour justifier ce refus. L’étranger « a déclaré être hébergé depuis son arrivée en France chez un ami à Paris dont il ignorait l’adresse » précise l’arrêt.
B. Une interprétation stricte des garanties de représentation de l’étranger
La solution rendue confirme que « le préfet aurait pris la même décision s’il n’avait retenu que le motif tiré du défaut de résidence ». Ainsi, le juge valide l’efficacité de l’action publique en neutralisant les motifs erronés au profit d’un fondement de fait légal et suffisant. Cette décision souligne l’exigence de garanties de représentation sérieuses pour les ressortissants étrangers faisant l’objet d’une mesure d’éloignement du territoire. Le rejet de la requête d’appel scelle la légalité de l’arrêté malgré les approximations factuelles initiales de l’autorité préfectorale du département.