Par un arrêt rendu le 3 juillet 2025, la Cour administrative d’appel de Paris s’est prononcée sur la légalité d’une obligation de quitter le territoire français. Un ressortissant étranger, entré sur le sol national en 2015, contestait les mesures d’éloignement et d’interdiction de retour prises à son encontre. L’intéressé invoquait principalement les risques encourus dans son pays d’origine et l’atteinte portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
Saisi en première instance, le Tribunal administratif de Paris avait rejeté sa demande par un jugement en date du 5 décembre 2024. Le requérant a alors formé un appel devant la juridiction supérieure pour obtenir l’annulation de cet acte administratif et du jugement initial. Il soutenait que son renvoi vers l’Afghanistan l’exposait à des persécutions directes de la part des autorités locales actuellement au pouvoir.
La question posée aux juges consistait à déterminer si les éléments produits suffisaient à caractériser une violation des stipulations de la Convention européenne des droits de l’homme. La Cour administrative d’appel de Paris rejette la requête en soulignant la carence probatoire du demandeur concernant la réalité de ses craintes personnelles. Elle estime également que la décision administrative ne porte pas d’atteinte disproportionnée à la situation personnelle de l’étranger au regard des buts poursuivis.
L’examen de cette décision porte sur la démonstration des risques de traitements inhumains puis sur la proportionnalité de l’atteinte à la vie privée.
I. La rigueur probatoire de l’existence de risques de traitements inhumains
L’examen de la légalité interne de la décision d’éloignement impose de vérifier la réalité des risques de traitements inhumains allégués par le ressortissant étranger. Cette analyse repose sur la valeur probante des pièces fournies par le demandeur et sur les constatations opérées par les instances spécialisées.
A. L’insuffisance des preuves personnelles produites par le requérant
Le juge administratif rappelle que la protection contre les traitements inhumains ou dégradants suppose la démonstration de risques actuels, personnels et réels. Dans cet arrêt, le requérant se bornait à produire des attestations émanant de ses parents et de lui-même pour justifier ses craintes. La Cour juge souverainement qu’ « en se bornant à produire des attestations de ses parents et de lui-même, l’intéressé n’établit pas la réalité des risques allégués ».
Cette exigence de preuve matérielle objective est constante dans le contentieux de l’éloignement pour garantir la sécurité juridique des décisions de l’autorité préfectorale. Les simples déclarations non étayées par des documents probants ne permettent pas de renverser la présomption de légalité de la mesure d’éloignement attaquée. La juridiction administrative maintient ainsi un standard élevé pour accorder le bénéfice de la protection conventionnelle prévue par les textes internationaux.
B. La confirmation de l’absence de menace par les instances spécialisées
La Cour administrative d’appel de Paris appuie son raisonnement sur les décisions antérieures rendues par les autorités compétentes en matière de droit d’asile. Elle relève que la demande de protection a été rejetée successivement par l’organisme instructeur puis par la juridiction nationale chargée du contentieux des réfugiés. Ces refus successifs constituent des indices sérieux quant à l’absence de menaces caractérisées pesant sur la vie ou la liberté du demandeur.
Le rejet d’une demande de réexamen pour irrecevabilité achève de fragiliser les prétentions de l’étranger qui tente de contester la validité de son éloignement. Les juges considèrent que la demande d’asile a été écartée après un examen approfondi de la situation géopolitique et personnelle de l’intéressé. Cette coordination entre les ordres juridiques assure une cohérence nécessaire dans l’application des règles relatives au séjour des étrangers.
Au-delà de la question des risques encourus en cas de retour, la juridiction administrative doit également apprécier l’impact de l’éloignement sur la vie privée. Cette seconde étape du contrôle juridictionnel porte sur la proportionnalité de l’atteinte portée aux liens personnels et familiaux tissés sur le territoire.
II. Le contrôle de la proportionnalité de l’atteinte à la vie privée et familiale
La mesure d’éloignement doit respecter un équilibre entre le maintien de l’ordre public et le droit au respect de la vie privée et familiale. Ce contrôle implique une évaluation concrète de l’intensité des liens affectifs et du degré d’insertion sociale et professionnelle du ressortissant étranger.
A. L’absence de démonstration de liens personnels et familiaux stables
L’invocation du droit au respect de la vie privée exige la preuve d’une insertion durable et de liens familiaux effectifs sur le sol français. Le requérant faisait valoir une relation sentimentale ainsi que des liens avec des enfants sans toutefois apporter de justificatifs probants de leur réalité. La Cour constate que l’intéressé est hébergé par un tiers, ce qui contredit l’existence d’une vie commune stable avec la personne désignée.
La décision précise que le demandeur n’apporte « aucun élément permettant d’établir la réalité de la relation qu’il invoque » pour contester la mesure administrative. L’absence d’autonomie résidentielle et le manque de preuves matérielles concernant l’intensité des liens affectifs font obstacle à la reconnaissance d’une atteinte conventionnelle. Le juge administratif exerce ici un contrôle restreint mais vigilant sur la matérialité des faits présentés par l’étranger pour justifier son maintien.
B. La préservation de l’équilibre entre mesure d’éloignement et insertion sociale
L’appréciation de l’insertion professionnelle au moment de la signature de l’arrêté contesté demeure un critère déterminant pour évaluer la légalité de l’éloignement. Le requérant ne justifiait d’aucune activité salariée effective, se contentant de produire un projet de contrat de travail postérieur à la date de la décision. La Cour estime donc que l’administration n’a pas méconnu les stipulations relatives au droit à une vie privée et familiale normale.
La persistance d’attaches fortes dans le pays d’origine, où l’intéressé a vécu l’essentiel de son existence, justifie la mesure de retour forcée. Les magistrats concluent que la décision litigieuse « n’a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée » au regard des objectifs poursuivis. Cette solution confirme la primauté de l’ordre public sur des projets d’insertion encore incertains ou tardivement documentés par les requérants.