Cour d’appel administrative de Paris, le 30 avril 2025, n°24PA03561

Par un arrêt rendu le 30 avril 2025, la Cour administrative d’appel de Paris s’est prononcée sur la légalité d’un refus de renouvellement de titre de séjour. Un ressortissant étranger, résidant sur le territoire depuis de nombreuses années, a vu sa demande rejetée par l’administration en raison de son comportement passé. Après un premier jugement défavorable rendu par le tribunal administratif de Paris le 10 juillet 2024, l’intéressé a saisi la juridiction d’appel pour contester cette décision. Il invoquait notamment une méconnaissance du principe du contradictoire ainsi qu’une erreur d’appréciation quant à la menace qu’il représenterait pour la sécurité publique. La question posée au juge consistait à déterminer si des faits de violence ancienne justifiaient légalement l’éviction d’un étranger pourtant inséré professionnellement. La Cour confirme la solution des premiers juges en écartant les griefs relatifs à la régularité de la procédure et au bien-fondé de l’acte administratif.

I. La régularité de l’instruction et la caractérisation de la menace à l’ordre public

A. Le respect limité du principe du contradictoire en première instance

Le requérant soutenait que le tribunal administratif aurait dû rouvrir l’instruction suite au dépôt tardif d’un mémoire en réplique contenant des éléments nouveaux. Les juges parisiens rappellent que si le juge peut rouvrir l’instruction, il n’y est tenu que si la production contient une circonstance de droit nouvelle. Or, la juridiction relève que le mémoire litigieux se bornait à reprendre une argumentation déjà connue et que les pièces jointes étaient disponibles antérieurement. Le juge d’appel affirme ainsi qu’ « en s’abstenant de communiquer ce mémoire, le tribunal administratif de Paris n’a pas méconnu le principe du contradictoire de la procédure ». Cette approche rigoureuse préserve l’efficacité de la procédure contentieuse tout en encadrant strictement les obligations de communication incombant aux magistrats lors de l’audience.

B. La qualification juridique souveraine du comportement personnel du ressortissant

Sur le fond, l’administration opposait au demandeur une condamnation pénale pour des faits de violences avec usage d’une arme commis quelques années auparavant. La Cour administrative d’appel précise que « la menace pour l’ordre public s’apprécie au regard de l’ensemble des éléments caractérisant le comportement personnel du ressortissant ». Elle souligne que l’existence de condamnations n’est ni nécessaire ni suffisante, mais constitue un élément d’appréciation parmi d’autres critères de gravité. En l’espèce, la nature des faits reprochés justifiait la décision de refus malgré l’absence de réitération récente constatée par les magistrats du siège. Le juge administratif exerce ici un contrôle entier sur la qualification des faits, validant la sévérité de l’autorité de police face aux infractions commises.

II. La conciliation entre sécurité publique et respect de la vie privée et familiale

A. L’insuffisance de l’insertion professionnelle face aux nécessités de la sûreté

L’étranger invoquait également une insertion professionnelle solide ainsi qu’une présence continue sur le territoire national depuis près de trente ans pour obtenir son titre. Les magistrats considèrent néanmoins que ces éléments ne suffisent pas à contrebalancer le trouble causé à l’ordre public par le comportement violent du demandeur. Ils notent que la situation de l’appelant a fait l’objet d’un examen sérieux incluant l’ensemble des pièces produites lors de la demande de renouvellement. L’arrêt écarte le moyen tiré du défaut d’examen particulier de la situation personnelle en s’appuyant sur les mentions précises contenues dans l’arrêté contesté. La primauté accordée à la protection de l’ordre public limite ici la portée des garanties offertes par l’intégration économique et sociale du ressortissant étranger.

B. La prégnance des attaches familiales conservées dans le pays d’origine

Enfin, la Cour examine la compatibilité de la mesure d’éloignement avec les stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Bien que l’intéressé vive en France depuis 1995, le juge relève l’absence de liens familiaux ou amicaux significatifs établis sur le sol français. La décision souligne que l’épouse et les cinq enfants du demandeur résident toujours dans son pays d’origine, où il a vécu jusqu’à l’âge adulte. En conséquence, l’administration n’a pas porté « une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale » au sens du texte conventionnel. Cette solution confirme une jurisprudence privilégiant les attaches familiales effectives sur la simple durée de présence géographique pour l’application de la protection internationale.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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