Cour d’appel administrative de Paris, le 30 décembre 2024, n°23PA03978

La Cour administrative d’appel de Paris, le 30 décembre 2024, a statué sur l’assujettissement d’une société à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Cette entité assure la gestion de son propre portefeuille de valeurs mobilières et conteste la nature professionnelle de ses opérations de placement habituelles.

La société requérante a sollicité la restitution des impositions de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises acquittées au titre des années 2017, 2018 et 2019. Le tribunal administratif de Montreuil, par un jugement du 6 juillet 2023, a rejeté sa demande initiale tendant à la décharge des impositions litigieuses.

La requérante soutient que son activité de gestion de portefeuille, dépourvue de moyens humains propres, ne constitue pas une activité professionnelle soumise à la taxe foncière. L’administration fiscale considère au contraire que la régularité des cessions de titres et l’utilisation de moyens matériels mis à disposition caractérisent une exploitation imposable.

Le problème de droit consiste à savoir si une société de gestion de titres dépourvue de personnel propre exerce une activité professionnelle lorsqu’elle bénéficie de moyens conventionnels. Il convient alors de déterminer si une stratégie d’investissement intégrée à un groupe économique permet d’écarter la qualification de simple gestion patrimoniale privée.

La Cour administrative d’appel de Paris rejette la requête en retenant l’existence d’une activité professionnelle caractérisée par la mise en œuvre de moyens matériels et intellectuels. Elle souligne que l’utilisation d’une convention de gestion et de locaux partagés suffit à établir la réalité d’une profession non salariée au sens du code général des impôts.

I. La caractérisation souveraine d’une activité professionnelle taxable

A. La prééminence des critères de régularité et d’intention de rendement

Le juge administratif rappelle que la cotisation foncière des entreprises est due par les personnes morales qui exercent « à titre habituel une activité professionnelle non salariée ». La qualification professionnelle dépend ici de la fréquence des opérations et de l’inscription des investissements dans une politique globale de rentabilité financière définie par l’associé.

La Cour relève que la société a procédé à de nombreuses souscriptions et cessions de parts dans des fonds spéculatifs extérieurs au cours des exercices en litige. Elle précise que les titres détenus « s’inscrivent dans le cadre de la politique générale d’investissement » du groupe et sont acquis pour en retirer une rentabilité satisfaisante.

B. La reconnaissance de l’existence de moyens matériels et intellectuels

L’assujettissement à l’imposition suppose également que le contribuable dispose de moyens effectifs pour réaliser son objet social, même si ces derniers ne sont pas salariés. L’instruction démontre que la société requérante a « conclu le 27 juillet 2015 avec la société prestataire une convention de gestion des investissements » pour assurer son activité.

Cette convention porte sur la mise en œuvre d’une stratégie de gestion du risque de change et sur le suivi juridique et administratif de la structure mandante. Les moyens humains nécessaires à l’activité de placement sont ainsi mis à la disposition de la requérante par l’intermédiaire de son groupe d’appartenance économique.

II. L’exclusion de la qualification de simple gestion patrimoniale passive

A. L’efficience juridique de la gestion externalisée par convention

La requérante invoquait vainement l’absence de personnel propre pour revendiquer le bénéfice d’une gestion patrimoniale purement passive et non soumise à la cotisation sur la valeur ajoutée. La Cour juge toutefois que l’activité a été « réalisée grâce aux moyens humains et matériels mis à la disposition de la société » par le contrat de prestation.

Le partage des locaux du siège social et le versement d’honoraires de gestion confirment l’existence d’une structure organisée pour la réalisation de profits financiers réguliers. L’absence d’agrément réglementaire pour la gestion pour compte de tiers est sans influence sur la qualification fiscale d’une activité exercée pour son propre compte.

B. La confirmation d’une interprétation stricte de la notion de gestion privée

La décision consacre une conception large de l’activité professionnelle, laquelle englobe les structures de détention de titres dès lors qu’elles s’insèrent dans un cycle commercial organisé. Le juge refuse d’assimiler cette gestion à celle d’un particulier, en raison de la nature des instruments financiers utilisés et de la complexité des opérations.

L’imposition est ainsi maintenue car les conditions tenant à la « régularité et aux moyens matériels et intellectuels mis en œuvre » sont de nature à caractériser une profession. Cette solution renforce la sécurité juridique des prélèvements locaux en rattachant l’imposition à la réalité économique de l’exploitation plutôt qu’à la seule présence de salariés.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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