Cour d’appel administrative de Paris, le 30 décembre 2024, n°24PA01428

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu le 30 décembre 2024 une décision relative à l’assiette de la taxe sur les salaires. Un organisme bancaire mutualiste a fait l’objet d’une vérification de comptabilité entraînant des rappels de taxe au titre de l’année 2018. L’administration fiscale a considéré que les rémunérations versées au directeur général devaient être soumises à ce prélèvement obligatoire. Le tribunal administratif de Montreuil ayant rejeté la demande de décharge le 23 janvier 2024, la requérante a alors saisi la juridiction d’appel. Elle soutient que son dirigeant n’entre pas dans le champ de la taxe, faute d’affiliation obligatoire au régime général de sécurité sociale. La question posée aux juges porte sur l’assujettissement des mandataires sociaux à la taxe sur les salaires suite aux réformes législatives récentes. La juridiction rejette la requête en estimant que l’activité exercée commande l’imposition, indépendamment du régime de sécurité sociale spécifique de l’intéressé. L’arrêt souligne d’abord l’alignement de l’assiette de la taxe sur celle de la contribution sociale généralisée avant d’en préciser la portée cohérente.

I. L’alignement de l’assiette de la taxe sur les salaires sur celle de la contribution sociale généralisée

La Cour analyse successivement les deux périodes de l’année 2018 en distinguant l’inclusion initiale des mandataires puis la confirmation sous le nouveau régime.

A. L’inclusion des mandataires sociaux dans le champ d’application initial de la taxe

Pour la période allant de janvier à août 2018, la Cour se fonde sur les dispositions combinées des articles L. 136-2 et L. 311-2. Les revenus visés sont ceux des personnes travaillant « à quelque titre que ce soit pour un employeur, notamment comme mandataire social ». Cette définition englobe les fonctions de direction, même si le dirigeant ne dispose pas d’un contrat de travail de droit privé classique. Le juge précise que « le régime de sécurité sociale auquel ces personnes sont affiliées étant à cet égard sans incidence » sur l’imposition fiscale. La volonté du législateur était de rendre l’assiette de la taxe sur les salaires identique à celle de la contribution sociale généralisée.

B. La confirmation de l’assujettissement sous l’empire du nouveau régime législatif

À compter du 1er septembre 2018, la loi a modifié les critères de référence en renvoyant directement à l’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale. La requérante prétendait que son directeur général n’était pas à la charge d’un régime obligatoire d’assurance maladie au sens de ce texte. Toutefois, la Cour relève que l’intéressé exerce « une activité pour le compte d’un ou de plusieurs employeurs » sur le territoire national. Cette situation entraîne une affiliation automatique à un régime obligatoire de sécurité sociale en application de l’article L. 111-2-2 du même code. Les rémunérations perçues en fin d’année entrent donc nécessairement dans le champ de la contribution sociale et de la taxe sur les salaires. Cette démonstration technique permet d’apprécier la valeur et la portée d’une solution garantissant la cohérence globale du système de prélèvement.

II. Une interprétation téléologique assurant la cohérence du système de prélèvement fiscal

Le raisonnement des juges privilégie l’exercice effectif de l’activité professionnelle sur les modalités techniques d’affiliation pour définir l’assiette de l’imposition.

A. La primauté de l’exercice d’une activité professionnelle sur les modalités d’affiliation

La valeur de cette décision réside dans l’affirmation du lien indéfectible entre l’activité professionnelle réelle et l’obligation fiscale de l’organisme employeur. Le juge administratif refuse de se laisser enfermer dans une lecture restrictive des catégories de salariés ou des régimes d’assurance maladie spécifiques. Il privilégie une approche fonctionnelle de la notion de travailleur pour le compte d’autrui, incluant expressément les mandataires sociaux de haut niveau. Cette interprétation évite que des rémunérations importantes échappent à la taxe sur les salaires par le simple jeu des modalités particulières d’affiliation. La cohérence du système fiscal est ainsi préservée contre une tentative d’optimisation fondée sur des distinctions techniques entre les divers régimes.

B. La portée d’une solution garantissant l’étanchéité des assiettes sociales et fiscales

La portée de l’arrêt s’étend à l’ensemble des organismes mutualistes employant des dirigeants dont le statut social peut paraître hybride ou dérogatoire. En confirmant l’imposition, la Cour administrative d’appel de Paris consolide la jurisprudence relative à l’unification des assiettes sociales et fiscales des revenus. Les entreprises doivent désormais intégrer la rémunération de tous leurs mandataires dans le calcul de la taxe, quel que soit leur régime d’affiliation. Cette solution écarte tout doute sur l’application des réformes successives relatives au financement de la protection sociale et à la fiscalité associée. Elle assure enfin une égalité de traitement entre les employeurs du secteur privé et ceux relevant du secteur agricole ou mutualiste.

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Hassan KOHEN
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