Cour d’appel administrative de Paris, le 31 janvier 2025, n°23PA04314

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu le 31 janvier 2025 une décision relative au droit au séjour d’un étranger malade. Un ressortissant étranger, entré sur le territoire national en 2020, a subi un accident vasculaire cérébral entraînant de lourdes séquelles physiques et neurologiques. L’intéressé a sollicité la délivrance d’un titre de séjour pour raisons de santé deux années après son arrivée en France. L’autorité administrative a opposé un refus à cette demande par un arrêté daté du 3 octobre 2022. Ce refus s’accompagnait d’une obligation de quitter le territoire français fixant le pays de destination. Le tribunal administratif de Paris a rejeté le recours formé contre cet acte par un jugement du 9 mars 2023. Le requérant soutient en appel que son état de santé interdit son retour vers son pays d’origine. Il invoque notamment une impossibilité d’accès effectif aux soins médicaux pour des motifs financiers. La juridiction doit déterminer si l’absence de ressources financières suffit à invalider un avis médical constatant l’existence de soins appropriés. La Cour administrative d’appel rejette la requête en estimant que le demandeur n’établit pas une impossibilité matérielle de prise en charge. L’analyse portera sur la confirmation de la disponibilité de l’offre de soins avant d’envisager la rigueur de la preuve concernant l’accès effectif aux traitements.

I. La disponibilité théorique des soins dans le pays d’origine

A. La valeur probante de l’avis du collège de médecins

L’autorité administrative fonde sa décision sur les conclusions techniques du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Le collège de médecins mentionne que « si l’état de santé de l’intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité », un traitement existe. Les juges parisiens valident cette appréciation en relevant que l’offre de soins et les caractéristiques du système de santé permettent une prise en charge appropriée. La juridiction s’appuie sur la présomption de conformité de l’avis médical aux réalités sanitaires locales. Le requérant ne conteste d’ailleurs pas directement la disponibilité technique des molécules ou des infrastructures dans son pays de naissance. Cette absence de contestation sérieuse de l’offre de soins renforce la position de l’administration.

B. L’appréciation de la compatibilité de l’état de santé avec le voyage

Le juge administratif vérifie si le transfert de l’étranger vers son pays d’origine est compatible avec son état pathologique actuel. L’avis médical précise que « son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d’origine ». Cette mention écarte le risque d’une aggravation immédiate liée au transport ou au dépaysement. La Cour refuse de remettre en cause cette évaluation médicale faute d’éléments cliniques contraires produits par le justiciable. Elle exerce un contrôle restreint sur l’adéquation entre l’avis de l’office et la mesure d’éloignement. La solution retenue confirme que la gravité de la pathologie ne fait pas obstacle de plein droit au départ forcé. L’examen des conditions matérielles de vie au pays devient alors l’unique moyen de contester l’efficacité du système de santé.

II. L’exigence d’une preuve matérielle de l’impossibilité d’accès aux soins

A. Le rejet des arguments fondés sur la situation financière

Le requérant invoque son incapacité à financer son traitement pour démontrer une méconnaissance des dispositions protectrices du code de l’entrée et du séjour. Le juge écarte cet argument en soulignant que l’intéressé « se borne à faire valoir qu’il ne pourra pas accéder effectivement aux médicaments ». La juridiction exige des éléments chiffrés et probants concernant le coût réel de la prise en charge thérapeutique. Elle relève également l’absence de renseignements précis sur la situation financière de la famille restée sur place. « Il n’établit pas que sa famille ne serait pas en mesure de l’aider financièrement » durant son retour. Le simple constat d’une absence de ressources personnelles ne suffit pas à caractériser une rupture de soins. Cette exigence probatoire témoigne d’une volonté de limiter l’exception de précarité économique.

B. La validation de la mesure d’éloignement consécutive

La légalité du refus de séjour entraîne logiquement le rejet des moyens dirigés contre la mesure d’éloignement forcé. L’administration n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la vie de l’étranger. La Cour note que l’épouse du requérant réside toujours dans le pays d’origine, ce qui facilite sa réinsertion sociale. L’argumentation portant sur l’illégalité par voie de conséquence de l’obligation de quitter le territoire français est donc écartée. La décision confirme ainsi une jurisprudence constante privilégiant la continuité de l’unité familiale dans le pays de destination. Les conclusions aux fins d’injonction et de frais irrépétibles subissent le même sort par voie de dépendance. Le droit au séjour pour raisons médicales demeure subordonné à la démonstration d’une carence matérielle insurmontable.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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