Cour d’appel administrative de Paris, le 7 mai 2025, n°23PA01134

La cour administrative d’appel de Paris a rendu le 7 mai 2025 un arrêt relatif aux obligations d’indemnisation incombant à l’État. La société requérante contestait l’indexation partielle de la taxe d’aménagement du territoire sur l’inflation décidée par le législateur national. Elle estimait que cette modification fiscale portait atteinte à l’équilibre financier de son contrat de concession autoroutière.

La société concessionnaire a sollicité la condamnation de l’État à l’indemniser des préjudices financiers résultant de la majoration de cette taxe annuelle. Le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande par un jugement rendu le 13 janvier 2023. La requérante a interjeté appel devant la juridiction supérieure pour obtenir l’annulation de cette première décision.

La juridiction devait déterminer si l’augmentation législative d’une taxe spécifique ouvre un droit automatique à compensation pour le concessionnaire privé. La cour administrative d’appel de Paris rejette la requête en estimant que la compensation exige la preuve d’une dégradation de l’équilibre financier. L’analyse portera d’abord sur l’absence de droit à compensation directe avant d’étudier la nécessité de démontrer une rupture de l’équilibre économique.

I. L’absence de droit à une compensation automatique issue des textes

A. L’interprétation restrictive des dispositions législatives de garantie

La cour écarte d’abord le moyen tiré de la méconnaissance de la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. Elle juge que ces dispositions « n’ont ni pour objet ni pour effet d’instaurer un droit à compensation directe et systématique de toute augmentation ». Le juge refuse ainsi de voir dans la loi de 1995 un automatisme indemnitaire lié à toute hausse de la fiscalité autoroutière. L’indexation partielle de la taxe sur l’inflation ne constitue pas une méconnaissance fautive des engagements législatifs de l’autorité publique.

B. L’inefficacité des stipulations contractuelles de stabilité sans préjudice démontré

La société invoquait également les stipulations du cahier des charges et un protocole d’accord signé avec l’État en avril 2015. L’article 32 prévoit que les parties se rapprochent pour examiner si une modification fiscale dégrade l’équilibre économique du contrat. Toutefois, ces engagements contractuels « ne reconnaissent pas à la société requérante un droit à indemnisation dont elle pourrait se prévaloir indépendamment » des textes. Le juge souligne que les mesures de compensation ne revêtent pas exclusivement une forme financière pour rétablir la situation initiale. Cette absence de droit automatique conduit logiquement le juge à exiger une démonstration concrète de l’impact financier subi par l’entreprise.

II. L’exigence de preuve d’une rupture de l’équilibre économique du contrat

A. La distinction nécessaire entre baisse de rentabilité et dégradation de l’équilibre

La requérante se bornait à calculer la charge supplémentaire résultant de l’indexation de la taxe sur son propre résultat net. Or, la cour précise que la modification fiscale « ne peut être appréciée indépendamment de l’importance des différents aléas » pris en considération. La simple réduction du profit ne suffit pas à caractériser une dégradation de l’équilibre financier destiné à assurer l’amortissement des investissements. L’entreprise n’établit pas que la majoration fiscale rend l’exécution de la concession excessivement onéreuse ou économiquement insupportable.

B. La confirmation de la portée limitée de la sécurité juridique contractuelle

Enfin, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique est écarté par les magistrats parisiens. Le juge administratif estime que la société « n’avait aucun droit » à la réparation intégrale des conséquences de la modification législative. L’absence de pratique administrative constante créant des attentes légitimes interdit de conclure à un manquement au devoir de loyauté contractuelle. Cette solution confirme la primauté du pouvoir souverain de l’État sur les intérêts purement financiers des opérateurs économiques privés.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture