Par un arrêt rendu le 20 février 2025, la cour administrative d’appel de Toulouse apporte des précisions majeures sur le régime fiscal des entreprises de transport. Une société spécialisée dans l’affrètement et l’organisation de transports routiers contestait des suppléments d’impôt sur les sociétés consécutifs à la remise en cause d’une exonération. Le litige portait sur l’application du plafond des aides de minimis prévu par le règlement européen du 18 décembre 2013 en faveur des zones de revitalisation rurale. Le tribunal administratif de Nîmes avait rejeté la demande de décharge le 17 février 2023 en considérant que le plafond de cent mille euros était dépassé. La requérante soutenait qu’en sa qualité de commissionnaire, elle n’exécutait pas matériellement le transport et devait donc bénéficier du plafond général de deux cent mille euros. Le problème juridique résidait dans l’interprétation de la notion d’entreprise active dans le transport de marchandises par route pour compte d’autrui au sens du droit européen. La cour administrative d’appel de Toulouse confirme la position des premiers juges en intégrant les commissionnaires dans le champ d’application du plafond de l’aide restreinte.
I. L’assimilation des commissionnaires de transport aux entreprises actives du secteur routier
A. Une interprétation large de la notion d’entreprise active dans le transport La cour administrative d’appel de Toulouse fonde son raisonnement sur une lecture globale des dispositions du règlement européen relatif aux aides de minimis. Elle souligne que le texte « ne vise pas seulement les transporteurs eux-mêmes mais l’ensemble des entreprises uniques actives dans le transport de marchandises ». Cette approche extensive permet d’englober tous les acteurs économiques dont l’activité principale concourt directement à la réalisation d’une prestation de transport routier. Les juges considèrent que cette notion doit s’entendre comme couvrant l’intégralité du secteur sans se limiter aux seuls exécutants matériels de la prestation.
B. L’indifférence de l’absence de moyens matériels d’exécution propre L’argumentation de la société reposait sur l’absence d’une flotte de véhicules et sur la nature administrative des missions d’organisation et d’affrètement confiées au commissionnaire. La juridiction écarte ce critère technique en affirmant qu’un tel opérateur exerce néanmoins son activité « dans le secteur du transport routier de marchandises pour compte d’autrui ». La cour administrative d’appel de Toulouse refuse ainsi de distinguer les entreprises selon qu’elles possèdent ou non les outils de production nécessaires au transport. L’appartenance sectorielle est définie par l’objet même du contrat de commission et non par les modalités concrètes de réalisation physique du trajet.
II. La rigueur de l’application du plafond des aides publiques de minimis
A. L’identification de la finalité du service comme critère de qualification La décision s’appuie sur la distinction entre les services de transport pur et les services intégrés où le transport demeure une composante accessoire parmi d’autres. Les juges relèvent que « la finalité du service offert par un commissionnaire de transport » demeure invariablement « l’exécution du transport de marchandises » pour le compte du client. Cette analyse fonctionnelle permet d’exclure la requérante du bénéfice des dérogations prévues pour les activités telles que le déménagement ou la collecte des déchets. La cour administrative d’appel de Toulouse privilégie donc l’objet principal de la prestation pour déterminer le régime juridique applicable aux aides d’État.
B. Une solution conforme à l’intention du législateur de l’Union européenne La cour administrative d’appel de Toulouse justifie son interprétation en se référant explicitement à « l’intention du législateur européen » exprimée dans les considérants introductifs du règlement communautaire. Elle rappelle que le plafond réduit vise à tenir compte de la taille moyenne réduite des entreprises et à prévenir les distorsions de concurrence. En maintenant une application stricte de ce seuil de cent mille euros, la juridiction garantit l’efficacité des objectifs de la politique commune des transports. Cette solution ferme confirme la volonté des autorités de réguler étroitement les avantages fiscaux octroyés aux intermédiaires agissant dans un secteur marqué par une surcapacité.