La cour administrative d’appel de Toulouse s’est prononcée, par un arrêt rendu le 20 février 2025, sur le régime fiscal d’indemnités transactionnelles versées après un licenciement. Un salarié occupant des fonctions de conseiller de direction a fait l’objet d’une rupture de son contrat de travail pour motif personnel en mai 2019. Un accord transactionnel a prévu le versement d’une indemnité légale de licenciement ainsi qu’une somme forfaitaire globale s’élevant à sept cent soixante-dix mille euros.
Les contribuables ont sollicité la réduction des cotisations d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre de l’année 2019. Le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande par un jugement du 16 octobre 2023 dont les requérants ont alors interjeté appel devant la cour.
Les requérants soutiennent que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et que l’indemnité visait à réparer des préjudices extrapatrimoniaux non imposables. Ils invoquent également l’absence d’entretien préalable pour contester la qualification fiscale retenue par l’administration lors de l’établissement de l’imposition litigieuse pour l’année 2019.
La juridiction d’appel doit déterminer si une indemnité forfaitaire versée en exécution d’une transaction peut bénéficier de l’exonération prévue par le code général des impôts. Elle examine si la réalité des motifs de rupture permet d’assimiler cette somme à des dommages et intérêts versés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La cour rejette la requête en considérant que le licenciement reposait sur un motif fondé et que les préjudices allégués ne permettaient aucune exonération spécifique. L’analyse portera sur la qualification de l’indemnité au regard de la cause de la rupture (I), avant d’étudier le régime strict des exonérations applicables (II).
I. La qualification rigoureuse de l’indemnité au regard de la cause de la rupture
A. L’analyse judiciaire du caractère réel et sérieux du licenciement
La cour rappelle que les sommes issues d’une transaction ne sont exonérées que si la rupture est « assimilable à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ». Elle souligne qu’il appartient au juge de l’impôt de rechercher la qualification véritable des sommes versées en se fondant sur l’instruction et la jurisprudence établie.
En l’espèce, le licenciement était motivé par une attitude critique et des doutes exprimés publiquement par le cadre dirigeant à l’égard de la stratégie de l’entreprise. Les juges estiment que ces éléments rendaient impossible la poursuite des relations contractuelles et que les requérants n’apportaient aucune preuve précise susceptible d’infirmer ce motif.
La contestation de la cause de la rupture ne s’appuie pas uniquement sur le fond mais invoque également des manquements aux formes substantielles de la procédure.
B. L’indifférence des irrégularités procédurales sur la nature fiscale des sommes
Les requérants invoquaient l’absence d’entretien préalable pour contester le bien-fondé de la rupture et obtenir ainsi une exonération fiscale des sommes perçues lors de la transaction. La cour écarte cet argument en précisant que le défaut d’entretien préalable n’a pas pour effet de priver le licenciement de son caractère réel et sérieux.
L’irrégularité procédurale ne suffit pas à transformer une indemnité transactionnelle en une somme réparant l’absence de cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat. Cette solution garantit une distinction nette entre le non-respect des formes légales et le fondement même de la décision de rompre le lien salarial.
L’absence de remise en cause du motif de licenciement conduit la juridiction à examiner le champ d’application des exonérations fiscales prévues par la loi.
II. Le régime d’interprétation stricte des exonérations fiscales applicables
A. L’exclusion des indemnités réparant un préjudice extrapatrimonial
Les contribuables affirmaient que l’indemnité transactionnelle devait être exonérée car elle visait à compenser des préjudices extrapatrimoniaux subis lors de la rupture de leur contrat. La cour de Toulouse rejette fermement cette analyse en se fondant sur une lecture littérale et rigoureuse des dispositions de l’article 80 duodecies du code général des impôts.
Elle énonce que ce texte ne prévoit pas que « les indemnités versées à cette occasion pour la réparation de préjudices extrapatrimoniaux bénéficieraient, en tant que telles, d’une exonération d’impôt ». Le caractère imposable des sommes versées lors de la fin du contrat de travail demeure le principe juridique, sauf mention expresse contraire d’un texte législatif.
Cette exclusion des préjudices extrapatrimoniaux du champ des exonérations emporte des conséquences directes sur le traitement fiscal de la totalité de la somme transactionnelle.
B. La confirmation de l’assujettissement global de la transaction à l’impôt
Puisque l’indemnité ne peut être assimilée à une réparation pour licenciement sans cause réelle, elle entre nécessairement dans le champ des traitements et salaires imposables. La cour administrative d’appel de Toulouse confirme ainsi le jugement du tribunal administratif de Montpellier en validant l’assujettissement à l’impôt sur le revenu de la somme perçue.
Cette décision illustre la volonté du juge administratif de limiter les stratégies de requalification fiscale des sommes versées sous le couvert d’accords transactionnels privés et forfaitaires. Le principe de légalité de l’impôt impose une application stricte des cas d’exonération afin d’éviter toute rupture d’égalité devant les charges publiques de la nation.