Cour d’appel administrative de Toulouse, le 23 janvier 2025, n°23TL00196

La Cour administrative d’appel de Toulouse a rendu le 23 janvier 2025 un arrêt relatif à la qualification et à la disponibilité des revenus distribués. La juridiction examine si l’inscription de sommes au crédit d’un compte courant d’associé permet d’imposer le bénéficiaire au titre de l’année de cet enregistrement. Un dirigeant de société a subi une vérification de comptabilité ayant révélé des crédits de plus de cent trente mille euros sur ses comptes personnels en 2015. Le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de décharge des impositions supplémentaires et des pénalités par un jugement du 21 novembre 2022. Le requérant soutient en appel que ces sommes constituent des primes salariales qui n’auraient été mises à sa disposition effective qu’au cours de l’année 2016. La question posée au juge est de savoir si le contribuable peut renverser la présomption de revenus distribués sans produire de bulletins de paie concordants. La cour confirme le rejet de la requête en jugeant que l’inscription comptable fait présumer la distribution et la disponibilité des fonds à la clôture. L’analyse de cette solution nécessite d’étudier la force de la présomption de distribution avant d’envisager les modalités temporelles de la mise à disposition des revenus.

I. La présomption de revenus distribués attachée aux écritures du compte courant d’associé

A. L’échec du renversement de la présomption de distribution faute de justifications matérielles

Aux termes de l’article 109 du code général des impôts, « sont considérés comme des revenus distribués toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés ». Les écritures inscrites au crédit d’un compte courant d’associé ont le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers par principe. Le contribuable peut toutefois renverser cette présomption légale en apportant la preuve que les fonds perçus relèvent d’une autre catégorie d’imposition selon la loi. La Cour administrative d’appel de Toulouse estime cependant que les éléments produits ne suffisent pas à établir le caractère de traitements et salaires des sommes. Cette difficulté probatoire résulte principalement de l’absence de concordance entre les actes juridiques de la société et les réalités comptables constatées par l’administration fiscale.

B. L’absence de concordance entre les délibérations sociales et la réalité des inscriptions comptables

Le requérant invoquait des délibérations du conseil d’administration prévoyant le versement de primes exceptionnelles et d’un intéressement pour justifier l’application de l’article 82. Le juge administratif relève que ces documents n’indiquent pas la date précise du versement et ne correspondent pas aux montants crédités sur les comptes courants. L’associé ne produit aucun bulletin de paie dont les mentions permettraient de confirmer la nature salariale des fonds ayant servi à solder sa position débitrice. La preuve contraire n’étant pas rapportée, l’administration était fondée à maintenir la qualification de revenus distribués pour l’ensemble des sommes inscrites au crédit de l’associé. La confirmation de la nature fiscale des revenus permet alors de déterminer la période d’imposition en fonction de la date de leur mise à disposition effective.

II. La disponibilité fiscale des revenus constatés par l’inscription en compte courant d’associé

A. La consécration de la présomption de mise à disposition à la clôture de l’exercice social

L’article 12 du code général des impôts prévoit que l’impôt est établi chaque année d’après les bénéfices ou revenus dont le contribuable dispose réellement. Les revenus distribués sont « présumés distribués à la date de clôture de l’exercice au terme duquel leur existence a été constatée » par les services de l’administration. La Cour administrative d’appel de Toulouse confirme que l’inscription au crédit d’un compte courant constitue une mise à disposition dès lors qu’un prélèvement est possible. Les crédits ayant été enregistrés le 30 septembre 2015, le juge valide l’assujettissement du contribuable à l’impôt sur le revenu au titre de cette même année. Cette présomption de disponibilité immédiate ne peut être écartée que si l’intéressé démontre une impossibilité matérielle ou juridique de disposer librement des sommes en cause.

B. L’insuffisante démonstration d’une impossibilité de prélèvement effectif des fonds par le requérant

Le contribuable ne démontre pas que le prélèvement des sommes créditées aurait été « impossible juridiquement ou financièrement » au regard de la situation économique de la société. Il résulte de l’instruction que l’associé a pu procéder à d’autres prélèvements au cours de l’exercice, ce qui infirme l’argument d’une indisponibilité réelle des fonds. La circonstance que les revenus n’aient pas été versés sur un compte bancaire personnel demeure inopérante pour contester la date de leur mise à disposition fiscale. La juridiction écarte également la contestation des pénalités en adoptant les motifs des premiers juges relatifs au caractère délibéré des manquements déclaratifs constatés chez le contribuable.

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Hassan KOHEN
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