Cour d’appel administrative de Toulouse, le 23 janvier 2025, n°23TL02547

La Cour administrative d’appel de Toulouse a rendu, le 23 janvier 2025, un arrêt relatif aux garanties procédurales entourant le renouvellement d’un titre de séjour. Un ressortissant étranger, résidant en France depuis de nombreuses années, sollicitait la prolongation de son droit au séjour en qualité de parent d’enfant français. L’autorité préfectorale lui opposa un refus assorti d’une obligation de quitter le territoire en se fondant sur une menace pour l’ordre public. Le tribunal administratif de Montpellier rejeta initialement sa demande d’annulation par un jugement rendu le 2 octobre 2023. Le requérant soutient principalement que la procédure est irrégulière faute de saisine préalable de la commission du titre de séjour compétente. La question posée aux juges d’appel concerne l’obligation de consulter cette instance lorsque l’étranger remplit les conditions de fond mais fait l’objet d’une réserve d’ordre public. La juridiction d’appel censure la décision administrative en affirmant que l’existence d’une menace ne dispense nullement l’administration de ses obligations procédurales légales. La solution repose sur la reconnaissance de la qualité de parent d’enfant français et sur le respect rigoureux des formes de consultation obligatoire.

I. L’affirmation d’une garantie procédurale substantielle

A. Le maintien du droit au séjour malgré la majorité de l’enfant

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile protège spécifiquement les parents contribuant à l’éducation de leurs enfants français. L’article L. 423-9 précise que « l’accès de l’enfant français à la majorité ne fait pas obstacle au renouvellement de la carte de séjour ». En l’espèce, la fille du requérant est devenue majeure après l’expiration du précédent titre mais pendant l’instruction de la nouvelle demande. La cour souligne que cette évolution familiale n’éteint pas les droits acquis dès lors que le parent assume toujours la charge de l’étudiante. Cette interprétation garantit une stabilité juridique aux familles dont les enfants atteignent l’âge adulte durant les délais de traitement administratif parfois excessifs.

B. Le caractère impératif de la consultation de la commission du titre de séjour

L’autorité administrative doit obligatoirement saisir la commission du titre de séjour lorsqu’elle envisage de refuser le renouvellement à un étranger remplissant les critères. L’article L. 432-13 instaure cette instance comme une garantie fondamentale pour les titulaires d’une protection liée à leur vie privée et familiale effective. Les juges relèvent que le requérant continuait de remplir les conditions matérielles prévues par la législation lors du dépôt de sa requête initiale. Ainsi, le préfet ne peut se substituer à l’avis de cet organe consultatif pour apprécier la situation globale de l’administré concerné. La protection des droits fondamentaux repose sur un respect scrupuleux des étapes procédurales imposées par les textes législatifs en vigueur.

II. Une protection rigoureuse face au pouvoir discrétionnaire

A. L’inopposabilité de la menace à l’ordre public sur l’obligation de saisine

La menace à l’ordre public permet de refuser un titre de séjour mais elle n’autorise pas l’administration à s’affranchir des formes protectrices. La cour dispose clairement que « la circonstance que la présence de l’étranger constituerait une menace à l’ordre public ne le dispense pas » de la saisine. Cette solution jurisprudentielle limite le pouvoir discrétionnaire de l’autorité préfectorale en le soumettant au contrôle préalable d’une commission indépendante et collégiale. Ici, le juge administratif rappelle que l’ordre public est un motif de fond qui ne saurait occulter les exigences de la procédure contradictoire. Une telle position renforce la sécurité juridique des administrés face à des mesures d’éloignement aux conséquences humaines et familiales particulièrement lourdes.

B. La portée de l’annulation pour vice de procédure

L’absence de consultation de la commission constitue un vice de procédure d’une gravité telle qu’il entraîne l’annulation totale de l’arrêté préfectoral contesté. La juridiction d’appel annule par conséquent le jugement de première instance ainsi que l’obligation de quitter le territoire français prise à l’encontre du requérant. Elle enjoint à l’autorité préfectorale de procéder au réexamen complet de la situation administrative de l’intéressé dans un délai de trois mois. Cette décision illustre la rigueur du juge administratif quant au respect des droits de la défense dans le cadre du contentieux des étrangers. La solution retenue confirme que les garanties procédurales sont indissociables de la légalité externe des actes administratifs portant atteinte à la liberté.

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Hassan KOHEN
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