Cour d’appel administrative de Versailles, le 1 avril 2025, n°23VE02084

La cour administrative d’appel de Versailles, par un arrêt rendu le 1er avril 2025, précise le régime de la responsabilité hospitalière. Cette décision traite de l’indemnisation des conséquences dommageables d’une prise en charge médicale défaillante suite à un accouchement.

Une patiente a présenté une phlébite superficielle évoluant en embolie pulmonaire après avoir quitté une maternité sans examen clinique préalable. Malgré une consultation ultérieure aux urgences, l’imagerie est restée incomplète et aucun suivi n’a été prescrit par les médecins.

Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l’établissement public de santé à verser une indemnité modeste le 18 juillet 2023. La victime a interjeté appel afin d’obtenir une réparation intégrale des préjudices résultant de cette défaillance de diagnostic. L’établissement hospitalier soutient en revanche que les fautes commises n’ont entraîné qu’une perte de chance limitée d’échapper à l’aggravation de l’état de santé.

Le juge d’appel doit déterminer si la prise en charge est fautive et comment évaluer la fraction du dommage imputable à l’hôpital. La juridiction retient l’existence de fautes caractérisées et porte le coefficient de perte de chance à un niveau quasi intégral.

I. L’établissement de fautes caractérisées dans la prise en charge médicale

A. La carence fautive du suivi clinique post-partum

Le juge souligne que l’équipe médicale a commis une erreur lors du séjour en maternité de l’intéressée. L’existence d’une thrombose veineuse « ne peut être écartée par un simple interrogatoire » selon les conclusions de l’expert désigné. En s’abstenant de procéder à un examen clinique malgré les douleurs signalées au mollet, le service a engagé sa responsabilité. Cette omission constitue une négligence dans le suivi normal d’une patiente venant d’accoucher par voie basse.

B. L’insuffisance technique des investigations diagnostiques

La défaillance se poursuit lors de l’admission ultérieure de la victime au service des urgences de l’établissement. Bien qu’un examen par imagerie soit pratiqué, sa réalisation demeure « incomplète, en l’absence de précision sur la localisation et l’étendue de la thrombose ». Le compte rendu lacunaire a empêché l’équipe médicale de disposer des « informations nécessaires à la détermination du traitement adapté ». L’absence de prescription d’un examen de contrôle renforce le caractère fautif de cette prise en charge hospitalière.

II. Une appréciation renouvelée de l’indemnisation de la perte de chance

A. Le critère de la probabilité de survenance du dommage sans faute

La décision apporte une précision majeure sur le calcul de la réparation due en cas de perte de chance. La juridiction d’appel rappelle que l’indemnité doit être évaluée en « fonction de l’ampleur de la chance perdue ». Pour fixer ce taux, le juge écarte le risque de complication en l’absence de tout traitement. Il privilégie « la probabilité que le dommage survienne en l’absence de faute » pour déterminer la responsabilité de l’hôpital.

B. Une réparation indemnitaire substantiellement rehaussée

L’application de cette méthode conduit à une revalorisation spectaculaire du coefficient de perte de chance, fixé désormais à 99 %. Le juge d’appel réforme ainsi le jugement de première instance qui n’avait retenu qu’un taux de 5 %. L’indemnité totale est portée à une somme plus conforme à la réalité des préjudices corporels et moraux subis. Cette solution garantit une protection efficace des usagers du service public hospitalier face aux erreurs de diagnostic.

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Hassan KOHEN
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