Cour d’appel administrative de Versailles, le 9 janvier 2025, n°22VE02688

La Cour administrative d’appel de Versailles a rendu, le 9 janvier 2025, une décision précisant les contours des garanties procédurales en matière de rectification fiscale. Le litige trouvait son origine dans un contrôle sur pièces ayant entraîné des rehaussements de l’impôt sur le revenu dans plusieurs catégories de revenus catégoriels. Les contribuables contestaient tant la régularité de la procédure suivie par les services fiscaux que le bien-fondé des rappels d’impôts et des majorations appliquées.

Le tribunal administratif de Versailles, par un jugement du 29 novembre 2022, avait prononcé une décharge partielle avant que les requérants ne saisissent la juridiction d’appel. La Cour administrative d’appel de Versailles devait déterminer si l’administration est tenue de répondre à des observations tardives et préciser les modalités de report des réductions d’impôt. La solution retenue confirme la primauté des délais légaux sur les délais gracieux et rappelle la rigueur du plafonnement global des niches fiscales prévu par le code général des impôts.

L’étude de l’encadrement des garanties procédurales précédera l’analyse du régime juridique applicable au plafonnement et au report des avantages fiscaux.

I. L’encadrement strict des garanties procédurales liées aux observations du contribuable

La régularité de la procédure d’imposition repose sur une motivation adéquate de la proposition de rectification et sur le respect des droits de la défense du contribuable. La Cour administrative d’appel de Versailles a d’abord dû vérifier si les exigences de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales avaient été respectées par l’administration.

A. La validité formelle de la motivation de la proposition de rectification

Pour être régulière, la proposition de rectification doit comporter la désignation de l’impôt, des années concernées et des motifs justifiant les redressements envisagés par le service. La Cour administrative d’appel de Versailles souligne que ce document doit « permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile » selon les prescriptions législatives. En l’espèce, les juges d’appel ont estimé que les mentions relatives aux faits et aux fondements juridiques étaient suffisamment précises pour éclairer les contribuables redressés. L’absence de critique étayée sur l’insuffisance de cette motivation conduit la juridiction à rejeter le moyen tiré de l’irrégularité formelle de la notification de redressement.

B. L’inefficacité des observations présentées au-delà des délais légaux

Le litige portait également sur l’obligation pour l’administration de répondre aux observations des contribuables lorsque celles-ci sont formulées après l’expiration du délai légal de trente jours. La Cour administrative d’appel de Versailles juge que « l’administration n’est pas tenue d’y répondre, quand bien même elle lui aurait, après l’expiration des délais légaux, accordé un délai supplémentaire ». Cette position réaffirme que les délais fixés par le livre des procédures fiscales présentent un caractère d’ordre public que les tolérances administratives ne peuvent modifier. Dès lors que le pli a été régulièrement notifié, le contribuable ne peut se prévaloir d’un délai de complaisance pour invoquer une méconnaissance des garanties de défense.

II. La rigueur des règles relatives au plafonnement et au report des avantages fiscaux

Le bien-fondé des impositions dépend de l’articulation entre les différents dispositifs d’incitation fiscale et le plafonnement global des niches fiscales. La décision commentée apporte des précisions sur le mécanisme de report des réductions d’impôt non utilisées en raison de l’application de ce plafond annuel.

A. Le refus du report des réductions d’impôt absorbées par le plafonnement global

Les requérants soutenaient que la fraction non imputée de leur réduction d’impôt pour investissement dans le capital des petites et moyennes entreprises devait être reportée sur les années suivantes. La Cour administrative d’appel de Versailles rappelle que le report n’est possible que pour la fraction dépassant les limites d’investissement ou le plafond des avantages fiscaux. Or, les juges précisent que « seule la fraction dépassant la limite annuelle (…) ou la fraction dépassant le plafond des avantages fiscaux » peut faire l’objet d’un tel report. Le plafonnement global de 10 000 euros limite ainsi drastiquement la possibilité de différer l’avantage fiscal lorsque l’impôt brut est déjà réduit par d’autres dispositifs.

B. L’ajustement nécessaire des majorations consécutif à un dégrèvement partiel

Si la Cour administrative d’appel de Versailles rejette l’essentiel des prétentions sur le fond, elle sanctionne l’administration sur le calcul des pénalités liées à l’impôt de l’année 2018. L’administration ayant reconnu en cours d’instance le bien-fondé d’un report partiel de réduction d’impôt, elle devait nécessairement ajuster les majorations correspondantes mises à la charge du contribuable. Le juge note que l’administration « n’a pas justifié avoir dégrevé, même partiellement, la majoration prévue à l’article 1758 A du code général des impôts » malgré la réduction des droits. Cette décharge partielle illustre le principe selon lequel l’accessoire suit le principal, imposant une correction automatique des pénalités dès lors que la base d’imposition est modifiée.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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